La salle de réunion était bondée. Devant moi, s'entremêlaient les costards et tailleurs des personnes qui voulaient se faire bien voir. Derrière, les baskets côtoyaient les jeans de ceux qui n'attendaient plus rien de la société. J'étais assise au milieu de cette foule, vêtue d'un pantalon noir et d'un petit haut blanc, parfait mélange des deux camps de mon entreprise. Comme chaque mois, se tenait la grande réunion où les dirigeants énonçaient les résultats et leurs attentes pour les prochains mois. C'était l'endroit où il fallait être mais surtout, où il fallait être vu. Société du paraître oblige.
Arrivée suffisamment en avance pour ne pas être jugée trop laxiste mais pas assez pour être prise pour une fayote, je m'étais installée, les jambes croisées, le téléphone rangé et prête à subir cette heure à venir qui s'annonçait des plus ennuyeuses.
Moins de deux minutes s'étaient écoulées quand, soudain, je sentis mon téléphone vibrer dans ma poche, signe d'un message entrant. Pour m'occuper, je réfléchissais à l'identité de cette personne, en espérant de tout cœur que ce ne soit pas un SMS publicitaire. Il me semblait impossible que ce soit Clément, trop occupé par son travail et surtout, il n'avait aucune raison de me contacter. Mes amies parlaient exclusivement sur Messenger, à un point tel, que j'avais été obligée de couper les notifications pour éviter que mon téléphone se transforme en vibromasseur. Il ne restait plus qu'une solution : Matthieu.
Une demi-heure devait s'être déjà écoulée depuis la vibration mais je ne pouvais toujours pas regarder le SMS. Cette réunion, ennuyeuse et barbante à souhait, était tellement officielle qu'envoyer un message privé était mal vu. J'avais eu le malheur de tenter l'expérience et le regard des collègues m'avait dissuadé de recommencer.
Les minutes s'égrenèrent lentement et ce SMS commençait à m'obséder. Je n'avais rien d'intéressant pour m'occuper et me distraire. Mes pensées revenaient sans cesse à ce satané message. La fameuse réplique « Avez-vous des questions » me tira de mes songes et annonçait que la première présentation de la réunion était terminée. Cela signifiait que j'aurais moins de trente secondes pour ouvrir mon portable, vérifier le destinataire et peut être même lire le contenu.
J'écoutais attentivement les diverses remarques, toutes plus flatteuses les unes que les autres, de mes collègues assis en face de moi, ne voulant pas perdre l'unique occasion de me changer les idées. J'étais prête, les mains positionnées sur la poche de mon pantalon, en place pour dégainer le téléphone. Quand le silence se fit, que la chaise du deuxième présentateur émit ce léger grincement, je saisis ma chance le plus discrètement possible.
Espérant de tout cœur que ce ne soit pas un vulgaire SMS publicitaire et que je puisse trouver une nouvelle activité pour occuper la prochaine demi-heure, je déverrouillais mon téléphone, retenant, malgré moi, ma respiration. Quand je vis le prénom de Matthieu s'afficher, je poussai un soupir, discrètement. Le contenu du message était clair et sans équivoque : « Peut-on se voir ce soir ? J'ai quelque chose d'important à te dire !».
Le patron de mon agence de voyages venait de s'emparer du micro et commençait, déjà, à égrener les différentes actions qui allaient être mises en place l'année prochaine. Il m'était désormais impossible de répondre à Matthieu et je devais faire disparaître, au fond de ma poche, le plus rapidement possible, l'arme du crime.
Mon esprit tournait en boucle, pendant le reste de la présentation, sur le message de Matthieu. J'essayais, tant bien que mal, de trouver la raison de ce revirement de situation. De quoi voulait-il me parler ? Souhait-il mettre fin à nos rendez-vous ? Non, impossible. Je ne pouvais pas l'envisager. Etait-il enceinte ? Mon cerveau, fatigué, élaborait des possibilités impossibles. Après plus de quarante minutes d'élucubrations diverses et variées, mon esprit se dirigeait vers une hypothèse plus probable : souhait-il me déclarer sa flamme ? Arrête de rêver Emma ! Voulais-je qu'il ait des sentiments pour moi ? Avais-je moi-même des sentiments pour lui ? C'est vrai que dans ton plan...
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Succomber
RomanceEmma avait tout pour être heureuse : un petit copain adorable, un métier correctement payé et une vie paisible à Paris. Cependant, à la fois hantée par son passé et accablée par sa routine quotidienne, elle était, à l'aube de ses 28 ans, à la croisé...