Chapitre corrigé
Ethan
Ma gorge me brûle quand je tousse. Mon tee-shirt me colle au torse, et je m'étire pour faire craquer mon dos qui me lance. Je lâche un râle quand une vive douleur se fait ressentir au bas de mon dos, mais je prends une respiration pour la faire disparaître.
Je défais mes lacets et j'enlève mes baskets de sport. Mes pieds me font mal et je sens une ampoule apparaître derrière mon talon droit. Je m'assois sur le terrain où l'herbe est humide et je m'allonge en essayant de réguler mon souffle. J'ai fait quarante tours de terrain, c'est un record. Ma tête me tourne, et je serre ma bouteille d'eau dans ma main. J'améliore mon endurance pour passer les sélections qu'il y a dans quelques mois. J'espère être pris pour faire un stage à Washington dans une équipe de rugby professionnelle.
Je reçois un message de Luke qui m'invite à dîner chez lui. Un sourire étire mes lèvres, mais je refuse. Ma mère et ses parents sont amis depuis mon plus jeune âge. Alors, quand ma mère est tombée malade et qu'elle a dû rester à l'hôpital à temps plein, Andréa, la mère de Luke, m'a pris sous son aile. Comme si j'étais son troisième enfant. Je passe beaucoup de temps chez eux, mais j'ai gardé mon studio pour avoir une intimité. Mon père est décédé quand j'étais gamin, et il était à la tête d'une haute entreprise. Tout son argent a été partagé entre ma sœur et moi, je ne suis donc pas dans le besoin. J'ai longtemps détesté me servir de cet argent, mais au final, il m'aide à payer les frais médicaux de ma mère. Le père de Luke, Samuel, me considère comme son deuxième fils. Il détestait mon père, mais ça ne l'a pas empêché de veiller sur moi quand je me suis retrouvé seul. Il est pilote de ligne pour l'armée, il est donc rarement chez lui. Quand il revient, je laisse Luke et sa famille ensemble. La mienne ne contient que trois personnes, mais ce n'est pas grave.
Je prends une douche dans les vestiaires, et quand j'ai fini, je me dépêche de m'habiller. Mes muscles me tirent, et un mal de tête frappe mon crâne. Je passe une main sur mon front brûlant et je souffle bruyamment. Depuis quelque temps, j'ai toujours mal à la tête. J'essaye d'y faire abstraction, mais quand c'est trop fort, je suis obligé de m'asseoir ou de m'allonger. Ça me fait vraiment chier.
Je prends ma voiture, une Audi TT grise d'occasion. Je l'ai eu moins chère, étant donné que je l'ai acheté à un particulier. Je prends soin d'elle comme si c'était mon enfant. Si je ne l'ai plus, je ne pourrais pas m'en racheter une autre. J'arrive devant un grand bâtiment rouge, et je m'engage dans le parking souterrain. Je trouve rapidement une place, et je prends l'ascenseur pour me retrouver dans le grand hall. J'ai tellement l'habitude de venir qu'une femme de l'accueil me salue avec un signe de la main. Je lui rends et je prends l'ascenseur pour monter au quatrième étage. Je bouge les épaules pour me donner du courage. Ma gorge se serre de plus en plus quand je m'approche de la chambre trois-cent-vingt-huit.
Je toque, et j'entre sans attendre de réponse. La pièce est illuminée seulement par la télévision allumée sur la chaîne des informations.
« Ethan ! Tu es là. »
Un sourire triste apparaît sur mes lèvres. Je m'approche de lit, où ma mère est allongée. Elle porte un foulard rose autour de la tête, et ses yeux sont creusés par sa maladie. La couverture est remontée jusqu'à sa poitrine, mais je devine facilement son corps maigre sous les draps. Son teint est cireux, gris. Elle a perdu encore plus de poids que la dernière fois.
Je l'embrasse sur le front et elle attrape ma main. Mon cœur bat douloureusement dans ma poitrine. Je pince les lèvres et m'assied sur le fauteuil à côté de son lit. Il y a beaucoup de fleurs, des Jacinthes, ses préférées. Elle était fleuriste, avant, et elle a toujours aimé être entourée de plantes.
« Je t'ai amené le DVD, dis-je en posant une boîte sur sa table de chevet.
-Oh, merci. »
Sa main serre la mienne et elle me sourit faiblement. Elle sort rarement de sa chambre, parce qu'elle est trop fragile. Parfois, je la mets dans un fauteuil roulant et je vais la promener dans le parc. Peut-être que j'irais la promener une prochaine fois, parce qu'il fait assez frais ce soir.
Une quinte de toux m'empare et je m'écarte de ma mère pour ne pas lui donner mes microbes. Je tape contre ma cage thoracique, et je me calme.
« Ça va ? Tu tousses toujours autant, à ce que je vois, s'exclame-t-elle en posant une main sur mon épaule.
-Oui, ne t'inquiète pas. J'ai un peu trop couru tout à l'heure, c'est tout, je réponds en respirant profondément.
-Bien sûr. Ça fait un moment que tu tousses comme ça, Ethan ! Tu vas aller consulter un médecin, et dès demain. Je ne veux pas que quelque chose de grave t'arrive, tu m'entends ? »
Sa voix est douce, mais autoritaire. Je hoche la tête, mais ne dit rien.
« Rose m'a appelé, ce matin. Elle m'a dit qu'elle viendrait sûrement au mois de décembre, j'ai hâte de la voir. Tu sais qu'elle m'a peint un tableau ? Je pourrais l'accrocher au mur, là-bas, explique-t-elle en pointant le mur en face de nous. Séline a dit que c'était possible, si on ne fait pas de trous. Je pense que c'est faisable. Tu pourras le faire ? Si tu ne peux pas, ce n'est pas grave. Comment vont les cours ?
-Oui, elle m'a dit. Je pourrais te l'accrocher, ne t'inquiète pas. Pour l'instant, ce n'est pas trop difficile. J'ai survécu à ma première année, alors je peux survivre à la deuxième. »
Elle parle beaucoup. Elle a toujours parlé énormément. Elle a un débit de parole impressionnant, et elle change vite de sujet. Rose lui manque beaucoup. C'est ma grande sœur qui a vingt-six ans. Elle vit à la Nouvelle-Orléans avec son mari. Il s'appelle Daniel, et il est sympa. À leur mariage, je m'étais éclaté comme un fou. Ils l'ont fêté sur une péniche, et on a fini à l'eau tous les deux. J'en garde de très bons souvenirs. Cependant, je ne m'entends pas merveilleusement bien avec Rose. C'est toujours compliqué.
Elle essaye de me raisonner et elle me dit sans cesse que maman est destinée à mourir. Que son cancer du sein est trop avancée, et que la chimiothérapie va la tuer. Je déteste quand elle me dit ça, parce que c'est horrible. Elle fait tout pour me désillusionner, pour me faire comprendre qu'il ne faut pas que je m'accroche à maman comme ça. Elle justifie ses paroles par le fait qu'elle ne souhaite plus me voir dans le même état qu'après la mort de notre père, Adam.
Il est mort il y a six ans. D'un accident de moto. Je l'ai très mal vécu, même s'il n'a jamais été aimant envers moi. Il était très sévère. Il voulait que je donne le meilleur de moi-même et que je repousse mes limites. Il voulait que je sois le premier dans toutes les catégories. J'ai toujours eu de bons résultats, mais jamais suffisants pour lui. Il lui arrivait parfois de me frapper, et à frapper ma mère. C'était très violent, et y penser maintenant me fait encore du mal. J'ai réussi à passer au-dessus de tout ça, notamment grâce à un psychologue qui m'a suivi pendant des années. C'est toujours difficile d'en parler aux autres, alors je ne le fais pas. Il n'y a que Luke qui est au courant de ça. Je n'en parle pas, pour ne pas réanimer des vieux démons.
Il ne touchait jamais ma sœur. Elle était la prunelle de ses yeux. Je lui en ai beaucoup voulu pour ça. Elle était sa favorite, sa perle rare. Et moi je n'étais rien d'autre qu'un gamin stupide. Il ne m'a jamais dit qu'il m'aimait. Jamais. Ses excès de violence ont commencé quand ma mère est tombée enceinte de moi. Il la battait pendant sa grossesse, m'a-t-elle raconté. Elle m'a tout expliqué, et parfois j'aurais aimé ne pas savoir. Elle a porté plainte plusieurs fois contre lui, mais personne n'a rien fait. C'est seulement quand il est décédé que les gens se sont intéressés à ce qu'il avait fait à ma mère. Tout le monde lui demandait pourquoi elle n'était pas partie dès que ça a commencé, tout le monde lui demandait ce qu'elle avait fait pour que ça commence. Comme si c'était sa faute. Personne ne s'est jamais mise à sa place, à part les parents de Luke. C'est pourquoi je les considère comme ma deuxième famille.
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He Came Back - Tome 1
Teen FictionTOME 1 / PUBLIÉ AUX ÉDITIONS ÉDILIVRE « Une goutte de pluie se mêle à mes larmes, qui caressent mes lèvres ravagées par des baisers damnés. » Lorsqu'Eden se remet peu à peu de son ancienne relation toxique, un événement bouleverse tout ce qu'elle a...