Chapitre 20

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8 janvier 2018

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8 janvier 2018

- Bonjour ! Avant d'aborder le cours d'aujourd'hui, j'aimerais vous souhaiter une bonne année à tous ! Que l'année 2018 soit pleine de joie et d'instants de bonheur ! 

          Un soupir sort de ma bouche malgré moi. Les souhaits de bonne année, plus formulés par politesse que par réel intérêt, commencent vraiment à m'exaspérer. Depuis huit heures ce matin, tout le monde n'a que ces deux mots à la bouche, souvent accompagnés par les mots "santé", et "BAC". Comme par hasard. Ils ne sont là que pour ça. Je laisse mon regard partir vers la fenêtre, mon esprit le suivant. Depuis la soirée du nouvel an, le temps n'est pas au rendez-vous. Comme s'il n'aimait pas l'année 2018. Comme s'il pressentait quelque chose. 

          Je chasse ces pensées noires de ma tête, les remplaçant par des pensées caramel, bien plus agréables. Plus tentants. Fascinants. Je repense au matin du premier janvier, au soleil qui se couche pendant que nous nous endormons. J'étais bien, si bien. 

         Quand au bout de deux heures la sonnerie retentit enfin, je me lève, mes jambes engourdies par le temps passé assise. Alex m'attend à la sortie de la salle et nous nous dirigeons ensemble vers le coin de cour que nous avons pris l'habitude d'investir. Les escaliers ne font rien pour arranger l'état de mes jambes pas encore bien réveillées, et c'est un gros soupir de soulagement que je me laisse tomber sur un banc à côté de Charlotte. Elle me jette un regard mi-curieux, mi-indifférent avant de reprendre sa conversation avec un garçon que je ne connais pas. Son bras passe derrière mon dos et je me laisse aller contre elle. 

          Si notre proximité n'étonne plus personne dans notre groupe d'amis proches, ce n'est pas la même histoire pour le reste du lycée. Le type avec qui elle continue de parler nous jette un regard dans lequel je jurerais voir passer de la haine, ou du dégoût. Il ne dit rien, mais je sens son regard qui persiste sur nous, alors que je réfugie le mien sur Snapchat. Un malaise s'installe et je perçois leurs réponses à l'un et l'autre devenir de plus en plus courtes. 

          Finalement, alors qu'il ne nous a pas quittées du regard depuis cinq bonnes minutes, il pose la question. 

- Vous êtes ensemble ? Je savais pas. 

Charlotte lui sourit d'un sourire sans joie et enlève son bras de derrière mon dos, le ramenant sur ses genoux. Aussitôt, sa présence me manque. Elle se décale un petit peu avent de prononcer d'une voix nouée :

- Non. Non, absolument pas. 

            Ma gorge se serre, et je sens des larmes commencer à me monter aux yeux. Non, nous ne sommes absolument pas ensemble. C'est vrai. Mais pourquoi se détacher ainsi de moi ? Des tas d'hypothèses traversent ma tête et je mets à espérer que je me trompe. À espérer qu'elle n'ait pas honte de moi. De notre proximité. De nous. Que je ne me sois pas tout à fait trompée sur notre relation. Qu'elle m'aime autant que je l'aime. Ce n'est pas de l'amour bien sûr, c'est autre chose. Bien différent de ce que c'était avec Thomas. Une amitié comme je n'en ai jamais eu peut-être. Bien qu'Alex semble s'imposer en première place pour ce rôle là, peut-être que c'est ça. Quelque chose d'encore différent d'Alex, quelque chose qui ne ressemble à rien de tout ce que j'ai connu par le passé. 

           Mais j'ai beau essayer de me convaincre qu'elle a raison et qu'elle ne s'est pas éloignée de moi pour cette raison, je n'y arrive pas. Peut-être que c'est de la faute du mec, qui sourit et hoche la tête d'un air entendu, agrémenté d'un clin d'œil. Qui dépose un bisou sur la joue de Charlotte et s'en va en sifflotant. 

           Peut-être que c'est de ma faute, parce que la jalousie ne me quitte pas depuis qu'il s'est éloigné. Parce que son clin d'œil, son sourire, son baiser  voulaient tout dire. Parce qu'il a l'air d'être une copie de Dorian, qui a juste la peau un peu plus foncée. Et que je ne peux m'empêcher de me dire que contrairement à moi, Charlotte pourrait tomber dans ses filets. Et ça casserait tout. 

          Peut-être que c'est de sa faute, à Charlotte, et à tout ce temps qu'on a passé ensemble. À tous ces rapprochements du nouvel an. Les regards pleins de sous-entendus qu'elle échangeait sans cesse avec Ana. Et puis, bien sûr, le matin. Où nous semblions être en parfaite osmose. Où j'avais l'impression que jamais, au grand jamais, nous ne serions séparées. Où nous étions invincibles. Elle et moi contre le monde entier. 

           Ou peut-être que ce n'est la faute de personne. Parce que peut-être que finalement, c'est bien réel. Et ça, je ne saurais pas comment le supporter. 

           Le garçon est parti depuis quelques minutes quand la sonnerie annonce la reprise des cours. Charlotte n'a pas prononcé un mot, se réfugiant à son tour sur son téléphone dernier cri. Elle ne s'est pas rapprochée de moi, pas plus qu'elle ne m'a jeté un regard. Elle s'est juste contentée de sortir son mobile, et faire je-ne-sais quoi dessus. Et je ne peux m'empêcher de penser que ça ne fait que confirmer ce que je redoutais. Parce que sinon, elle m'aurait parlé. Elle serait même peut-être revenue se blottir contre moi. Ce qu'elle n'a pas fait. Et ça tourne dans ma tête. Ça ne s'arrête pas. 

           Elle se lève, attrape son sac, et toujours sans prononcer un mot, s'éloigne vers les portes du lycée. Et tandis que je la regarde partir, assise sans bouger sur le banc, je me dis que je l'ai peut-être perdue. 

           Alors, ça me frappe de plein fouet : j'ai peur de l'avoir perdue. 

publié le 09.09


Avant que le Soleil ne se CoucheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant