CHAPITRE 1

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« C'est le temps que tu as perdu pour ta rose,

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« C'est le temps que tu as perdu pour ta rose,

Qui fait ta rose si importante »

Le Petit Prince

Antoine de Saint-Exupéry


CHAPITRE 1

Coloré

— Sérieusement Ash' ? Tu crois qu'une personne supérieure à la race humaine comme moi n'en serait pas capable ?!

  Mon ami Lewis rigole tellement fort, qu'il se roule sur le sol de la cafétéria de l'école depuis cinq bonnes minutes, s'étouffant désormais avec son crachat. De son côté, Ashley me lance un regard plein de malice et de défi.

— Si tu le fais, je te donne mon muffin au chocolat, minaude-t-elle en me pointant son plateau à l'aide de son index. 

  La salive glisse dans ma gorge comme du miel et je lui offre un sourire confiant.

— Tu vas vite regretter de m'avoir prise pour une poule mouillée.

  Elle hausse les épaules et jette un rapide coup d'œil à l'une des deux montres qui trône sur chacun de ses poignets.

— Bien ! Alors tu as exactement sept secondes et cinquante-deux centièmes pour te mettre en condition et le faire.

— Quoi ? C'est tout ?! je m'étrangle et me lève d'un bond. OK, c'est parti.

  J'écrase mes paumes contre mes joues couvertes de taches de rousseur pour me donner du courage et secoue la tête à l'image d'un bœuf sur le point d'entrer en action.

  L'attention des lycéens autour de nous se pose immédiatement sur moi comme des lucioles attirées par la lumière, quand ils comprennent que la « team décalée » va encore faire quelque chose d'absurde.

  De la sorte, après avoir pris une profonde inspiration, je m'aide de ma chaise en plastique pour me mettre debout sur la table bancale de la cantine.

  Une fois que je suis sûre d'être visible de tous, je prends une profonde inspiration et hurle de toutes mes forces :

— Moi, Heaven DAWSON, à ce jour âgée de seize ans, je vous annonce misérables insectes que je deviendrai un jour la reine du Canada, puis la reine du monde !

  Et accessoirement artiste peintre aussi...

  Je me racle la gorge pour continuer en prenant une posture arrogante, main sur la hanche.

— Alors quiconque osera se mettre en travers de mon chemin, se verra gentiment enlevé du fardeau de sa vie.

  Là, j'éclate d'un rire qui se veut démoniaque. Ensuite, je descends triomphalement de sur mon estrade improvisée – en ne manquant pas de me casser royalement la figure bien-sûr. Mon coude s'appuie aléatoirement en plein dans une assiette remplie de spaghettis et je m'emmêle les pieds dans mes jambes.

  Je me retrouve donc fesses à terre, une assiette de pâtes à la sauce tomate renversée -je ne sais pas comment- sur l'épaule droite.

  Je peux dire adieu à ma jolie chemise blanche.

  Voilà probablement ma punition pour avoir écrit de ma plus belle écriture le mot « coloré » sur le miroir de la salle de bain ce matin, avec la crème anti-ride à une centaine d'euros de Maman...

— T'es complètement timbrée La Rousse ! me fait remarquer Lewis, toujours roulé en boule par terre.

   D'ailleurs, son commentaire déclenche de plus bel son fou rire et il se met à suffoquer comme un poisson qu'on aurait brutalement extirpé de l'eau. De son côté, Ashley se mord fermement l'intérieur de la joue pour ne pas éclater de rire à son tour.

  Mon cœur bat fort de honte et mes mains tremblent, mais je ne laisse rien paraître. Victorieuse, je me dresse d'un bond, je bombe le torse et me recoiffe d'un geste habitué. Ainsi, je lui offre mon plus grand sourire tandis que la sonnerie annonçant la fin de la pause de midi retentit dans l'espace.

— Tu me dois un muffin ma vieille !

A suivre...

A suivre

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