63. A la bonne heure

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Je reste interdite après l'histoire que vient de nous raconter Genny. Depuis plus d'une dizaine de jours, elle vit un véritable enfer alors que nous ne savions même pas qu'elle n'avait jamais quitté l'État. Un goût de culpabilité me remonte à la gorge, je suis énervée contre moi-même. Je n'ai pas assez pris cette affaire au sérieux. J'aurais dû m'investir plus. Parce que pendant que Thomas et moi travaillions calmement, et rigolions bien des choses stupides quand elles se présentaient, Genny était assise sur une chaise, au milieu d'une salle vide, loin de tout et sans une onde d'espoir.

— On aurait dû faire plus attention... lâché-je, les yeux vers le sol. On aurait dû être plus rapides !

Je me lève, folle de rage. Je n'en peux plus, mes nerfs craquent, et ce ne doit pas être agréable à voir. J'ai envie de frapper le premier mur qui sera face à moi, la première tête que je croise. J'ai envie de tout casser. Tout ça, c'est de notre faute !

— On a fait ce qu'on a pu, tente de me rassurer Thomas.

— Eh bien on aurait dû faire plus encore !

Le brun se lève de sa chaise. Il ne sait d'abord pas trop ce qu'il doit faire, je suis au bord de l'implosion. Mais très vite, il s'approche de moi et passe ses mains sur mes bras pour essayer de ma calmer. Je passe mes mains sur mon front bouillant et tente de me calmer aussi. Ça ne nous aidera pas à trouver Jonathan.

— Qu'est-ce que vous faites ici ?

La question de Genny me sort de ma tornade. Je me retourne pour lui faire face, et souffle un coup pour faire passer la pilule. C'est l'heure des explications.

— On est des espions, répond simplement Thomas.

Je pense qu'elle ne va pas accepter cette réponse comme ça et dire « Oh, OK, ça marche », alors j'ajoute :

— On travaille pour la PPAE... enfin on travaillait pour eux, plus précisément. C'est une agence qui s'occupe d'affaires importantes qui concernent l'État. Et, pour faire court, on devait surveiller Jonathan pendant un temps. Maintenant, on s'occupe de le retrouver.

Genny est un peu étonnée, mais au vu de la situation qu'elle a dû affronter ces derniers temps et ce qu'elle sait, je pense qu'elle n'est pas autant surprise qu'elle aurait pu l'être dans d'autres circonstances. Elle reste cependant sceptique.

— Mais alors... vous vous connaissez depuis le début ? Et vous avez fait semblant de vous détester ?

— Oh non, ça c'était bien réel, répond Thomas d'un ton qui pourrait paraître beaucoup trop naturel pour une question de ce genre. Mais c'est une autre histoire, et on n'a pas vraiment le temps de la raconter.

Nous continuons d'interroger Genny sur ce qu'elle sait à propos de ce qui s'est passé quand elle était ici, afin de faire le tour de la question. Tout ce dont elle peut se rappeler peut nous être d'une aide précieuse. De ce qu'elle sait, ses ravisseurs ont envoyé un message à ses parents pour qu'ils n'appellent pas la police pour signaler sa disparition, en le ponctuant de menaces assez lourdes pour les convaincre. Nous savons maintenant pourquoi nous n'étions pas au courant de cela. Ça nous montre aussi qu'ils sont très organisés, mais ça nous le savions déjà. Mais cela nous apprend aussi qu'ils avaient prévu l'enlèvement de Jonathan bien avant l'arrestation de Wood Van Del, et par la même occasion celle de Fickelman. Cette dernière a d'ailleurs dû être un feu vert pour lancer le départ de tout le système qui avait été mis en place. Je pense d'ailleurs que c'était lui, l'homme en costard qui a chaleureusement accueilli Genny et Jonathan ici. Quoi que si j'en crois nos informations, celui-ci a été arrêté quelques jours avant l'enlèvement du blond. Je ne sais plus quoi penser. Fickelman a sûrement des centaines, voire peut-être même des millier de personnes qui travaillent pour lui si nous comptons tous ses employés de toutes les entreprises qu'il possède. Il a des dizaines de contacts qui peuvent faire le sale boulot à sa place, des dizaines d'autres qui ont de l'influence dans leur propre domaine, et des centaines d'exécuteurs.

Affaire d'ÉtatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant