Affaire d'État

4. Comment NE PAS se faire remarquer ?

Il me reste cinq minutes avant que les cours ne commencent.Je décide de sortir prendre l'air avant de rester toute une matinée enfermée, et j'en profiterai aussi pour me trouver un coin tranquille et tenir Zoé au courant. Mais Jonathan bouscule mes plans. En m'apercevant sortir d'un côté, il m'appelle.

- Alice, attends !

Je lui fais face, il y a environ deux mètres qui nous séparent.

- Tu ne veux pas venir avec moi... j'aimerai te présenter à mes amis.

- Autant faire le tour des classes dans ce cas, dis-je,sarcastique.

- Je te promets que ce ne sera pas long, me dit-il en s'approchant de moi. Et si tu en as marre de nous, je te laisse tranquille, promis.

- Ça fait beaucoup de promesses, répliqué-je en rigolant.

Je le suis sans attendre de réponse de sa part. Il me conduit jusqu'à un groupe... de deux personnes. Oui, vraiment, deux personnes. Il y a une fille, aux cheveux roux lissés et aux yeux verts, pas plus grande que moi, qui parle à un garçon brun, mais que je ne vois pas très bien étant donné qu'il est de dos. Il se retourne à moitié lorsque nous arrivons.

- Alice, je te présente Genny, ma meilleure amie depuis toujours, et Thomas, un très bon ami que j'ai connu l'été dernier en camp de vacances. Puis il s'adresse à eux. Les gars, je vous présente Alice, elle vient tout juste d'arriver de...

Je ne m'attendais pas à ce qu'il me demande de quelle ville je viens. Je continue tout de même sa phrase comme si de rien n'était :

- Euh... J'habite ici depuis un moment mais j'avais les cours à la maison, mentis-je.

- Salut, me lance Genny tout sourire, contente de te rencontrer. Jonathan et moi nous connaissons depuis que nous avons cinq ans. Autrement dit tu peux me demander n'importe quoi sur lui,je pourrai t'en informer.

Elle me dit ça comme pour compléter les présentations de son ami. Je ne lui réponds rien, mais lui envoie un regard entendu. Elle est aussi pleine de bonne humeur que Jonathan, mais plus discrète. Je comprends en les observant que c'est ce qui les rapproche.

- Oui, enfin, essaie de ne pas trop m'humilier s'il te plaît, ou elle va s'enfuir en courant. Je veux bien que tu sois jalouse, mais c'est la seule fille que j'invite dans notre groupe depuis qu'on se connaît.

Genny le frappe légèrement à l'épaule. J'esquisse un petit sourire, qui disparaît quand Thomas prend la parole.

- Ce n'est pas anodin de travailler chez soi, me dit-il en me regardant droit dans les yeux, je vois alors qu'il a des yeux bleus très profonds qui ressortent avec ses cheveux foncés.Pourquoi es-tu venu au lycée vers la fin de l'année ?

Je garde mon air confiant, sûre de moi.

- J'ai eu besoin de prendre l'air, et on m'a dit qu'il valait mieux pour moi que j'ai une vie d'adolescente normale,continué-je à mentir.

- Mais je ne t'ai jamais vu en ville. Tu traînes souvent ?

- Oui mais je sais me faire discrète, contrairement à d'autres.

Je laisse passer le sous-entendu. Il a très bien compris ce que je voulais dire.

- Ah, j'avais oublié de te dire, vieux, renchérit Jonathan, elle a du mordant.

Il rigole légèrement et Genny est amusée aussi, mais je ne fais plus attention à eux. Je garde mon regard fixé sur celui de Thomas. S'il veut me chercher qu'il me cherche, mais il devras'attendre aux conséquences. Je ne sais pas ce qui le rend suspicieux. Je n'ai rien dit, rien fait de travers et j'ai répondu à ces questions plus vite qu'il ne les a posées. J'entends un bruit aigu retentir, qui me coupe de mes questions : c'est la sonnerie du lycée qui annonce le début des cours. Curieusement, je ne bronche pas et lui non plus d'ailleurs. C'est Jonathan qui me ramène à la réalité en parlant pour une fois très sérieusement.