5 - Révélation - Partie 2

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La porte grinça légèrement et permit l'intrusion du tout nouveau locataire à poils, grelot autour du cou attaché d'un ruban rouge. Cette entrée innocente trahit la présence de Mrs McFear et Alice. L'air penaud, elles se redressèrent et entrèrent quand, d'un signe du doigt, Delhumeau les assigna à s'approcher.

― Ne serait-ce pas deux indiscrètes aux oreilles bien accrochées ?

― Cette maison est un vrai nid d'espions, sourit Ferguson.

― Nullement, se défendit maladroitement Alice, surprise que Delhumeau ne se contente, à leur égard, que de leur offrir un visage délassé. Et puis manifestement l'espion n'est pas celui que l'on soupçonnait, reprit-elle, hautaine. Quoique ? Finalement, je ne suis pas vraiment étonnée.

― Je vais devoir vous tuer, vous en êtes consciente, ma petite, affirma avec sérieux Delhumeau.

Frémissante, Alice ne se départit par pour autant de son sérieux et y ajouta une pincée toute féminine.

― J'aimerais bien voir cela, aguicha Alice.

― Ne me tentez pas, chérie.

Delhumeau sentit vibrer en lui des émotions attisées, émoustillé par le joli visage d'Alice et ses yeux enjôleurs. Comment faire taire son appétit charnel ? Il y avait deux femmes de trop dans cette maison pour son âme qui aimait à courir le guilledou. Ferguson se racla le fond de la gorge, brisant l'échange consensuel.

― J'avoue être surprise et blessée, monsieur Delhumeau. Après toutes ces années... s'insurgea Mr McFear qui préféra ignorer la nature des sentiments qui filtraient entre ses deux locataires. Quels qu'ils soient.

― Désolé, madame. Delhumeau se sépara d'Alice et prit la main de la vieille et dame pour y déposer un chaste baiser. Mais vous comprenez que ce n'était pas là un sujet que je pouvais aborder comme l'on parle du temps, madame.

― Tout de même, Monsieur Delhumeau. Un espion français. Dans ma maison  ! J'espère que vous...

― Que je n'ai jamais profité de ma position dans ce pays, pour...

Inutile d'en venir à des mots sombres. Ils se comprirent et Delhumeau lui octroya un sourire qui rasséréna la logeuse. Le petit chaton alerte s'approcha des pieds de Ferguson qui se baissa pour le caresser.

― Mais d'où vient ce chat ?

― C'est le mien, répondit Alice. Je l'ai appelé Poppy.

― Miss Appletown ! Je n'ai encore jamais admis d'animaux dans cette maison.

Le chaton s'échappa des mains de Ferguson et sauta sur les genoux de Delhumeau qui s'était assis, nonchalamment, sûr de voir sa jeune voisine subir les récriminations de la logeuse. Le petit chat se pelotonna dans le creux de son ventre et entreprit une petite sieste, manifestement bien à l'aise.

― Sale boule de poils, aboya Delhumeau sans pour autant chercher à priver le nouveau venu de sa nouvelle couche.

― Ce n'est pas une boule de poils. C'est Poppy, monsieur Delhumeau.

― Poppy ! s'esclaffa de ridicule Delhumeau. Débarrassez-moi de ça et n'escomptez pas le garder.

― Et pourquoi donc ?

Delhumeau prit le chaton pour le mettre face à lui et plongea son regard dans celui du petit animal. Le chaton miaula.

― Mrs McFear, dites-lui. Les animaux ne sont pas admis ici.

― Oui. Mais si je devais refuser toutes les bêtes, monsieur Delhumeau, il y a longtemps que je vous aurais rendu à la rue.

Delhumeau prit des airs outragés.

66 Exeter Street, Tome 1 : Le secret de la chambre 36 [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant