CHAPITRE 7 : L'ART
L'essentiel du cours
L'art ne doit pas seulement être entendu dans le sens de « beaux-arts » : il ne faut pas oublier l'art de l'artisan, qui lui aussi réclame une technique, c'est-à-dire un ensemble de règles à respecter. il est clair cependant que les beaux-arts n'ont pas la même finalité puisqu'ils recherchent le beau et produisent des objets dépourvus d'utilité.
COMMENT DÉFINIR L'ART ?
Ce n'est qu'au xviiie siècle que le terme d'art a été réduit à la signification que nous lui connaissons actuellement. Il avait jusque-là servi à désigner toute activité humaine ayant pour but de produire des objets : en ce sens, l'art s'oppose à la nature, qui est l'ensemble de tout ce qui se fait sans que l'homme n'ait à intervenir. L'art réclame toujours des règles : lorsque l'on est charpentier comme lorsque l'on est musicien, il faut observer des règles si l'on veut produire l'œuvre désirée. C'est exactement ce que veut dire le mot technè en grec : la technique, c'est l'ensemble des règles qu'il faut suivre dans un art donné.
QU'EST-CE QUI DIFFÉRENCIE LES BEAUX-ARTS DE L'ART DE L'ARTISAN ?
L'artisan a pour but de produire des objets d'usage : c'est l'usage qu'on va faire de l'objet qui détermine ses caractéristiques, et donc la façon dont on va le fabriquer. L'artiste quant à lui ne vise pas l'utile, mais le beau. Si l'habileté technique est la limite supérieure de l'art de l'artisan, elle est la limite inférieure des beauxarts : alors qu'on attend d'un objet courant qu'il soit bien conçu et réalisé de façon à être d'usage aisé, on n'attend pas simplement d'un tableau qu'il soit bien peint, mais qu'il éveille au contraire en nous le sentiment du beau.
PEUT-ON DÉFINIR CE QU'EST LE BEAU ?
Deux grandes conceptions s'affrontent dans l'histoire de la philosophie : soit le beau est une caractéristique de l'objet, soit il est un sentiment du sujet. La première doctrine remonte à Platon : une chose est belle quand elle est parfaitement ce qu'elle doit être ; on peut parler d'une belle marmite, quand cette marmite rend exemplaire l'idée même de marmite. La seconde est inaugurée par Kant : le beau n'est pas une caractéristique de l'objet, c'est un sentiment du sujet, éveillé par certains objets qui produisent en nous un sentiment de liberté et de vitalité. En effet, le sentiment du beau est le « libre jeu » de l'imagination et de l'entendement : le beau suscite un jeu de nos facultés par lequel nous éprouvons en nous le dynamisme même de la vie.
LE BEAU DÉPEND-IL DU GOÛT DE CHACUN ?
Selon Kant, la réponse est négative : le beau plaît universellement, même s'il s'agit d'une universalité de droit, et non de fait. Si je juge une œuvre belle alors que mon voisin la trouve laide, la première chose que je tenterai de faire, c'est de le convaincre. C'est ce qui différencie le beau de l'agréable : l'agréable est affaire de goût et dépend du caprice de chacun, alors que le beau exige l'universalité. Le beau peut être universel parce qu'il fait jouer des facultés qui sont communes à tous les sujets : le sentiment que j'éprouve devant la belle œuvre peut, en droit, être partagé par tous. Kant estime néanmoins que cette définition vaut aussi bien pour le beau naturel que pour le beau artistique ; en un sens, le beau naturel peut être selon lui supérieur au beau artistique, parce qu'il est purement gratuit : la belle œuvre est faite pour plaire, et cette intention, quand elle est trop visible, peut gâcher notre plaisir ; rien de tel avec un beau paysage.
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