Moi et les enfants

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Je hais les maternités. Voir tous ces gens avec des sourires dans les couloirs, ça me fout le bourdon.

À peine arrivé dans le hall de la clinique, un gamin en fauteuil roulant manque de me foncer dedans. Je me retiens de l'envoyer rouler contre le kiosque à journaux. Du fond du couloir, je vois F-X et Jean-Manu qui déboulent, tout guillerets. J'imagine que c'est l'heure de leur pause clope.

F-X m'attrape aussitôt par l'épaule et me traîne au dehors. Il fait frisquet, j'ai pas très envie de taper la discute ni de renifler leurs fumées de cigarettes, mais je me dis que je ferais mieux de sourire et me montrer enjoué juste au cas où Sosnowski serait quelque part en planque avec un gros appareil photo. J'ai franchement la flemme de scanner toutes les bagnoles du parking pour vérifier s'il est là. En plus si ça se trouve, il est perché dans un arbre dans le parc au loin. Dans le doute, je fais comme si.

Jean-Manu me bombarde d'informations nulles : 3,3 kilos, 50 centimètres, des cheveux roux, de grands yeux bleus, maman a la forme, pas plus de trois heures pour l'accouchement, né avant hier à une heure du matin, tout le monde satisfait.

J'en ai rien à foutre. Je n'ai absolument aucune idée des mensurations normales d'un bébé à la naissance, donc je ne m'embarque pas dans les commentaires techniques.

— Tu as apporté un petit quelque chose pour la maman ? me demande F-X

Et merde ! Les traditions à la con.

— Oui, euh ! Si, si. C'est juste que, je dois passer à la boutique relais pour acheter une carte. J'ai pas eu le temps. Le boulot, tout ça.

— Quelle tête en l'air ce Didier ! me nargue Jean-Manu. Et je parie que tu as aussi oublié quel jour est né le petit nouveau !

— Avant-hier ?

— Ouais. Et c'était quel jour avant hier ?

— Jeudi ?

— Mais encore ?

Je déteste les devinettes ! Je déteste Jean-Manu. J'ai envie de lui foutre mon poing dans la gueule. Où est-ce qu'il veut en venir à la fin, ce gros débile. Je lance un coup d'oeil à F-X pour qu'il me vienne en aide, mais il est en train de sextoter sur son téléphone.

— C'était la Saint-Valentin ?

— Ben, non c'est le 14 février la Saint Valentin.

— Ah !

— Toujours à côté de la plaque, pas vrai ! Allez, je t'aide : le petit Philémon est né exactement le même jour qu'un de ses grands frères !

— Oh ! Quel drôle de hasard.

— Ça y est ? Ça te revient ?

— De quoi ? Comment veux-tu que je connaisse la date de naissance des gamins de Jason ?

— Didier : je te parle de Donovan.

— Qui ça ?

— Mais ton filleul ! Enfin, quand même. Ça va ? T'as pas l'air dans ton assiette : tu fais une drôle de tête.

— Donovan. Mon filleul...Ah, oui, c'est vrai ! Non, mais c'est le genre de trucs, j'oublie à chaque fois.

— T'es son parrain, mec ! C'est comme si tu étais de sa famille.

— Ben, je vais acheter une deuxième carte au relais presse alors.

Je sens bien que Jean-Manu est un peu choqué. Je pense qu'il a deviné mes intentions. Je vais bien entendu acheter des jolies cartes avec des jolies enveloppes et y glisser des liasses de liquide. De toute manière, il est trop tard pour prévoir autre chose et je ne sais foutrement pas quoi offrir à une maman et son bébé ni à un gamin âgé de... Putain il a quel âge ce con ? J'espère juste que j'ai assez de billets sur moi. Avec 400 balles chacun, ça devrait le faire. J'imagine.

Super Vilain ~ version WPOù les histoires vivent. Découvrez maintenant