Chapitre 2

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11 septembre 2017

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11 septembre 2017

          Encore une fois ce matin, le bus est presque vide quand il arrive à l'abri bus. Comme depuis cette dernière semaine, mon père nous a brillamment évitées, ma mère et moi, hier soir et ce matin. Enfin, c'est l'impression que j'ai, lui, les rares fois où on a vraiment parlé, il dit qu'il a trop de boulot, qu'il est débordé. Je n'aime pas ça, cette situation. Ne plus se voir. Mon père manque.

          J'étais proche de lui, avant. Le samedi, Sarah Lecocq allait au court de tennis avec sa mère, Jeanne Lecocq, et Juliette Lecocq allait à la piscine avec son père, Pierrick Lecocq. C'était comme ça, et tout le monde le savait. Mais tout a changé. Il n'y a pas de retour en arrière possible. Il n'y a jamais de retour en arrière. Même une machine à remonter le temps n'y changerait rien.

- Encore au pays des rêves, princesse ?

          Comme d'habitude, c'est Dorian qui me ramène sur terre.

- Toujours, je lui réponds en souriant, alors qu'il prend place près de moi.

           Je l'ai remarqué depuis quelques jours déjà, ces expressions, "princesse", "ma belle" et puis ces regards. Il me drague. Je ne lui ai rien dit au sujet de Thomas. Il n'a pas abordé le sujet. Ou peut être que c'est moi qui l'ai évité.

         Thomas. Qu'est-ce qu'il me manque. Tout de lui me manque. Son regard. Sa main posée sur mon épaule. Son odeur quand il me serait dans ses bras. Ses lèvres sur les miennes.

         Sa présence.

         Ça fait tellement longtemps que je ne l'ai pas vu que je commence à oublier son visage. Son sourire, ses fossettes, ses yeux, si beaux. Les seuls yeux au monde où je pouvais me perdre pendant des heures.

          Sa voix part, aussi. Seul le téléphone me la rappelle. Mal. Déformée.

- Eh oh !

          Une passe devant mes yeux.

- Tu repars là !

- Désolée.

- T'inquiètes pas.

          Il se tait. Je ne dis rien, je n'ai rien à dire de toute façon. Après quelques secondes, sa main entre dans mon champ de vision. Tout doucement, timidement, elle vient se poser sur ma cuisse.

- À quoi tu penses ?

- À...

          Un court instant, j'hésite à lui dire. Peut-être que se serait mieux finalement. Est-ce que ça changerais quelque chose à notre relation ? La question tourne dans ma tête. La balance penche un coup sur le "oui", un coup sur le "non", indécise. Puis elle se stabilise sur le "oui", bien sûr que ça y changerait quelque chose.

        Finalement, je réponds.

- Rien, c'est pas important.

          Il pose sa tête contre le siège et soupire, l'air soulagé.

- Tu sais que tu peux tout me dire hein ?

           Je hoche la tête en souriant, mais ce n'est qu'une apparence, je ne peux pas tout lui dire. Certaines choses peut-être, mais pas tout.

           Il se tait. Le reste du trajet se passe dans le silence. Quand le bus arrive au lycée, je descends et rejoins le petit coin de cour que j'ai adopté.

          Du haut des marches, je cherche la tignasse brune d'Alex. Mon regard scanne la marée d'élèves qui se dirigent vers les grandes portes. Puis il se fixe. J'entends vaguement Alex qui arrive à mes côtés. Il me secoue le bras, passe une main devant mes yeux, mais cette fois rien ne peut les détacher des yeux caramels qui me fixent de l'autre côté de la cour.

          Ça doit faire trois jours.

          D'abord des regards.

          Des sourires ensuite.

         Oui, trois jours que ce petit jeu dure. Trois jours que mes yeux trouvent les siens, que ses yeux trouvent les miens.

         Trois jours que je me perds dans ses yeux.

          Au détour d'un couloir, au milieu de la cour, d'un bout à l'autre d'une salle de classe, dans le bus. Partout.

          Partout, nos regards se télescopent, puis nos lèvres s'étirent en sourires timides. Tellement timides qu'ils sont sûrement imperceptibles pour les gens qui ne nous connaissent pas.

- C'est vrai qu'elle est canon, mais tu vois, j'crois que les filles, c'est pas vraiment son truc.

          Mais pas Alex. Lui, il le voit ce sourire.

          Sa voix grave m'arrache à la contemplation des yeux de Charlotte.

         Je secoue la tête.

- Arrête avec tes conneries.

- Quelles conneries ? On dirait que vous allez vous sauter dessus dans trente secondes, pour vous arracher vos vêtements !

          Il insiste !

          Je lève les yeux au ciel en soufflant bruyamment.

- Tu veux que je te dise quoi, au juste ?

          Un sourire taquin flotte sur ses lèvres.

- Moi ? J'veux rien. Toi par contre...

          Il laisse sa phrase en suspens, me laissant réfléchir. Qu'est-ce qu'il pense que je veuille ?

          Charlotte ? Cette fille ne m'attire pas.

           Dorian ? Si je le voulais, je l'aurais déjà eu. Pas que j'aie tous les garçons à mes pieds, ça non, mais que lui, il me veut, ça crève les yeux.

          Mais, de toute façon, j'ai un copain. Certes, il est à l'autre bout de la France, mais un copain quand même.

          Après quelques instants de réflexion, j'affirme :

- Rien ! Je veux rien !

          Contrairement à ce que je m'attendais, son sourire ne disparaît pas, bien au contraire. Il s'agrandit tandis que ses yeux expriment un étonnement feint.

- Ah bon ? J'ai dû me tromper alors.

          Il détourne le regard, mais son sourire ne disparaît toujours pas.

          Je reste là un petit moment, le fixant.

          Puis, cédant à la curiosité, je lui demande en soupirant :

- Qu'est-ce que t'as ?

          Son visage se tourne vers moi, cette fois, son sourire à disparu, et il a retrouvé l'air sérieux qu'il affiche la plupart du temps.

- Est-ce que t'aimes les filles, Juliette ?

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modifié le 09.04.2018 suite à la réécriture du chapitre 1

correction, modification de la mise en page le 16.08.2018

Avant que le Soleil ne se CoucheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant