Avec mes parents, il y a deux sujets de dispute : le travail scolaire et l'indépendance.
Le travail scolaire, ça, c'est depuis mon entrée au collège. Mes parents s'intéressent à mes notes, à mon attitude en classe, à mes devoirs, enfin bref, ils remplissent à merveille leur rôle de parents inquiets pour l'avenir de leur fille.
Un niveau trop faible ? Privée de portable jusqu'à ce que je reprenne les choses en main.
C'est comme ça que ça fonctionne chez les Potin.
Peut-être que plus tard, j'en serai fière, et je me dirais que tout ça a bien servi, mais en attendant, je préférerais avoir des parents qui se fichent éperdument de mes notes.
Et avec le temps est arrivée l'indépendance.
J'ai commencé à vouloir m'inscrire sur réseaux sociaux, sortir avec des amis, passer le code de la route, en somme, à vouloir me gérer toute seule.
Mais je suis la première née.
Je suis le bébé grandi trop vite.
Et même si je clame haut et fort ma presque majorité, ça ne m'empêche pas de devoir encore négocier pendant des jours et des jours pour pouvoir planifier une sortie.
En l'occurrence, celle du fast-food.
Il faut s'y prendre à l'avance.
Argument, contre argument.
C'est comme ça que ça fonctionne chez les Potin.
Argument : Lou, Mathis et Corentin y vont, leurs parents ont déjà accepté.
Contre argument : Les parents de Mathis sont trop laxistes, la mère de Lou n'est jamais là et Corentin travaille bien, il a le droit de se reposer.
Argument : On va juste au fast-food, on ne sort même pas de la ville, c'est simplement pour se faire plaisir.
Contre argument : Tu seras autorisée à te faire plaisir quand tu auras plus cinq de moyenne en sciences physiques.
Argument : Il y aura aussi le groupe théâtre. On va répéter.
Contre argument : Tu peux répéter ici. Tes frères et sœurs te donneront la réplique.
Argument : J'ai vraiment besoin de faire un break, les cours sont difficiles en ce moment.
Contre argument : Bonne raison pour rester réviser ici. Et tu ressors de vacances.
Ainsi de suite...
Le problème, c'est qu'après des jours de débat intensif, mes nerfs commencent à lâcher.
Les premières notes de Sapés comme jamais suffisent à me donner des envies de meurtre et mon stock de « bonnes raisons » s'amenuise.
Jusqu'à vendredi soir.
Ou j'ai enfin le droit d'aller au fast-food.
J'en aurais pleuré.
Et puis, samedi. Après diverses recommandations de ma mère – « reviens à l'heure prévue », « ne traîne pas n'importe où », « n'écoute pas toujours ce que dit Mathis, il a des idées un peu bizarres, ce garçon – et diverses suggestions, telles que « Alors, qui est ton petit copain ? Alexander, Toby, Loïc ou Florent ? », je me mets en route pour le fast-food.
Je ne sais pas pourquoi, je me sens anxieuse.
Peut-être parce qu'il y a Florian. Et s'il racontait à Corentin, pour la liste ? Non, impossible. Florian ne ferait jamais ça. Je crois. Je ne peux pas en être sûre. Il faut que j'arrête de réfléchir.
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La Théorie de l'Ennui (REPUBLICATION)
Teen FictionSe faire rejeter juste avant un cours sur les économies monde est assez loin de ma définition du bonheur. Voire très loin. Je n'aurais donc jamais pu imaginer que ça me permette d'imaginer la théorie la plus brève, la plus évidente, et la plus far...