Chapitre 3.2 : Keir

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— Eh bien, elle est déchaînée, notre Safia ! Qu'est-ce que tu as bien pu lui dire pour la mettre dans cet état ?

Je repérai facilement mon amie qui se déhanchait au milieu de la piste de danse. Elle était radieuse. Jian et Seykou avaient fini par faire la paix avec elle, même si on ne pouvait pas vraiment parler de réelle prise de tête entre ces trois-là. Les deux garçons mettaient d'ailleurs autant d'énergie que Safia à se défouler au son de la musique.

Malgré les rires et les sourires, on sentait que chaque individu présent avait besoin de se libérer des tensions qui l'oppressaient à quelques jours des Jeux. Cette fête était notre échappatoire, notre soupape de décompression pour ne pas péter les plombs.

Je détournai le regard de la piste et reportai mon attention sur Soléna.

— Rien de spécial. Mais disons que je lui ai donné... une sorte de bénédiction.

Mon amie me scruta de ses grands yeux noisette, essayant de déchiffrer ce que j'avais bien voulu dire par là.

— Vous comprendrez tout après les Jeux, ne t'inquiète pas, la rassurai-je avec un clin d'œil.

Soléna fronça un peu ses adorables sourcils, mais n'insista pas.

Cela faisait partie de ces choses que j'adorais chez elle. Tout comme sa douceur, sa discrétion et son empathie, qui lui donnaient une place particulière dans mon cœur. Et je savais que j'occupais une place toute aussi importante dans le sien.

Je souris en me disant que j'avais de la chance de connaître enfin cette sérénité auprès d'elle. Comme j'étais heureux de savoir que Siobhan avait trouvé la même chose grâce à Safia. Même si cette dernière me répétait que ce n'était pas tout à fait pareil et qu'elle me mettait régulièrement en garde sur le mal que je pourrais faire – malgré moi – à notre douce Soléna.

Je ne comprenais pas toujours ce qu'elle entendait par là et j'étais intimement persuadé qu'elle avait tort. Je savais que je ne ferai jamais rien qui puisse causer la moindre peine à mon amie et encore moins rompre ce lien spécial qui nous unissait. J'étais bien trop heureux avec elle et je l'adorais.

— Tu veux qu'on sorte prendre un peu l'air ?

Sa voix était douce, mélodieuse et je sentis un sourire s'épanouir automatiquement sur mes lèvres.

Soléna avait ce pouvoir sur moi. Elle me canalisait, me rendait moins dur, moins arrogant. Quand j'étais avec elle, je comprenais pourquoi mon attitude envers les autres me faisait souvent passer pour un petit con prétentieux. Ce qui n'était jamais le cas quand nous n'étions que tous les deux.

J'acquiesçai à sa demande et vidai mon verre. Elle fit de même avec le sien et nous déposâmes les deux récipients vides sur le bar. Puis je lui pris la main et nous sortîmes du hangar, laissant les basses de la musique résonner derrière nous.

La nuit était belle et claire.

Même si nous nous trouvions dans ce qui était autrefois la zone industrielle d'une grande ville, nous distinguions parfaitement les étoiles au-dessus de nos têtes. Aucune pollution lumineuse ne masquait leur éclat. Le courant que les électreks comme Safia et moi pouvions produire était bien trop précieux pour que nous nous amusions à le gâcher en alimentant des lampadaires.

Et puis ce soir, la lune était pleine et elle fournissait bien assez de lumière. Surtout pour des gens comme nous, dont la vision nocturne était proche de celle d'un chat. Bien supérieure en tout cas à celle d'un être humain lambda.

Sans nous concerter – nous savions tous les deux où nous voulions aller – nous nous mîmes à courir, main dans la main. J'étais plus rapide qu'elle, mais Soléna tenait bien le rythme. Dans ce domaine aussi, nos capacités étaient comparables à celles des félins. Nous quittâmes donc la zone industrielle et ses hangars – pour la plupart désaffectés – en un rien de temps.

Héritiers des Bannis - Tome 1 : Clans ennemisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant