LA RAISON ET LE REAL - CHAPITRE 14

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CHAPITRE 14 : LE VIVANT

L'essentiel du cours

La  notion  même  de  «  vivant  »  est  au  cœur  de  nombreux  débats contemporains : avec le développement de la génétique, l'homme a  désormais  le  pouvoir  inouï  de  travailler  la  vie  comme  un  matériau,  ce  qui  soulève  de  graves  problèmes  éthiques  que  la  science à elle  seule  ne peut sans doute pas résoudre.

COMMENT DÉFINIR   CE  QU'EST  LE  VIVANT  ?

Selon Aristote, il faut distinguer les êtres animés des êtres  inanimés,  c'est-à-dire  ceux  qui  ont  une  âme  et ceux  qui  en  sont  dépourvus.  Aristote  nomme  donc «  âme »  le  principe  vital  de  tout  être  vivant,  et  en distingue  trois  sortes.  L'âme  végétative  est  la  seule que  possèdent  les  végétaux  :  elle  assure  la  nutrition  et  la  reproduction.  À  celle-ci  s'ajoute,  chez  les animaux,  l'âme  sensitive,  principe  de  la  sensation. L'homme  est  le  seul  de  tous  les  vivants  à  posséder en  plus  une  âme  intellective,  principe  de  la  pensée. On  voit  ici  que  l'âme  végétative  est  de  toutes  la  plus fondamentale : pour Aristote,  vivre,  c'est  avant  tout «  se  nourrir,  croître  et  dépérir  par  soi-même  ».  Cela signifie  que  le  vivant  se  différencie  de  l'inerte  par une  dynamique  interne,  par  une  autonomie  de fonctionnement qui se manifeste dans un ensemble d'activités  propres  à  maintenir  la  vie  de  l'individu comme de l'espèce.

QUELLES  SONT  LES  CARACTÉRISTIQUES DU  VIVANT  ?

Le  biochimiste  Jacques  Monod  pose  trois  caractéristiques propres au vivant : un être vivant est un individu indivisible  formant  un  tout  cohérent,  possédant  une dynamique interne de fonctionnement et doué d'une autonomie  relative  par  rapport  à  un  milieu  auquel  il peut s'adapter. La première caractéristique de tout être vivant,  c'est  alors  la  morphogénèse  autonome  qui  se manifeste par exemple dans la cicatrisation : le vivant produit  lui-même  sa  propre  forme  et  est  capable  de la  réparer.  Ensuite,  tout  être  vivant  possède  une  invariance reproductive : les systèmes vivants en produisent d'autres  qui  conservent  toutes  les  caractéristiques  de l'espèce. Enfin, tout être vivant est un système où chaque partie  existe  en  vue  du  tout,  et  où  le  tout  n'existe  que par  ses  parties  :  le  vivant  se  caractérise  par  sa  téléonomie,  parce  que  c'est  la  fonction  qui  définit  l'organe. On  nomme  organisme  cette  organisation  d'organes interdépendants orientée vers une finalité.

LA  FINALITÉ  EST-ELLE  NÉCESSAIRE POUR  PENSER  LE  VIVANT  ?

Dans le vivant, la vie semble être à elle-même sa propre finalité : c'est ce que Kant nomme la « finalité interne ». Le  vivant  veut  persévérer  dans  l'existence,  et  c'est pourquoi il n'est pas indifférent à son milieu, mais fuit le nocif et recherche le favorable. La vie veut vivre : tout dans l'être  vivant semble tendre vers cette fin. Devant  l'harmonie  des  différentes  parties  d'un  organisme,  il  est  alors  tentant  de  justifier  l'existence des  organes  par la nécessité  des  fonctions  à  remplir, et  non  l'inverse,  en  faisant  comme  si  l'idée  du  tout à  produire  guidait  effectivement  la  production  des parties.  Cela  présuppose  que  l'effet  ou  la  fin  sont premiers, ce qui est scientifiquement inadmissible : la biologie va opposer à notre compréhension naturelle du vivant par les fins une explication mécaniste.

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