Chapitre 18 : L'enfer commence

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Chapitre 18 : L'enfer commence

La 1ère semaine a été tout simplement atroce. S'habituer à ne pas pouvoir se déplacer sans béquille a été très dur... Il m'arrivait souvent de poser mon pied puis de me rappeler « ah bah nan, je peux pas marcher si je prends pas les béquilles ». Le plâtre était lourd (bien que moins lourd que le vrai plâtre...). À l'appartement, j'avais toujours peur de glisser sur le parquet du salon et de ma chambre, heureusement que dans les autres pièces, le sol était du lino ! À la maison, les 6 marches qu'il fallait monter pour aller de dehors à l'intérieur étaient très chiantes, je galérais comme pas possible. Là aussi c'était du parquet, mais partout. Autant vous dire que je n'amusais pas à aller le plus vite possible dans ma chambre !

Mais je crois que le pire c'était le collège. Il y avait un ascenseur (heureusement parce que monter 4 étages en béquilles dans les escaliers non merci !) sauf que c'était un bordel pas possible pour le prendre. Je vous explique : une fois rentrée dans l'enceinte du collège, normalement il fallait monter une bonne trentaine de marches en béton pour accéder à la cour et à « l'étage 0 » où j'avais mes cours d'art plastiques et de musique, une salle de permanence, la vie scolaire et le bureau des surveillants. Ayant des béquilles, je ne montais pas ses marches. Juste avant d'arriver à la 1ère, j'allais à gauche vers l'accueil où on me donnait les clés de l'ascenseur. À cet « étage -1 », il y avait en plus de l'accueil, la salle et les casiers des profs, l'infirmerie, et à l'autre bout du couloir (en carrelage très glissant, comme tout le collège), une salle de maths où je n'allais jamais, une salle de perm' presque jamais utilisée et une cafétéria où on n'avait pas le droit d'aller (utile hein ?). Bref, une fois arrivée au bout du couloir, vous allez croire qu'il y avait l'ascenseur, mais non ! Je devais ensuite aller à gauche, comme si j'allais au self, puis prendre un tout petit passage (qu'on ne remarquait pas si on ne savait pas que c'était par là qu'était l'ascenseur) qui longeait la salle de perm' fantôme pour entrer dans une espèce de salle (qui ressemblait plus à une cave et qui me faisait bien flipper quand j'étais toute seule le matin et le soir !). Et c'est là qu'était l'ascenseur ! Bon, le 1er jour je me suis perdue en y allant.

Bref, je détestais vraiment ces béquilles, ce plâtre, et je détestais encore plus la ********** de ******* de ******* ** ****** qui m'avait péter la cheville (le cartilage de croissance pour être exacte). Ce que je ressentais ? De la colère surtout, beaucoup de colère contre tout et tout le monde, mais surtout contre moi. Je crois que je me détestais d'avoir eu la cheville trop fragile pour casser à cause d'une chute de merde.

Ensuite, la 2ème semaine, du désespoir et de la peur. J'étais terrorisée à l'idée de plus jamais pouvoir jouer comme avant, de pas pouvoir jouer pour me calmer, j'avais l'impression que j'allais exploser et finir par tout péter si je trouvais pas très vite un moyen de canaliser ma colère. Je l'ai trouvé. L'écriture. J'écrivais tout ce que je ressentais, après ça allait mieux, et les 3/4 du temps je brûlais le papier sur lequel j'avais écrit pour que personne d'autre ne tombe dessus, ça ne regardait que moi.

La 3ème semaine, de l'impatience. Pendant les 3 semaines, j'étais allée à tous les entraînements et tous les matchs et les béquilles et le plâtre ne m'empêchaient absolument pas d'aller sur le terrain et de shooter (même si je me faisais engueuler quand je le faisais parce que c'était « dangereux »), mais j'en avais marre du banc ! J'en avais marre de devoir mettre un sac poubelle autour de ma jambe pour me doucher. J'en avais marre de devoir choisir qui parmi toutes mes keupines allait m'accompagner au self (parce qu'on passait prioritaire quand on avait des béquilles, plus besoin de faire la queue !). J'en avais marre de pas pouvoir marcher sans béquilles. J'en avais marre de pas pouvoir courir. J'en avais marre de pas pouvoir faire de sport (même si du coup je finissais à midi le mardi et à 10h pour reprendre à 13h30 le vendredi). J'en avais tout simplement marre de tout ça !

Enfin, le rendez-vous avec le (gros con de) médecin qui m'avait mis la résine arriva. J'entrai dans la salle, m'installai sur la table qui me rappelait de si bons souvenirs... Il m'expliqua comment il allait l'enlever en me montrant l'instrument sur la photo. Il l'alluma et la fit tourner dans le vide pour m'expliquer. Ça faisait un bruit horrible. Je le regardai complètement effarée et lui dis « vous allez vraiment couper avec ça ?! Mais si vous allez trop loin vous allez me couper la jambe ! ». Il essaya de ma rassurer en me disant que ça ne pouvait pas couper la peau, que c'était prévu pour, qu'il l'avait déjà fait plusieurs fois et qu'il n'y avait jamais eu d'accident, etc... Je ne répondis rien mais dans ma tête je pensais « Prouvez le si ça peut pas couper la peau, faites le sur votre doigt ! », « Il y a une 1ère fois à tout », etc... Bref, je n'étais pas du tout rassurer. Juste avant qu'il commence, je lui ai demandé de ne pas couper sur les dessins autant que possible (bah oui, mes keupines c'était donné à cœur joie de le décorer).

Il découpa (sans couper ma jambe) puis dit à ma mère et à moi de retourner dans la file d'attente parce qu'il fallait que je passe une radio pour vérifier que tout était bien remis. Une fois assise dans la salle d'attente, j'observai ma jambe. Elle était 2 fois plus fine que l'autre c'était flippant ! Je n'osais pas poser le pied par terre de peur de me faire mal, et le médecin me l'avait de toute façon déconseillé tant que je n'avais pas fait la radio.

Après je ne sais combien d'attente, je fis enfin ma radio. La dame qui me l'a faite était gentille, elle bougea ma cheville très doucement pour ne pas me faire mal et me parla pour me détendre. Vous me direz « c'est son travail », sauf qu'il y en a beaucoup qui ne le font pas. Bref, sur la radio tout était normal, elle me dit donc que je pouvais poser mon pied par terre si je le souhaitais. Je descendis de la table, et posai mon pied. Wahou la sensation ! J'avais l'impression de ne jamais avoir posé mon pied par terre ! J'étais surexcitée, je pouvais enfin poser mon pied, j'avais la jambe légère comme une plume (c'est sûr que sans le plâtre ça aide) ! La dame me regardait en souriant, je devais faire la tête d'un bébé qui réussit à faire son 1er pas x). Et moi, comme une conne, j'ai essayé de m'appuyer sur mon pied pour marcher, grave erreur. Heureusement qu'elle me tenait par le bras en souriant, sinon je pense que j'aurais finie par terre. 

Bref, après elle me ramena dans la salle d'attente (j'avais mes béquilles hein) parce qu'il fallait revoir le médecin. Il regarda la radio et me dit comme la dame que tout était remis. Donc tout allait bien, j'allais pouvoir reprendre le sport 3 semaines après (j'étais trop heureuse !). Il ne prescrit pas de rééducation car « tu es jeune, tu réapprendras à marcher toute seule d'ici 1 à 2 semaines ». Effectivement, 6 jours plus tard je laissai tomber les béquilles ! Je les rangeai au fond du placard en rêvant ne plus jamais les revoir !!

Mais certains rêves ne sont pas faits pour être réalisés...

Chronique d'une vie legerement differente des autresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant