29. La magicienne

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Je tourne la clef dans la serrure, le paquet dans les bras, et mon repas par-dessus. Quand je réussis enfin à m'introduire dans l'appartement, je pose le sac de chez Granny's sur la table basse du salon, me dirige jusqu'à ma chambre et dépose le paquet surprise sur le lit. Il est assez grand, comme une sorte d'énorme boîte à chaussures en carton, mais en beaucoup plus large, plus plat et plus sophistiqué. J'ai l'impression de connaître ce style de boîte, mais je ne réfléchis pas et ne perds pas une seconde de plus avant de l'ouvrir. Je défais le nœud du ruban et soulève le couvercle. Du papier craft recouvre le présent. Je l'enlève avec délicatesse et ma respiration se coupe à la vue de ce que je vois à l'intérieur. Je savais bien que je connaissais cette boîte, et je sais maintenant pourquoi. Sur le présent est posée une carte cartonnée, au bordures dorées, sur lequel est écrit un petit mot :

Changement de plan. Je l'ai choisie moi-même, j'espère que ça vous plaira. J.S.

Je crois qu'il se fiche de moi. En tout cas je l'espère de tout mon être, s'il n'a pas déguerpi en voyant ce que contient le paquet. Encore sous le choc, le portable que j'avais laissé dans le salon sonne, signe d'un nouveau message. C'est Zoé, et ce qu'elle me dit confirme mes doutes.

Désolée mais il y a eu un retournement de situation. On ne peut pas faire autrement. J'espère que ça ne t'ennuie pas trop, mais il n'y a vraiment pas d'autre moyen. Encore désolée.

PS : Quelqu'un va sonner à ta porte dans les prochaines minutes, c'est quelqu'un qu'on a appelé donc tu pourras ouvrir.

Pour me rendre compte de ce qui vient de se passer, je retourne dans la chambre et regarde une nouvelle fois la boîte blanche, et le papier craft qui en ressort. Je touche le tissu du bout des doigts, comme je l'avais fait dans ce magasin chic en ville,avec Genny. Puis je l'attrape et sors le vêtement de son habitacle. C'est une robe en tissu léger, rouge sang. Le haut bustier est élégamment croisé et mis en valeur par de minuscules diamants formant une ceinture juste sous la poitrine, tandis que le bas tombe simplement jusqu'aux chevilles avec la même légèreté qu'une fleur. Cette robe paraîtrait superbe, mais banale sans sa petite touche personnelle. Un voile part de la ceinture de diamants et se dégage des deux côtés de la robe, venant tomber telle une cascade sur le premier tissu. Ce côté sophistiqué rend la robe tout simplement sublime. En somme, ce n'est pas du tout le genre de vêtement que je porte, même pour la plus prestigieuse des soirées.

En voyant la beauté pure face à moi, au bout de mes doigts, je comprends explicitement le sens de ce présent. C'est une invitation au bal, et je vais devoir troquer mon cuir noir contre de la mousseline flamboyante.

Je sors de ma contemplation quand j'entends la sonnette de la porte d'entrée résonner. Je me lance d'abord une question muette, ne sachant pas qui cela peut être, puis je me rappelle le message de Zoé, qui ne répond pas vraiment à ma question. La seule façon de savoir qui se cache derrière la porte est de l'ouvrir, et après avoir vu cette première surprise, je ne peux que me précipiter vers la porte. Quand je l'ouvre, une femme apparaît sur le paillasson, pousse un «Ahh» de soulagement, et entre sans permission dans le salon.

- J'ai bien cru que vous n'ouvririez jamais !

Je referme la porte doucement, essayant de comprendre ce qui se passe autour de moi. Je crois que c'est la première fois que je me retrouve aussi paralysée par des évènements. Je reprends vite mes esprits et demande à la femme :

- Je peux savoir qui vous êtes ? On m'a prévenu de votre arrivée mais...

- Laëticia Spring, me coupe-t-elle en regardant les lieux qui l'entourent. On m'a engagé pour m'occuper de vous, et nous n'avons pas beaucoup de temps alors...

Affaire d'ÉtatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant