LA RAISON ET LE REAL - CHAPITRE 13

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CHAPITRE 13 : LA DÉMONSTRATION

L'essentiel du cours

Comme le remarquait Husserl, la volonté de démontrer est apparue  en  Grèce  antique,  aussi  bien  dans  le  domaine  mathématique que  dans  celui  de  la  logique.  Être  rationnel,  l'homme  a  en  effet la  possibilité  d'articuler  des  jugements  prédicatifs  dans  des  raisonnements  en  trois  temps  nommés  syllogismes,  et  qui  sont  la forme même de la démonstration.

QU'EST-CE  QUE  LA  LOGIQUE  FORMELLE  ?

Il  existe  différents genres de jugements prédicatifs qui vont permettre différents types de combinaisons. Il faut en effet distinguer quatre quantités dans nos jugements (universelle,  particulière,  indéfinie,  singulière)  et  deux qualités  (affirmative  et  négative).  Par  exemple,  «  tout S  est  P » est une proposition  universelle  affirmative,  et « quelque S n'est pas P », une proposition particulière négative. Produire une démonstration, alors, c'est combiner ces différents types de propositions en syllogismes, en sorte que la conclusion s'impose nécessairement. Or, ce que remarque Aristote, c'est que certaines combinaisons sont possibles, mais que d'autres ne sont pas concluantes, quel  que  soit  le  contenu  des  propositions  –  on  dira  en de tels cas que le raisonnement est formellement faux. La logique formelle a alors pour but de montrer quelles sont  les  formes possibles  d'un  raisonnement  cohérent, c'est-à-dire  d'établir  les  règles  formelles  de  la  pensée, indépendamment du contenu de cette pensée.

QU'EST-CE  QU'UN  SYLLOGISME CONCLUANT  ?

Un  syllogisme  est  constitué  de  deux  prémisses (une  majeure  et  une  mineure)  et  d'une  conclusion. Par  exemple,  «  tous  les  hommes  sont  mortels (prémisse  majeure),  or  tous  les  philosophes  sont  des hommes (prémisse mineure) donc tous les philosophes sont mortels (conclusion) » : c'est-à-dire, « Tout A est B, or tout C est A, donc tout C est B ». Ce syllogisme, constitué d'une majeure, d'une mineure et d'une conclusion universelles  affirmatives,  est  effectivement  concluant  (la conclusion  est  nécessairement  déduite).  Mais  il  existe des combinaisons incorrectes, comme : « Tout A est B, or quelque B est C, donc tout A est C » ; comme le montrera Leibniz,  parmi  les  512  combinaisons  syllogistiques  possibles, 88 seulement sont concluantes. Les autres sont des paralogismes, c'est-à-dire des syllogismes formellement faux. Quelle que soit la combinaison, il faut en fait, pour que le raisonnement soit  concluant,  que  la  conclusion soit déjà contenue dans les prémisses : c'est seulement dans ce cas qu'elle est nécessairement déduite, donc que le syllogisme est concluant du point de vue formel.

LA  LOGIQUE  FORMELLE  PEUT-ELLE CONSTITUER  L'INSTRUMENT  DE  TOUTE CONNAISSANCE  ?

Telle  que  nous  l'avons  définie,  la  logique  est  une science formelle. Comme telle, elle est une condition nécessaire,  mais  non  suffisante,  pour  la vérité d'une démonstration  :  un  syllogisme  peut  être  concluant du  point  de  vue  formel,  et  faux  du  point  de  vue matériel,  c'est-à-dire  eu  égard  à  son  contenu.  «  César est un nombre premier ; or un nombre premier n'est divisible  que  par  un  et  par  lui-même  ;  donc  César n'est  divisible  que  par  un  et  par  lui-même  »  est  un syllogisme  formellement  cohérent,  mais  absurde matériellement (dans son contenu). D'ailleurs,  un  syllogisme pose ses prémisses comme étant  vraies  sans  pour  autant  le  démontrer.  En  fait, la  logique  n'a  pas  pour  but  de  démontrer  la  vérité des  prémisses,  mais  d'établir  toutes  les  déductions cohérentes qu'on peut en tirer : si j'admets que la majeure est vraie, et si j'admets que la mineure est vraie, que puis-je en tirer comme conclusion ? Au début de chaque syllogisme, nous sous-entendons donc : « s'il est  vrai que ».  Les  prémisses  sont  des  hypothèses,  et la  logique en tant que telle ne peut produire que des raisonnements  hypothético-déductifs.  La  logique n'augmente  en  rien  notre  connaissance,  elle  ne fait  qu'expliciter  une  conclusion  qui  par  définition devait  déjà  être  contenue  dans  les  prémisses,  en  ne tenant  en  outre  aucun  compte  du  contenu  même des propositions.

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