29- souvenirs

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« Allez Penny, plus que quelques mètres !

- Laissez-moi mourir ici, je n'y arriverai pas !

- Ce n'est qu'une petite colline ! les autres nous attendent.

- Léo, Penny, dépêchez-vous ! Hall a déjà entamé la quiche lorraine ! »

Le soleil diffusait ce jour-là une lumière vive et apaisante. Le printemps se laissait déjà apercevoir, de part les oiseaux chantant et les arbres bourgeonnant. Dans la campagne, cinq amis avaient profité du beau temps pour aller pique-niquer dans une prairie.

« Vous voilà enfin !

- Excuse-nous, la pente était rude ! »

Léo et une jeune fille rousse venaient de rejoindre le groupe déjà installé. Ils s'assirent sur un des coins de la grande nappe rouge où étaient entreposées maintes et maintes nourritures.

« Dis Jack, tu pourrais me donner le jambon ?

- D'accord Audrey, mais tu demandes le fromage à Hall. »

Cette journée s'annonçait réussie. Après une dizaine de jeux, devinettes et concours de phrases amusantes, le repas presque terminé, les cinq amis riaient, parlaient, chantaient. Tout semblait bien se passer. Puis soudain vint la pluie.

« Qui a reçu sa lettre d'université ? A l'heure qu'il est, tout le monde devrait l'avoir reçu.

- Oui !

- Moi aussi !

- Bien ! Où êtes-vous reçus ?

- A la ville ?

- Moi aussi !

- Super, on pourra se voir ! »

Léo voyait toutes les réponses tomber les unes après les autres. Tous ses amis étaient reçus dans la même école !

« Et toi Léo ? Où vas-tu ?

- Je ne l'ai pas encore reçu...

- Tu mens très mal ! Allez, où vas-tu ?

- Ne sois pas timide ! Nous sommes tes amis après tout ! »

Léo était déchiré. Ce qu'il allait annoncer n'était pas facile. Il respira, souffla et se décida à parler.

« Je vais de l'autre coté de l'océan, dans une école de littérature. »

Tous ses amis le regardèrent de travers. Un long silence s'installa. Même les oiseaux semblèrent ne plus gazouiller. Penny, qui arborait le même visage que Hall, Jack et Audrey, fut la première à parler.

« Si loin ? Mais tu ne devais pas entrer dans la même école que nous tous ?

- C'est mon second choix ... Je sais que c'est un peu loin, mais on pourra quand même se parler ! Je reviendrai souvent, vous savez ? Vous savez que c'est mon rêve !

- On sait tous que tu aimes écrire, et nous aimons tous ce que tu fais, mais penses au futur ! Si tu ne réussis pas, que va-t-il se passer ? Je pense qu'il serait mieux que tu les appelle pour leur dire que tu rentre dans la même université que nous...

- Pourquoi cette réaction ?

- C'est que, bafouilla Hall. Nous pensions que nous passions avant tout, nous tes amis, même avant tes rêves... »

Léo était sidéré. Comment ses propres amis pouvaient tenir un pareil discours ? Cela relevait de l'irréel !

« La... la meilleure école est là-bas ! Je pars si loin pour justement réussir ! Vous ne pouvez pas tout simplement comprendre que je veux vivre de ma passion ? Je ne pars que dans trois mois ; vous ne voudriez pas plutôt passer le temps qu'il me reste dans la joie avec vous plutôt que dans la tristesse et la rancœur ?

Ses amis semblaient hésiter. Devant les visages réticents de ses anciens amis, Léo voulut pleurer ; mais il se garda de leur donner cette peine. Il ravala sa colère et se contenta de leur crier dessus « Si vous ne comprenez pas, c'est que vous êtes trop égoïstes ! Vous vous dites être mes amis alors que normalement, vous ne voudriez que qu'il y a de mieux pour moi, quitte à vous quitter ! C'est cela la définition d'un ami ! Vous me dégoutez ! ». Il s'enfuit en courant, les larmes aux yeux, devant ses amis qui avaient compris qu'ils l'avaient perdu.

Les trois mois suivants se passèrent alors dans la tristesse et la solitude la plus profonde. Pas un seul appel d'excuse, aucun semblant de vie de ses amis. A part sa famille, le reste du monde l'avaient abandonné.

Léo se réveilla en sursaut. Il regarda en sueur Adana et Rydon, lui tournant le dos et sans doute endormis. Ce souvenir était à la fois doux et frustrant. Alors, se parlant plus à lui-même qu'à ses amis, il chuchota :

« S'il vous plait, faites que la tristesse et la colère que j'ai ressenti par le passé ne viennent plus me troubler. J'ai la chance d'avoir à mes cotés les plus merveilleux des amis Je ne veux pas être abandonné une seconde fois. »

Sur ce, il se recoucha, enfin libéré de ce souvenir infernal. Il put dormir paisiblement et profondément. Ce qu'il ne savait pas, c'est que Rydon ne dormait pas.

Le conte des hérosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant