Rouge.

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J'avais envie de rencontrer la mère de Louisa, et je me disais qu'elle devait lui manquer aussi. Que savais-je de cette femme ? Elle s'appelait Léa, elle avait la cinquantaine, elle était apparemment une mère sévère mais juste et attentionnée, elle avait élevée presque seule Zahllin et Louisa, parce que leur père, Victor, était souvent parti pour le travail. Enfin il fallait que je lui expose l'idée de l'inviter, avant que mes parents ne reviennent, c'est à dire deux semaines plus tard.
Et puis, je sentais ces derniers temps un vide chez ma Louisa, et j'en avais très peur. J'avais peur que ce vide ne vienne pas seulement du manque de sa mère, mais aussi de son envie de connaître son père biologique, ce François Martin qui n'était encore pour elle qu'un nom sur un acte de naissance. Alors, même si il était mort, il avait peut être une famille, une histoire à découvrir. Mais je ne savais pas comment lui en parler, ni même si je devais le faire. Elle était tellement fragile... Enfin c'était plutôt la façon dont je la voyais, je me donnais ce rôle là, de la protéger de l'univers, j'étais tellement persuadée d'être la seule capable de la réconforter et de sécher ses larmes, que j'en faisais le but de ma vie. Prendre soin d'elle était mon destin, j'étais née pour ça.
D'ailleurs, puisqu'il fallait que je lui parle de quelque chose, j'allais lui parler de ça. Où était elle ? Je m'étais tant perdue dans mes pensées que je ne le savais même plus. Je criai à travers le petit appartement ''Louiiisaaaa???''. Elle ne répondait pas. Je m'empressai alors de la chercher. Personne dans ma cuisine. Mon coeur s'emballait. Personne dans ma chambre. Mes poumons s'essoufflaient. Ma petite amie gisante sur le carrelage froid de la salle de bain. Mes larmes explosaient. Ses paupières étaient clauses, elle avait presque l'air de dormir. Elle respirait bien, son coeur battait correctement. Pas de sang, seulement le rouge infernal de sa peau d'habitude si blanche, le rouge infernal de ses lèvres d'usage si roses. Rouge. Rouge comme une brûlure, rouge comme le soleil au plus profond des crépuscules. Rouge. Rouge vif, rouge ardent, le rouge de l'amour, le rouge des enfers. Je ne pouvais plus bougé, tout en moi résistait aux tentatives si veines de mon reste de conscience. Ma peur tremblait dans un coin, mon horreur ouvrait de grands yeux, ma force tentait de remonter une pente savonneuse, et ma douleur hurlait au milieu, comme une déesse brûlante et tyrannique. Il fallait que je la réveille. Que faire ? Cerveau, machine froide, laisse ce coeur trop chamboulé, abandonne le là, juste là, sur le sol blanc et glacé, et agit enfin ! Téléphoner ! Ça y était ! C'était ça ! Il fallait saisir cet objet noir. Salon. Cours dans le salon. Tu tombes ? Laisse le sang couler à ton genou, prends l'appareil. Tape le numéro. Deux chiffres. Tu peux, vas y, c'est pour elle. Attends sagement qu'une voix réponde. Reprends ton souffle, tu vas tomber toi aussi. ''Biiiip. Biiip.'' Mais mon Dieu quel son long et affreux. ''Caserne de Sens, bonjour.'' Écoute là voix. Voilà, maintenant ouvre la bouche, très bien. Produis un son. ''Aaaaah...'' Oui, c'est presque ça, maintenant il faut que ça veuille dire quelque chose. C'est pour elle, Violette, c'est pour elle. Parle bordel !! '' Mon amie a perdu connaissance. Huit boulevard du seize août.''. Voilà, tu m'as fait, maintenant ils vont venir. Retourne vers elle, attends et calme toi.

Elle... Et Moi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant