chapitre 11

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Le lendemain, à l'aube, j'apporte la lettre à Marie, puis à Nicolas. Mais en déposant la lettre dans la boîte aux lettres de Nicolas, la porte s'ouvre et sa mère apparait sur le seuil.

- Anika ? Que fais-tu là de si bonne heure ?

- Je suis venue déposer une lettre à Nicolas. Je... Je dois partir...

- Entre donc une minute, il vient de se lever !

- Je suis pressée...

- Aller, entre donc. J'ai du lait, j'en offrirais à ta petite sœur.

Je pose Johanna à terre pour qu'elle puisse marcher, lui prend la main, et me dirige à contrecœur vers la maison de mon petit ami.

Quand j'entre dans la cuisine, Nicolas est en train de boire une tasse thé.

- Anika ?Que fais tu ici ?

- Elle a voulu mettre une lettre dans la boîte aux lettres, explique sa mère. Je vous laisse.

- Une lettre de quoi ? demande t'il une fois sa mère partie dans la pièce d'à côté.

- C'est compliqué. Peut on monter une minute ?Johanna, reste là et sois sage. La mère de Nicolas est juste à côté, va la voir.

Je l'a guide vers le salon, vérifie que la mère de Nicolas n'est pas occupée et quand elle me fait un signe l'air de dire "c'est bon je la surveille", je monte avec Nicolas.

- Tu sais que je t'aime, je dis.

- Je sais.

- Et toi, tu m'aimes ? Je sais que j'ai été dur hier matin, mais je voulais vraiment profiter de ma famille. J'espère que tu comprends. Et je voulais venir te voir, tout les jours.

- Oui je t'aime. Mais j'ai l'impression qu'on s'éloigne.

- Je me dis pas ça je t'en pris !Je t'aime et je ne veux pas te quitter...

Je ne révèle rien mais en réalité, je voulais être sûre qu'il m'aime avant de partir. Pour être... Sereine.

- Je t'aime et je veux pas te quitter non plus Anika ! Je veux juste que tu sois un peu plus avec moi.

Je cours dans ses bras en murmurant «je suis là, je serais toujours là. Je t'aime».
Je lève la tête et l'embrasse.

- En revoir mon amour, je dis. Nous serons bientôt réuni.

Sans qu'il puisse comprendre, je pars en courant.

- Johanna, on s'en va. En revoir madame, merci pour tout.

Je prends Johanna dans mes bras et part rapidement. Ils vont me manquer...

Je jette un dernier regard à la maison : elle est très haute et très étroite. Mais dès qu'on y rentre, on s'y sent comme chez sois. J'aperçois Nicolas a sa fenêtre. Je lui fais un dernier signe de la main et pars.

Pendant une heure au moins, je traverse la forêt, en guettant l'arrivée de la gestapo. Heureusement, on ne croise personne.

Je commence à avoir mal au bras à force de porter Johanna, et elle a mal aux jambes quand elle marche plus de 5 minutes.

- Je pense que dans 10 minutes, on quittera la forêt. Et dans la ville on ne pourra pas faire de pose au risque de croiser la gestapo. Arrêtons nous un peu.

En face de nous se trouve un ruisseau. On s'en approche et buvons de grandes gorgées.

Je m'assieds quelques minutes et regarde tout autour de nous : les arbres immenses cachent presque entièrement le ciel. On aperçoit un petit bout de ciel bleu et quelques nuages blancs. Le ruisseau est très claire, et très fin. Je pourrais facilement l'enjamber. On entend des oiseaux gazouiller assez bruyamment. Au bout d'une dizaine de minutes, je me lève.

- Aller Johanna, en route !

Elle ne proteste pas et décide même de marcher.

Environ 15 minutes plus tard, nous sommes enfin sortie de la forêt. Nous marchons alors dans un petit village que je ne connais pas. Sur le papier est écrit "traverse la forêt. Le village. Prends les petites routes. Tu trouveras une maison abandonnée dans 3 heures au maximum. "
Maison abandonnée... J'espère que nous n'avons pas fait trois heures de marche pour arriver dans une maison vide.

Comme il se doit, on emprunte plusieurs petits sentiers, sans croiser de nazis. Je croise quelques passants qui nous dévisagent, sans doute parce que voir deux jeunes filles qui se baladent sans adultes, avec l'étoile de David qui plus est, c'est un peu louche.

Au bout de 2 ou 3 heures, on arrive enfin à cette fameuse maison. Elle se trouve dans un endroit abandonnée, dans une forêt.Elle est cachée derrière de grands arbres. Elle n'est pas très haute mais semble très large, et très vieille.

- Y à t'il quelqu'un ici ?

Personne ne répond. Je m'approche dangereusement de la porte d'entrée. Je toque.
Personne.
Je décide d'entrer, Johanna sur mes talons.

- Hé ho ?

J'entends le parquet grincer et sursaute.

- Des nouveaux enfants ! Chouette !

- Qui est là ?

Une lumière s'allume et j'aperçois plusieurs enfants.

- Qui êtes vous ?

J'en compte quatre.

- Moi, c'est Hanna, j'ai quatorze ans. Je suis l'aînée. Je m'occupe d'eux depuis quatres mois maintenant. Elle c'est Pauline, elle a quatre ans. Lui c'est Jake, il a presque neuve ans. Et enfin, voici Lucie, elle a sept ans. On est frères est sœurs. Hans nous a amenés ici quand nos parents ont été déportés.

- Hans  ?

- Oui. Le soldat qui nous a emmenés ici s'appelle Hans.

- Je crois que c'est le même qui m'a amenée. Enfin, il m'a donné des indications. Moi, c'est Anika, et je viens d'avoir quinze ans. Voici Johanna, ma petite sœur. Elle a un an. Ma mère est morte en lui donnant naissance. Mon père a été emmené hier. Que manger vous ? Il n'y a pas d'adultes ici ?

- Non, dit Hanna. On va boire dans un lac pas loin. Des fois, Hans vient nous voir et nous apporte de la nourriture et de l'argent. Mais on ne l'a pas vu depuis une ou deux semaines.

Je réfléchis ; j'ai pris des bijoux avec moi, et de l'argent.

- Tu peux t'occuper de Johanna ?J'en ai pour une minute.

Elle acquiesce, et je pars en courant.
Heureusement, mes parents n'ont pas vendu tous les bijoux que l'on possédait, même si nous avions peu d'argent. J'espère juste pouvoir en tirer quelque chose...

J'achète une baguette de pain, et deux grappes de raisin qui sont en promotion. Je donne un collier en argent, que le vendeur accepte. Il m'offre même un paquet de bonbons au miel.

- Je sais que les temps sont dur petite. Tu m'as l'air bien maigre, dit il en me tendant le paquet. Tient, cadeau de la maison. Le collier vaut plus que du pain et des raisins.

Je le remercie et part.

- Je suis de retour !

Tout les enfants me sourient quand ils voient le pain, le raisin et les bonbons. Je distribue à chacun un bout de pain, un bonbon et trois grain de raisin.

- On garde le reste pour demain, si jamais Hans ne revient pas.

Les enfants mangent doucement, le sourire aux lèvres.

-Ou dormez vous ?Je demande après le repas.

- Il y a plein de lit, vient, me dit Pauline en me prenant par la main.

Dans une autre pièce se trouve trois lits superposés. Il y a donc six places.

- Il en reste un pour pour vous !

- Merci. Je pense que je dormirais avec Johanna au début, elle est encore petite.

Cette dernière secoue la tête et se met à pleurer. Elle se blottit contre moi.

J'observe la pièce : les matelas ne sont autre que de la paille, il n'y a qu'une fine couvertures par personne, la tapisserie verte kaki se décolle des murs et la pièce pue le renfermer.
Mais je vais tout prendre en main. J'ai le sentiment que tout va s'arranger...

Je m'appelle Anika [Fini]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant