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Saïd nous avait laissés... sûrement pour un endroit meilleur. Ma mère ne sortait plus de chez eux. Elle y allait tous les jours pour aider la mère de Saïd. Saphir faisait pareil. Sauf qu'il ne parlait pas, Saphir n'était plus Saphir. Il était quelqu'un d'autre. C'était trop dur pour nous parce que Saïd était un frère pour nous, un fils pour ma mère. C'était un gros choc pour nous. Comme quoi, la mort ne prévient pas. Elle vient quand c'est ton heure, et tu ne sais même pas quand ce sera... Nous dire que Saïd ne serait plus dans nos vies, qu'on ne le reverrait plus, nous tuait. On n'arrivait pas à se faire à l'idée que Saïd était parti pour toujours... C'était trop dur.

Après cette tragédie, la cité n'était plus la même. La cité avait perdu un fils, et nous, un frère. Notre cité n'était peut-être pas tout rose, mais l'ambiance et la solidarité qu'on avait valaient tout l'or du monde. À la moindre galère, tu voyais les gens courir pour t'aider. C'était pas tout le monde, mais la plupart. C'était beau, c'était vrai, c'était ma cité. Je l'aimais, malgré tout. Elle n'était pas entièrement belle, mais elle était là dans tes galères. Elle t'aidait. Elle ne voulait pas forcément te voir réussir, mais elle t'aimait. Chelou, mais c'est comme ça. Quand ça n'allait pas, on aimait bien mettre la faute sur cette pauvre cité, qui en vrai n'avait rien demandé, rien fait. Mais pour couvrir nos erreurs, on disait que c'était à cause de la cité et de nos différences. Attention, il y avait des bons comme des mauvais chez nous. Beaucoup de gens voulaient ta perte aussi. Certains te le disaient franchement, d'autres le voulaient en secret. Ton pire ennemi pouvait devenir ton ami, et ton ami, ton pire ennemi. Les rôles changeaient sans que tu t'en rendes compte, sans que tu demandes quoi que ce soit. Et puis la vie était ainsi... Tu t'éloignais des personnes que tu considérais comme ta famille et tu te rapprochais de celles que tu ne côtoyais même pas. Tu perdais des gens qui t'étaient chers et tu te demandais pourquoi ça n'arrivait qu'à toi.

En tout cas, à cette époque, je me disais pourquoi est-ce que j'étais la seule à subir autant (même si je n'étais sûrement pas la seule, ni la pire). Le départ de mon père, la dépression de ma mère (hamdulillah, elle s'est vite reprise en main grâce à Allah et à nous), le décès de Saïd, la prison d'Aymen, même si c'était court, son comportement lunatique... Et enfin, Elsa. À cause de sa maladie, ça me faisait trop mal au cœur, car sa santé se dégradait de jour en jour... Environ une semaine s'était écoulée depuis la mort de Saïd. Moi, j'avais fait ma rentrée à mon école d'infirmière. Elsa était hospitalisée. J'allais la voir tous les jours, sans exception, après les cours. Je ne voulais surtout pas qu'elle se sente abandonnée à l'hôpital, mon petit cœur. Dites-vous que même Aymen venait la voir, pas souvent, mais il venait quand même. Ce mec a un cœur immense. Ça me fascinait tellement. C'était officiel, je l'aimais d'un amour fou. D'un amour pur et tellement solide.

Un jour, je rentre de l'hôpital. Dès que j'ouvre la porte de chez moi, j'entends des cris... Je vais au salon et je vois ma mère et Brahim se disputer. J'étais choquée.. Brahim était super énervé, et ma mère, je ne vous en parle même pas.

Ma mère: MAIS MERDE TU ME REND FOLLE BRAHIM TU ME REND MALADE

Brahim: et tu veux que je fasse quoi là ? Dis moi !

Il haussait la voix sans pour autant crier.

Ma mère: TU M'ÉCOUTE JAMAIS ! JE COMPREND PAS JE SUIS QUI MOI ICI ? UNE INCONNUE ? OU UNE MERDE ?

Brahim: hacha qu'est ce tu me raconte là ? Tout ça parce que je rentre pas ?

Ma mère: parce que tu rentre pas ??? TU TE FOUS VRAIMENT DE MOI ! TU SAIS TRÈS BIEN QUE Y A PAS QUE ÇA ME PREND PAS POUR UNE CONNE !

Brahim: tu sais quoi ? T'entendra plus parler de moi !

Maman: qu'est ce que ça veut dire ça ?!

Brahim: ça veut dire que je préfère me tailler que de te voir pleurer pour ma gueule

Chronique de Leïla : Mon amour tourmentéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant