Partie 57 (FIN) : Payer pour ses erreurs

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De l'eau avait coulé sous les ponts depuis l'arrestation de la femme de Mouhamed. Il avait dû, seul, gérer ce nouveau né à qui il avait donné son nom de famille. Pourtant il avait fait toutes les démarches possibles pour sortir la mère de bébé Moustapha de là où elle était mais rien ne s'était réalisé. Il avait donc été contraint de vivre seul encore longtemps alors qu'il venait à peine de se marier. Entre temps Rabia avait été la seule à l'épauler et à l'aider dans l'éducation de son fils. Cependant le jeune homme ne pouvait plus taire la vérité dans ces conditions, il avait ainsi parlé à son amie à cœur ouvert lui dévoilant les secrets les plus sombres de son épouse. Mais il n'avait pas vraiment le choix, c'était la chose à faire, lui expliquer tout ce qui s'était passé. Entre temps bébé Moustapha avait beaucoup grandi et même si l'image maternelle n'était pas présente, c'était tout comme grâce à Rabia. Il s'épanouissait tranquillement devant un père et une tante qui s'émerveillaient de son intelligence et de son imagination débordante. Sa mère était certes derrière les barreaux mais Moustapha évoluait quand même, n'y sachant rien. C'était Rabia qu'il appelait '' Maman '' sans le savoir, c'est elle qui lui avait changé ses couches, celle qui l'avait bordé, celle qui en compagnie de Mouhamed l'avait assisté lors de ses premiers pas. En amie dévouée de Dieyna, cette dernière faisait toujours tout pour mettre son neveu dans les meilleures conditions.

Dix années, c'était le temps exact auquel avait été condamnée Dieyna lorsque la sentence avait été prononcée.  Aujourd'hui il était là devant les locaux de la prison à attendre son bien aimée épouse. Ce jour marquait la fin de toutes les souffrances qu'il avait eu à endurer seul. Il avait toujours cru en sa femme et était toujours resté convaincu qu'elle n'était pas une meurtrière, elle n'était pas une mauvaise personne. Aujourd'hui cette attente qui lui semblait interminable était finie, les dix ans s'étaient écoulés.
Mouhamed se rappelait encore de ces paroles qu'avait dit le juge, ces paroles qui avaient résonné plusieurs fois dans ses oreilles. '' Vous êtes condamnés à dix ans de prison ferme pour homicide volontaire sur la personne de Souleye Ndao '',  comment pouvait-il oublier ces mots ? Pour dire vrai il avait eu des doutes le jour où il avait trouvé Dieynaba allongée par terre non loin de son patron. Et d'ailleurs l'arme qu'il avait vu près d'elle lui avait un peu fait tilt. Mais encore il voulait se convaincre que ce n'était ce qu'il croyait. Les choses s'étaient mélangé dans sa tête pendant un bon bout de temps durant lequel il s'efforçait de chasser ces idées noires de son épouse capable de descendre un homme de sang froid. Elle lui avait, pendant ses visites à la maison de correction des femmes, expliqué comment son patron, Souleye Ndao, avait réussi à littéralement bousiller sa vie. Et elle se sentait obligée de venger sa mère et toutes les personnes qui directement ou indirectement avait subi une quelconque douleur par sa faute. Elle n'avait pas eu le choix et n'avait pas eu à réfléchir avant d'appuyer sur la détente.

Dix ans c'était énormément long et peut-être bien que l'épouse de Mouhamed aurait songé à deux fois avant de tuer ce monstre. Car oui à cause de cette erreur qu'elle avait commise, son fils avait été obligé de vivre dix longues années seul, sans une mère à ses côtés. Avait-elle le droit de le priver d'un amour maternel sachant que son enfant n'avait qu'elle comme parent? Certes Mouhamed pouvait prendre soin de lui mais jamais rien ne serait comme avant. Aujourd'hui, elle devait sortir, elle était à présent libre et allait retrouver sa petite famille mais ce qui lui faisait le plus peur était comment est-ce qu'elle allait réagir devant Moustapha, il avait maintenant presque onze ans et donc les choses ne seraient pas aussi aisées.

Le bruit du métal froid des barreaux qui s'entrechoquaient avec le cadenas fit savoir à la jeune fille que c'était maintenant fini pour de bon. Avant de sortir, un sachet contenant ses affaires et effets personnels lui avait été remis. La liberté, enfin, les portes principales avaient été ouvertes lui laissant la voie. Cela lui semblait qu'elle était restée une éternité à l'intérieur de cette forteresse. Au début elle avait pensé que l'expérience serait traumatisante mais elle avait quand même eu à faire la connaissance d'une femme extraordinaire. Oui extraordinaire dans tous les sens du terme car cette dernière avait accepté de rester derrière les barreaux pour une faute commise par sa fille. Cette dernière se cachait pour se prostituer sans le consentement de sa mère. D'ailleurs elle n'avait jamais été au courant. Et un jour, elle était revenue d'une de ses balades nocturnes avec un homme à la maison, pensant que sa mère n'y était pas. Sa chambre avait donc été témoin de ses rapports avec cet homme ayant presque l'âge de son père. Son père biologique étant décédé, la jeune fille et sa famille constituée de sa mère et de ses quatre frères et sœurs avait automatiquement été expulsée de leur maison. Ramata avait donc été obligée de chercher quelque chose dans les plus brefs délais pour aider sa famille et la prostitution semblait être l'issue la plus efficace d'après toutes les propositions que lui avait faites sa copine. N'ayant pas quelque chose à se mettre pour les circonstances, les robes longues et pantalons avaient été tous déchirés jusqu'au dessous des fesses afin de se prêter à sa nouvelle vie. Très vite Ramata avait monté les échelons dans ce domaine et amassait énormément d'argent, assez pour trouver un toit respectable pour sa mère qui, heureusement pour elle, ne posait pas de questions relatives à l'origine de cet argent. Ramata s'adonnait maintenant à l'alcool, la cigarette et à la drogue sans aucune retenue depuis qu'elle les avait connus, cela lui permettait de noyer son chagrin car elle n'aimait guère ce qu'elle faisait. La prostitution à cause de la pauvreté était quelque chose de réel et cette jeune fille en était la preuve.
Cependant ce jour où elle était venue avec l'homme âgé chez elle avait marqué la fin, sa fin. Ils étaient en train de se défoncer avec la nouvelle drogue qu'avait amenée le vieux client, parfois s'embrassant, tantôt se caressant ou tantôt faisant l'amour tels de vrais animaux. Seulement à un instant donné la tension avait monté quand le vieux monsieur avait voulu renégocier le prix qu'ils avaient convenu. Et Ramata hors d'elle s'était mise à se disputer avec ce dernier jusqu'à ce qu'ils en viennent aux mains. Et là l'irréparable s'était produit car elle avait étranglé le monsieur avec sa cravate juste en voulant le menacer. Sa mère qui revenait de chez le boutiquier avait entendu les cris et pleurs de sa fille et avait accouru vers la chambre et avait donc vu la scène. N'ayant pas le choix elle s'était déshabillée automatiquement et avait pris la place de sa fille avant de lui demander de s'enfuir et de se cacher. Elle lui avait demandé de prendre soin de ses frères avant de lui remettre le paquet de liasses qui se trouvait dans les poches du vieux. Cette dernière ne sachant que faire avait été obligée de raconter toute la vérité sur sa vie à sa mère. Et celle-ci lui avait fait savoir qu'elle allait bientôt mourir et que donc il fallait quelqu'un pour prendre soin des frères de Ramata, c'était la seule solution. La jeune femme avait donc fait appel à la police et aucune enquête poussée n'avait été faite à ce propos. D'ailleurs le vieux monsieur était un vrai fantôme car la police n'avait aucune de ses informations, ce qui rendait les choses plus aisées.
Cette jeune femme s'était donc trouvée être la codétenue de Dieynaba et cette dernière lui avait promis de vérifier que ses enfants allaient bien.
Que ne ferait-on pas pour nos enfants ?
L'autre chose était qu'on entrait pas en prison parce qu'on était quelqu'un de mauvais, chaque personne avait son passé...

Ma vie avant et après toi [ TERMINÉ ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant