28. Cauchemar

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Eléa

— Eléa, chérie, bois un peu de café tu sembles épuisée

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— Eléa, chérie, bois un peu de café tu sembles épuisée.

Le regard inquiet de Franny, assise en face de moi, me supplie de trouver un peu de réconfort dans son breuvage . Celle-ci tourne la tête vers son mari, afin qu'il lui vienne en aide. Mais Monsieur Luquet ne me quitte pas des yeux, une expression grave figée sur son visage.

Je n'ose affronter son regard. Perdue au milieu de cette petite cuisine je retiens, contre ma volonté, toute l'attention. Alors timidement j'enlace de mes doigts la vieille tasse qui me réchauffe lentement les mains. Ce geste me réconforte, j'ai tellement besoin d'un peu de chaleur.

— Est ce que tu as des problèmes ? Tu sais que tu peux tout nous dire.

Georges a lancé ces quelques mots avec tellement de calme et de sagesse que cela me décontenance . Je dois vraiment avoir une mauvaise mine pour les inquiéter autant.

— Est ce que c'est le jeune homme que tu as rencontré qui te cause du tort ?

— Si c'est ça laisse-moi m'en occuper ! J'ai encore une bonne droite.

Georges fait mine de lancer des coups-de-poing dans le vide comme s'il était un champion de boxe. J'apprécie qu'il essaie de dédramatiser la situation et le remercie par un maigre sourire. Franny secoue la tête amusée, échangeant avec son amour, un regard complice. Je ne les ai jamais vus aussi heureux qu'aujourd'hui. Depuis cette fameuse soirée et leur déclaration d'amour, tous les deux se sont retrouvés d'une certaine manière. Leur bienveillance à mon égard me force à obtempérer , je leur dois au moins ça . Nous veillons les uns sur les autres depuis des années. Ce serait égoïste de ne pas leur parler de ce qui me ronge.   

— Non , c'est Pierre ... Pierre a des problèmes.

L'avouer à voix haute est douloureux et cela rend les choses réelles alors que j'espérais que les jours qui viennent de passer n'étaient qu'un cauchemar. Georges et Franny connaissent l'existence de Pierre. Je leur en ai si souvent parlé , tout comme je leur parle de Luna ou de mes parents. Il tient une place si importante dans ma vie que c'est tout naturellement que je leur ai raconté nos quatre cent coups. Comme la fois où j'ai voulu m'essayer à l'encre de chine . 

Je n'arrivais pas à ouvrir le pot alors Pierre a voulu m'aider. Afin de me prouver sa virilité il a forcé sur le couvercle si vigoureusement que le petit récipient a éclaté. En se déversant sur le sol de la cuisine, sur nos mains et sur son visage. Je l'ai regardé un instant, abasourdie,ne sachant quelle réaction il allait avoir quand il se rendrait compte qu'il avait de l'encre jusque dans les oreilles. Mais Pierre s'est mis à rire. Un rire franc et innocent qui a entrainé le mien. S'en est suivie une longue bataille à l'encre de Chine, il y en avait partout, du sol au plafond. Luna était furieuse que nous ayons saccagé sa cuisine. Je la revois encore nous courir après avec le balai en nous traitant d'idiots.  Il nous a fallu une dizaine de jours pour faire disparaitre les dégâts.  Aujourd'hui il n'en reste aucune trace, mais le sourire de mon ami lui, je ne l'oublierai jamais.  Cette époque me semble si lointaine à présent. 

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