Prologue

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Une odeur putride de chair en décomposition plane dans l'air. Un froid glacial règne dans les couloirs.

Au-dehors, la pluie tombe, incessante et drue, claquante sur les vitres, accompagnée d'un vent impétueux qui souffle, comme s'il veut tout emporter avec lui.

Plusieurs d'entre nous sont déjà morts. Tués de manière brutale, aux mains d'une personne que je ne pensais jamais revoir.

Je boite sans but dans l'obscurité, ignorant délibérément les corps éparpillés un peu partout sur le sol.

Penser à la mort est devenu quelque chose de normal depuis le début de ce massacre. Je ne la crains plus. A dire vrai, je suis même prête à l'accueillir à bras ouverts.

La mort.

Oui. Je la considère comme un cadeau, à présent. C'est la seule porte de sortie. La seule solution pour mettre fin à mes souffrances.

Une soudaine vague d'émotions me submerge : je comprends finalement ce qu'elle ressentait quand elle criait à l'aide. Tout ce qu'elle voulait, c'était une vie calme et sans histoire, mais il avait fallu qu'on gâche tout...

Je tombe à genoux, des larmes coulant de mes yeux alors que je sens la culpabilité me frapper comme un poignard.

Je suis désolée, je suis vraiment désolée, dis-je en sanglotant.

Je pleure désespérément en m'entourant de mes bras. Ce n'est qu'à cet instant que je réalise à quel point je suis mal en point.

Les coupures sur mon corps sont toutes fraiches et saignent encore. Au moindre mouvement, je ressens une sensation de brulure atroce. En baissant les yeux vers mes mains, je remarque à nouveau l'absence d'ongles au niveau de mes doigts, lesquels ont été arrachés ne laissant plus que des doigts dégoûtants et mutilés.

Je n'ai jamais voulu te faire de mal..., murmuré-je en contemplant mes blessures qui, malgré leurs gravités, ne sont en rien comparable à ce qu'elle a subi. Tout est ma faute...

Bien sûr que c'est ta faute. Sa douce voix semble provenir de quelque part devant moi. Pourtant, je n'ai rien entendu. C'est comme si elle est soudainement apparue de nulle part.

Je lève lentement la tête pour la regarder, essayant de l'apercevoir malgré mes yeux embués de larmes.

Elle porte le même uniforme scolaire que moi. Sa jupe atteint le bas de ses genoux et sa cravate est bien attachée en dépit de l'environnement morbide. Elle est couverte de sang, le sang de toutes les personnes qu'elle a tuées.

Mais ce sont ses yeux qui m'effraient plus que tout le reste. Ils sont remplis d'une haine intense. Un seul de ses regards suffit à me faire trembler de peur.

Apres une longue pause, elle s'avance vers moi. Chacun de ses pas envoie des frissons dans ma colonne vertébrale.

Quand elle arrive à ma hauteur, elle saisit mon cou déjà douloureux avec une de ses mains glaciales et me soulève sans effort dans les airs.

Une poussée d'adrénaline se répand dans mes veines alors que je frappe faiblement ses bras, essayant de me défendre. Sans succès. Je suis trop faible.

Elle marmonne des choses que je n'arrive pas à entendre, tout en resserrant sa prise sur mon cou. Sans pitié.

Ma vision s'assombrit peu à peu et mes poumons se mettent à réclamer l'oxygène dont j'ai si désespérément besoin.

Elle enfonce ses doigts froids plus profondément dans ma chair ; du sang jaillit et coule sur son bras, tachant davantage son uniforme de rouge. Ses mains tremblent de haine et de rage alors que mes bras tombent mollement le long de mon corps.

A ce stade, je suis devenue totalement insensible. La sensation de brulure atroce que je ressentais plus tôt a disparu. La chaleur qui embrasait mes poumons lorsque j'haletais a disparu. La peur et l'adrénaline qui faisaient battre mon cœur à un rythme irrégulier ont également disparu.

Va m'attendre en enfer, dit-elle. Je t'y suivrai bientôt.

Elle me projette violemment contre un mur comme si je ne suis rien d'autre qu'une poupée de chiffon.

Et quand j'y serai..., ajoute-t-elle tandis qu'elle se détourne et commence à s'éloigner, je te tuerai à nouveau.

La vengeance d'une morteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant