J'ai reculé et j'ai refermé la porte.
Bien sûr, il y avait tout un tas d'autres réactions possibles. J'aurais pu demander des explications. Les féliciter. Prendre la défense de Corentin. Ou pas.
Sauf que non.
Moi, en bonne conne, j'ai reculé et j'ai refermé la porte.
Et maintenant, je suis là, plantée devant la cuisine, à me dire que j'ai oublié le verre d'eau mais que ce n'est peut-être pas si grave en comparaison de ce que je viens d'apprendre.
Elena et Ava.
Je n'y aurais jamais cru.
Il faut croire que côté cœur, je suis à côté de la plaque.
D'abord Thibaut et Lucas, et puis Mathis qui tient vraiment à Estelle, et maintenant, Elena et Ava...
Essayant d'oublier ce que j'ai vu, je déambule dans le couloir et débouche sur la salle principale. Bon. Trouvons quelqu'un pour me changer les idées. Il faut que je me vide la tête. Entièrement.
Mathis discute avec Estelle, Lou avec Alexandre – chose qui devrait m'étonner mais qui, après ce que je viens de voir, ne me surprend pas le moins du monde – Thibaut avec Megan, Lucas avec le radiateur, et les autres, je ne les connais pas. Ou alors pas suffisamment pour m'incruster dans leur conversation sans être gênée.
Je prends donc la décision d'aller dehors. J'ai trop chaud, de toute façon. J'ai souvent trop chaud, et là, c'est encore pire. J'aime beaucoup les soirées, c'est amusant et c'est riche en événements, mais parfois, les événements sont nombreux, et ça monte à la tête, et les gens sont nombreux aussi, et... bref. Je prends la décision d'aller dehors. Voilà.
Bien sûr, dehors, il fait trop froid. Nous sommes mi-mars et je n'ai sur moi que mon hideuse robe à bretelles.
J'ai trop chaud et j'ai trop froid en même temps, c'est très étrange.
Peut-être que si je marche ça ira mieux ?
J'ai des idées bizarres, aujourd'hui. Est-ce que c'est parce que j'ai bu une gorgée du concentré de mandarine périmé de Megan ? Non. Pas possible. On ne peut pas être embrouillé avec ça. On est embrouillé avec de l'alcool. Et si Ava et Elena s'étaient embrassées à cause de l'alcool ?
Ça se pourrait. Quoique. Elles paraissaient assez lucides. Ou alors je me suis trompée, après tout, je ne les ai surprises que quelques secondes et je suis partie sans leur demander aucune explication, donc... Oh, j'aurais dû demander une explication. C'est vrai, quoi. Pourquoi est-ce que je n'ai pas demandé une explication ?
Je continue de marcher jusqu'à avoir fait le tour de la maison de Thibaut, et m'être retrouvée en face de l'entrée. Je pensais m'asseoir contre le mur et attendre de savoir quoi faire si, assis contre le mur, il n'y avait pas déjà quelqu'un.
Corentin.
Oh non.
Je me fige, réfléchissant à toute vitesse. Bon. Il ne s'est pas rendu compte de ma présence. Je n'ai qu'à revenir sur mes pas, et...
« Suzorine ? »
Merde.
« Corentin ?, je m'exclame, dans un élan de bêtise.
— Qu'est-ce que tu fais là ?
— Euh, j'avais un peu chaud. Je prends l'air. »
Je m'évente avec la paume de la main, tout en lui adressant un formidable sourire stupide. Bon sang, pourquoi est-ce que je ne suis pas capable de lui dire « On se fait la gueule, je te rappelle ! » ? Pourquoi est-ce que je reste là comme une abrutie ?
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La Théorie de l'Ennui (REPUBLICATION)
Teen FictionSe faire rejeter juste avant un cours sur les économies monde est assez loin de ma définition du bonheur. Voire très loin. Je n'aurais donc jamais pu imaginer que ça me permette d'imaginer la théorie la plus brève, la plus évidente, et la plus far...