-Ca va aller, Katniss ?
Haymitch, l'air inquiet, sur le porche, commence à s'inquiéter de mon état de santé.
Je n'ai presque rien mangé depuis quelques jours, et je suis faible. Je ne parle pas, je ne ris pas, je ne souris pas.
Je ne vis pas, je survis.
Lorsque je me regarde dans le miroir, quand j'en ai le courage, j'ai l'impression d'y voir ma mère.
Ma mère, après la mort de mon père. Ma mère et son expression impassible, telle une morte vivante. Ma mère, et ses joues creusées de fatigue, ses yeux tristes cernés de longues nuits sans sommeil et d'inquiétude. Ses cheveux décoiffés, son apparence négligée.
Je n'en peux plus d'être ici, où chaque endroit, chaque moment, me ramène au passé, quand Peeta était là. Je ne me pardonnerai jamais de l'avoir laissé prendre ce stupide train.
Tout est de ma faute.
Aujourd'hui, Haymitch a aidé Annie à déplacer ses affaires dans une des maisons vides du quartier. Je suis maintenant livrée à moi-même. Seule.
-Katniss ? répète-t-il, en claquant des doigts devant mes yeux.
Je lui ferme la porte au nez. Je ne veux plus que l'on s'occupe de moi. Je ne veux plus entendre parler de Capitole, de districts, de Panem, de rébellion, de paix.
Je veux juste être seule. Seule, et loin.
Je ferme la porte à double tour. Haymitch se met à taper violemment contre les carreaux.
-Katniss! Ouvre cette porte! Tout de suite ! hurle-t-il.
Mais je m'en fiche, je ne porte plus d'importance à quoique ce soit.
J'ai besoin de partir loin d'ici, dans un endroit où je peux entendre les oiseaux chanter et où je peux voir le soleil se lever.
J'ai besoin d'aller dans la forêt.
Je dois aller dans la forêt.Je monte les étages quatre à quatre. J'attrape un sac à dos dans ma chambre, puis le remplis du nécessaire de survie.
C'est là bas que je veux vivre désormais.
À côté de lit est installé le portrait de Primrose, que Peeta m'a peint pour mon anniversaire. Je le prends avec précaution, en observant avec émoi le moindre coup de pinceau.
"Joyeux anniversaire, Katniss." avait-il dit. J'entends toujours sa voix.
J'enfile mes bottes de chasse, le manteau en cuir de mon père.
Assise sur une chaise, dans la cuisine, le cœur battant à tout rompre, je décide d'attendre d'être sûre qu'Haymitch est parti, avant de m'enfuir dans la forêt.
J'ouvre la porte, puis sors. Je me mets alors à courir, à courir de toutes mes forces vers le seul endroit où je me sens en sécurité, désormais que les bras de Peeta ne seront plus là pour éloigner mes cauchemars.
Le sentiment de tristesse que je ressens est mélangé avec de la colère. De la colère contre le temps, qui est toujours trop court. De la colère contre la vie, contre le destin, contre tout.
Je suis habitée d'une haine ingérable qui me donne la force de courir là, entre deux trois arbres.
Je sais où je vais. Dans la cabane de mon père. Là où nous allions, avant que je perde tout ce que j'avais. Cela fait un an ou deux que je n'y suis pas allée, et je ressens une boule au ventre à l'idée d'y rentrer.
J'arrive à l'endroit où je cache mon arc, le trouve intact. Je commence à avoir la tête qui tourne, et je vois flou, mais je continue de courir comme si ma vie en dépendait, en me prenant au passage quelques branches, ronces.
Pendant l'espace d'une seconde, je me sens coupable par rapport à Haymitch.
Et puis je me souviens que s'il veut vraiment me trouver, il sait très bien où me chercher, et je continue ma course.
Je continuerai d'aller rendre visite à Annie et à son fils Adam, qui va désormais être soigné, aussi longtemps que je serai en vie.
Haletante, au bord du malaise, j'arrive avec soulagement à destination. Je m'arrête un instant, pour reprendre mon souffle, tout en l'observant, des larmes chaudes coulant bientôt lentement sur mes joues froides.
Je pousse la lourde porte. Une odeur de vieux bois me parvient, et alors, je me souviens de tout. Des longues après midi de chasse avec mon père, de nos glorieux repas le soir, lorsque nous avions réussi à tuer un ou deux lapins.
De son sourire, et de ses grands yeux gris qui m'observaient avec bienveillance.
Je me souviens encore de chaque trait de son visage, mais ils commencent à s'effacer peu à peu. Tous les matins, je regarde la photo où il pose, sur ma table de nuit.
Parce que je ne veux pas oublier.
Épuisée, je m'allonge sur le lit de fortune installé au fond de la seule et unique pièce, et m'endors presque aussitôt.
Quelques heures plus tard, je me réveille en hurlant le nom de Peeta, mon esprit hanté par des visons d'horreur. Encore.
Cette fois-ci, j'ai rêvé que je le perdais, Mais il n'est pas là pour me dire qu'il sera là, toujours. Parce que ce n'est pas un cauchemar, cette fois ci.
J'ai bel et bien perdu le garçon des pains, pour toujours. Ayant un besoin d'air frais, je sors dehors, tenant à peine sur mes jambes.
La nuit est déjà tombée.
Le vent frais décoiffe mes cheveux, et sèche mes larmes. Le lac, devant moi, me fait penser à mon père.
-Papa, je murmure, la gorge nouée. Tu me manques.
Je m'assois sur la grosse pierre, où je me trouvais quelques jours auparavant.
Peeta était venu juste à temps. Il m'avait sauvée, encore une fois. Et je ne l'ai jamais remercié.
-J'ai perdu celui que j'aimais.
J'enfouis ma tête entre mes paumes.
-Peut-être qu'il est déjà là haut, avec toi. Si c'est le cas, cela ne fait aucun doute, tu vas l'adorer.
Je met un petit orteil dans l'eau froide du lac.
-Il est parti trop tôt. S'il te plaît, papa. Dis lui que je l'aime. J'aurais voulu, mais nous n'avons pas eu assez de temps, et j'étais trop effrayée pour admettre que je l'aimais. Parce qu'aimer, c'est comme faire un saut dans le vide.
Je respire profondément.
-Tu manques à maman, tu sais. Elle ne s'inquiète même pas pour moi, ne cherche même pas à savoir si je vais bien. Mais ne lui en veux pas.
Le regard tourné vers les étoiles, j'essaie d'imaginer Peeta, entre deux constellations.
-Je sais ce que ça fait maintenant.
De là-haut, il me regarde.
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Salut à tous !
J'espère vraiment que ce chapitre vous a plu et que vous ne les trouvez pas trop tristes en ce moment (je vous promets, ca ca s'arranger!)
Bisous et merci d'avoir lu!
Chanson ; "See you again" de Wiz Khalifa
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Will love find a way?
Fiksi PenggemarIl est là, dans le village du district douze. Il est là, devant moi. Sa carrure musclée, ses cheveux blonds ébouriffés. Ses yeux bleus océan perçant le jour. Son air gentil, toujours serviable. Son air détruit. Détruit par la vie, tout simplement. ...