46. Mépris et Moquerie : de bons amis

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— Je vous connais ? lance-t-il de manière méprisante.

Je jette un œil vers Thomas. Étant donné le regard qu'il me fait, je doute qu'il entende un traître mot de ce que l'homme raconte de l'autre côté de la vitre. Je ne perds pas de temps et réplique d'un ton sûr :

— Non... enfin pas totalement. Nous sommes les deux raisons de votre présence ici.

J'affiche un sourire, fière de moi, quand la mine de l'homme en orange se décompose devant moi. J'ai l'impression qu'il peut me tuer rien qu'avec le regard qu'il m'envoie. Il me fixe, et ne se détourne pas un instant. Je suppose qu'il veut me faire peur, mais je ne suis pas du genre à déchanter aussi facilement. Il devrait le savoir puisque c'est en partie grâce à moi qu'il porte cette couleur qui lui ravit le teint. Thomas garde son sérieux et Fickelman lance un regard vers lui, histoire de l'identifier j'imagine. Mais il tourne vite ses yeux vers moi et lâche d'une voix glacial :

— Qui êtes-vous ?

Je n'ai pas l'intention de lui répondre. Plus pour ma sécurité que pour l'embêter. Je ne sais pas s'il va rester enfermé longtemps, ni s'il va vraiment être jugé coupable après son procès, alors je préfère ne rien dire au cas où il sortirait. Je sais qu'il serait capable de faire tout et n'importe quoi pour éliminer des obstacles qui l'empêchent d'avancer. Et nous en avons fait partie. C'est même toujours le cas.

— Nous cherchons des réponses.

Il ne répond rien. Je suppose qu'il me laisse continuer dans ma lancée, alors c'est ce que je fais :

— Nous avons arrêté une certaine personne qui nous a conduit à vous. Je vous rassure, cette personne a parlé en échange d'une charge moins lourde à son procès. Vos petits soldats vous sont très fidèles. Nous savons donc tout ce qui concerne votre affaire. Vous avez espionné Jonathan Hale et avez utilisé des étudiants innocents pour fabriquer un outil de traçage qui vous aurait permis d'abattre Georges Hale de l'intérieur. Comme si la victime d'un meurtre avait forgé l'arme qui l'aurait tué.

Pour la première fois depuis notre rencontre, il sourit. C'est un sourire plein d'assurance, de fierté, un sourire sournois et vil. Il rit légèrement de l'autre côté du combiné et je ne peux m'empêcher de me demander ce qui ne va pas dans sa tête. Des rides se marquent sur son front alors qu'il regarde la plateau sur lequel il a posé son bras. Il se reprend sans effacer ce sourire de son visage.

— Oui... Je dois avouer que ce plan était particulièrement intelligent. Il ne pouvait que l'être venant de ma part.

Je rêve ! Je crois que je vais le tuer. Je vais briser la vitre à la force de mon poing, ramasser un bout de verre, plaquer Fickelman au sol, et lui ouvrir la peau lentement jusqu'à ce qu'il se vide entièrement de son sang. Puis je me rappelle que nous avons besoin de lui pour savoir où se trouve Jonathan. Quel dommage...

— Mais il ne s'est pas passé comme prévu, ajouté-je alors pour le calmer.

Et ça a l'air de fonctionner. Son sourire disparaît et il reprend le même visage que précédemment. Froid, prêt à se jeter sur la première personne qui le titillera.

— Nous vous avons arrêté, continué-je, et nous avons mis Jonathan hors de danger. Mais nous savons que vous n'en avez pas terminé. Alors je vous pose la question : où est Jonathan?

J'y suis allée franco. Je n'ai pas envie de tourner autour du pot pendant des heures alors qu'il peut couper court à la conversation quand il veut. J'attends qu'il réagisse, et j'ai envie de le secouer jusqu'à ce qu'il montre un tant soit peu d'attention à ce qu'on lui dit.

Il finit par sourire. Toujours ce même sourire qui lui est propre, moqueur et irrespectueux. Je ne sais pas ce que ça veut dire. S'il est fier d'avoir réussi son coup et n'arrive même pas à nous le cacher alors que nous sommes en face de lui, ou alors s'il se fout tout simplement de nous parce que nous n'avons pas assuré après son arrestation et qu'au final, même si l'idée ne vient pas de lui, l'enlèvement lui fait sacrément plaisir. Je n'arrive pas à lire le message que laisse passer son regard. Mais après quelques dizaines de secondes d'attente, je comprends qu'il ne va pas me répondre. Parce que ça lui plaît bien trop de jouer avec moi comme ça.

Affaire d'ÉtatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant