19. Boisson non alcoolisée

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Thomas et moi sommes tous les deux assis contre le mur du couloir, tandis que le gardien nous fait face, les pieds ancrés sur le sol. Cela doit faire cinq bonnes minutes qu'ils nous a demandé de nous asseoir et de ne plus bouger. Et c'est ce que nous avons fait. Il est bien plus armé que nous et même si nous sommes deux, lui non plus n'est pas tout seul et pourrait demander du renfort à tout instant.

Cet homme ne me plaît pas. Il est de taille assez moyenne, a une forte corpulence et sa chemise rentrée dans son pantalon n'aide pas à cacher son ventre apparent, et le crâne à demi chauve à cause de la vieillesse. Mais ce n'est aucun de ces éléments-là qui me dérangent. Ce que je n'arrive pas à voir c'est son regard fier. Fier d'avoir attrapé deux jeunes après avoir passé son temps à roder dans le lycée durant la nuit. Il est tellement content de lui qu'il n'a même pas prit la peine de regarder ce que nous avons dans nos sacs, bien heureusement pour nous. Thomas n'a pas bougé non plus, les coudes sur les genoux et la tête regardant vers le sol. Je ne sais pas ce que nous attendons. Je n'ai pas vu le gardien appeler qui que ce soit ce qui m'étonne un peu, et je ne vois personne d'autre arriver des couloirs aux alentours. Le seul mouvement perpétuel est celui de cette homme au ventre bedonnant faisant des allers et venues devant nous. Puis, il s'arrête, et se place droit face à nous.

- Alors, les jeunes ! Qu'est-ce que vous êtes venus faire au lycée à une heure pareille ? nous questionne-t-il sans cacher son sourire narquois.

- On est venu vous donner de la compagnie, répondis-je avec un sourire également, faussement innocent.

Thomas relève la tête, ne s'attendant sûrement pas à se que je réponde. Il doit certainement avoir l'habitude de ne rien dire pour ne rien révéler. C'est comme cela qu'il forme leurs agents dans les agences comme la PPAE.

- Mais où est votre collègue ? Vous n'êtes pas deux normalement ?

- Il n'a pas pu travailler cette nuit. Mais vous êtes l'exemple parfait pour prouver que je peux très bien travailler seul.

Je souffle pour montrer mon mécontentement, volontairement, et m'adosse contre le mur. Première hypothèse confirmée, l'autre gardien n'est pas ici. Ce sera plus facile de le faire parler que ce que je pensais. Les adultes se croient vraiment trop supérieurs aux adolescents, mais ils oublient que ça peut leur faire défaut.

Après un temps, cette attente m'insupporte alors je lâche :

- Vous comptez nous faire attendre jusqu'à l'aube ou vous allez finir par nous relâcher parce que je ne patienterai pas une minute de plus !

- Je comptais bien profiter de ce moment où j'attraperai de jeunes délinquants comme vous. Et maintenant que j'ai assez profité, je vais pouvoir appeler la police pour qu'elle vous envoie au trou.

Thomas tourne vivement sa tête vers moi, me regardant avec fureur. Je crois qu'il me déteste réellement maintenant. D'accord, j'ai fait une gaffe, on aurait pu gratter un peu plus de temps, mais je gère la situation. Le gardien lance un appel avec son talkie-walkie. Le seul petit problème, c'est que la police n'est vraiment pas loin du lycée, le seul avantage, c'est que celle-ci n'est pas vraiment efficace. Donc nous n'avons pas beaucoup de temps, mais plus que ce qu'on aurait eu avec d'autres agents de police. Sous les yeux de l'homme qui nous fixe depuis déjà un moment, je tente de passer discrètement à Thomas une gourde prise dans mon sac, pour lui faire comprendre qu'il doit boire le contenu. Comme je m'y attendais, l'homme qui nous observe s'approche et m'arrache la boisson des mains. Il l'examine, toujours avec son sourire narquois.

- Merci bien. Je mourrais de soif.

Il ouvre la gourde et alors que je mets une main en avant pour arrêter son geste, il porte le goulot à sa bouche et avale plusieurs grandes gorgées.

Affaire d'ÉtatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant