[Matoine] Il est trop tard...

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« Antoine,


Tu te rappelles le soir où tout a basculé ? Nous regardions la télé, inhabituellement. J'étais allongé sur le canapé et toi derrière moi, dans la même position. Tu avais posé ta main sur ma hanche. Et moi, je n'ai rien trouvé de mieux à faire que de la retirer en te clamant de me laisser tranquille. J'ai croisé un instant tes prunelles tristes à l'entente de ma phrase. Nous le savions, ça n'allait plus. Notre couple s'effondrait et rien ne semblait permettre de le consolider. Ça avait été l'amour fou, au début. Et puis, rapidement, trop à mon goût, mes sentiments ont changés pour ne redevenir qu'amicaux. Tu l'avais remarqué, je le sais. Je t'entendais pleurer, la nuit, alors que tu te cachais dans la salle de bain. Et je suis désolé. Je suis désolé de n'avoir rien fait, de t'avoir rien dit. J'ai été sacrément con sur ce coup là, en voulant te protéger. Et puis tu t'es levé, tu as pris ta veste et tu es parti. Je ne t'ai pas retenu, je ne sais pas si j'ai réellement bien fait ou non. Tu n'étais pas rentré de la nuit, je m'y attendais. Mais ce n'est que vers cinq heures que je l'en suis mordu les doigts. Lorsque l'hôpital m'a appelé. Tu étais si énervé que tu avais traversé la toute sans regarder autour, tu étais dans le coma. Et tu l'es toujours au moment où j'écris cette lettre. Je suis bien évidemment allé immédiatement au centre hospitalier où tu te trouvais pour prendre de tes nouvelles. Je me souviendrai toujours de la deuxième phrase qu'a prononcée le médecin qui s'occupait de toi... ''Nous ne savons pas si nous pourrons sauver monsieur Daniel.'' Ça m'avait fait tellement mal... Et depuis ce jour, j'écris un peu plus de cette lettre, je rajoute quelques mots douloureux sur le papier en espérant que tu te réveilles. J'imagine cette ordure qui t'a renversé payer pour ce qu'il a fait. Il ne peut t'ôter la vie. T'as pas le droit de me laisser... Ça fait déjà un mois, un mois jour pour jour que je viens te voir, un mois jour pour jour que je pleure et regrette et un mois jour pour jour que je me suis rendu compte du réel amour que je te portais. Mais il est sans doute trop tard, maintenant. Je m'en veux, putain... Je m'en veux tellement 'Toine... Mais je veux pas te perdre, pas maintenant que je me suis rendu compte de mes réels sentiments... Je donnerais mon cœur pour que tu te réveilles. Pour que je puisse voir tes magnifiques yeux chocolats. Pour que je puisse entendre ta belle voix... Tu dois trouver cette lettre bien niaise. Si jamais tu la lis. Chaque jours. Chaque jours je me dis que l'hôpital va m'appeler, au réveil. Chaque jours je me dis que tu vas ouvrir les yeux, quand je te regarde dormir si paisiblement, peut être à jamais. Chaque jours que je m'endors en me disant que tu ne vas jamais te réveiller. Et que je pleure... Ça va faire deux mois. Deux mois 'Toine... Deux putains de mois que je sors plus, que je ne dors plus beaucoup. Je m'en veux tellement 'Toine... Je suis si... vide sans toi. Les médecins parlent de te débrancher, tu ne peux pas savoir à quel point j'ai peur... Réveille toi, je t'en prie. Je désespère. Je désespère tellement que je me mets à prier, tu te rends compte ? Demain sera ta dernière chance 'Toine, saisis la, je t'en supplie. Je t'aime Antoine Daniel, je t'aime tellement. Je crève d'amour pour toi... Ouvre les yeux...


Ton homme très con,


Mathieu. »


Antoine ne pouvait empêcher les larmes de couler sur ses joues. Il relut plusieurs fois la lettre, pour être sûr que ce ne soit pas une hallucination. De longues minutes plus tard, la porte s'ouvrit dans un grand fracas.


« Antoine ! S'écria l'auteur de la lettre en se jetant dans les bras du chevelu, posant sa tête sur son torse. Ne me laisse plus...


-Non, Math'... Je t'aime.


-Je t'aime aussi. »


Ils s'embrassèrent longuement. Qu'est ce que l'aîné lui avait manqué au petit... Dommage qu'il eut fallu que l'un d'eux se retrouve aux portes de la mort...

Recueil de textes gaysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant