Chapitre 6

736 49 12
                                    

29 octobre 2017

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou télécharger une autre image.

29 octobre 2017

         J'entrouvre les yeux, l'impression qu'ils sont fermés depuis des années. Des larmes perlent au coin de mes paupières et mon corps est chaud, bien abrité par la grosse couette qui me recouvre et des habits inconfortables. Ma tête me fait atrocement mal. Instinctivement, je cherche le fin trait de lumière qui passe entre mes volets et le mur, mais ne le trouve pas. Je tends ma main devant moi comme pour effacer le noir qui recouvre la lumière, mais je me heurte à un mur. Je ne suis pas chez moi. 

         Et puis, je me souviens. La soirée, à laquelle Alex m'avait traîné, le manoir aux allures de film d'horreur, ce genre de maisons où tu t'attends à trouver des chandeliers, des vieux meubles, un escalier qui craque sous les pas, des portes grinçantes, et une maîtresse de maison gothique. Ça n'avait pas loupé. À peine la grande porte en bois ouverte, une jeune fille, ses longs cheveux blonds tressés, des larmes de sang coulant sur ses joues, portant une longue robe noire chargée de dentelle, un imposant collier ras-de-cou brodé et serti d'une pierre noire, et une ombrelle à la main nous avait accueillis. Charlotte. 

         Je ne m'étais tellement pas attendue à la trouver là que je suis restée plantée sur place, incapable de bouger tant j'étais étonnée. 

- Ju' ? Juuuu' ? Oh, réponds moi !

            C'était Alex qui m'avait ramenée les pieds sur Terre, Charlotte avait ri et était partie accueillir d'autres invités. 

- 'Faut que t'arrête ça, vraiment, avait-il déclaré en secouant la tête. 

- Je savais pas qu'elle serait là. 

-  C'est elle qui organise la fête, j'ai pas pensé que tu voudrais le savoir.

- Nan, t'a raison, c'est pas important.

        Il m'avait regardée en plissant les yeux, puis avait souri : 

- Où est le buffet ?

          J'avais rigolé et l'avais suivi, avais bu un premier verre, et c'est là que tout avait dérapé. À chaque fois que je tournai la tête, je voyais Thomas. Il était partout. Au départ, j'y croyais, mais à force de traverser le manoir à sa recherche, je m'étais rendue compte qu'il n'était pas là. La vérité m'avait rattrapée. Il n'était plus là.  Il ne serait plus jamais là. Alors je n'avais pensé qu'à une seule chose : oublier. Tout oublier. 

        Mes pieds m'avaient guidée vers le buffet, mes mains m'avaient servi à boire, jusqu'à ce qu'une voix arrête tout. 

- Woah, princesse, on se calme ! Quelle descente !

          Une main m'avait enlevé le verre des mains avant de le boire d'une traite, et deux yeux bleus étaient apparus devant les miens. 

- Ça va ?

          Dorian. J'avais été soulagée de le voir. J'avais détaillé son visage. Àce moment là, j'avais trouvé qu'il partageait quelques traits avec Thomas. Thomas était partout. 

         Épuisée, je passe mes mains sur mon visage, j'ai la gueule de bois comme je ne l'ai jamais eue. Ma tête pèse au moins une tonne, en plus de me faire atrocement mal. Ma salive est pâteuse, et mon ventre se tord à chaque mouvement. Mais où est Alex ? Je tends l'oreille. Des sons indistincts résonnent, des voix, des bruits de vaisselle, de l'eau qui coule. 

          Je suis probablement toujours chez Charlotte, quelqu'un a dû me porter jusqu'au lit, ou alors, je suis venue toute seule, mais juste trop bourrée pour pouvoir m'en souvenir maintenant. 

          Après m'avoir trouvée, Dorian m'avait emmenée jusqu'au salon, où Charlotte, sa meilleure amie - dont j'avais appris plus tard qu'elle s'appelait Adélaïde -, le petit ami d'Adélaïde, et d'autres membres de leur cercle d'amis étaient déjà. Ils m'avaient invité à les rejoindre, et, très vite, tous s'étaient mis en tête de jouer au jeu de la bouteille, d'une version améliorée que tous connaissaient pour y avoir déjà joué. La bouteille avait tourné, elle avait tellement tourné que je m'étais demandée comment elle pouvait ne pas vomir. Questions à propos de nos anciennes conquêtes, comme disait Adélaïde, jeux d'alcools, déshabillages, et baisers, tout y était passé, et tous avaient joué sans rechigner. 

           Et nous sommes restés là, assis par terre en cercle à faire tourner la bouteille, avec l'impression que ce moment ne finirait jamais. J'avais oublié Thomas, j'avais oublié Alex. Pour la première fois depuis des semaines, tout allait bien. 

          Et puis, pour une énième fois, le tour de Charlotte est venu. Comme elle l'avait déjà fait, elle a pioché dans le saladier pour savoir ce qu'elle avait à faire, en a sorti un papier, l'a déplié, et l'a lu. "Embrasser" avait-elle énoncé. Alors, comme les autres fois, comme les autres personnes, elle avait fait tourner la bouteille en souriant. Comme des enfants, tous avaient suivi le goulot des yeux, jusqu'à ce qu'il s'arrête sur moi. Certains avaient tapé dans leurs mains, d'autres avaient lancé des "oh", moi, mon corps ne me répondait plus. Faisant un effort qui m'avait paru énorme, j'avais levé les yeux vers Charlotte. Elle me fixait, elle ne bougeait pas, elle semblait paralysée. J'avais l'impression que mon cœur allait sortir de ma poitrine,  qu'il allait s'enfuir à l'autre bout du monde. J'avais senti mes joues devenir chaudes de plus en plus chaudes. Les autres, voyant qu'aucune de nous ne bougeait, avaient poussé Charlotte jusqu'à moi. Elle s'était approchée, j'avais tendu mon visage, et nos lèvres s'étaient touchées, comme aimantées les par les autres. Je ne sais pas combien de temps avait duré le baiser, le temps m'avais paru comme suspendu. Je ne sais plus qui avait rompu le contact. Je ne sais plus. Je ne sais plus ce qui s'est passé après. J'ai juste, comme gravé devant mes paupières, les yeux bruns d'Alex me fixant, inquiets. 

correction et mise en page le 16.08

Avant que le Soleil ne se CoucheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant