Chapitre 20 - Partie 2

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Emma était partie, définitivement. Elle avait claqué la porte à notre amour, me laissant seul et désespéré. J'avais cru qu'avec elle, tout serait différent. Qu'avec elle, je connaitrais de nouveau cet amour passionnel qui fait battre notre cœur plus fort et nous permet d'avancer. J'étais forcé de constater que j'avais eu tort, je mettais trompé sur toute la ligne.

Tirer un trait sur ma relation, même si elle était fondée sur trop de mensonges et de non-dits, s'annonçait très compliqué. Je ne pouvais pas tourner la page aussi facilement car j'étais tombé amoureux d'Emma. Elle avait chamboulé ma vie calme et ordonnée et avait donné un nouveau souffle sur mon existence. Avec elle, j'avais retrouvé l'espoir. L'espoir d'être aimé un jour.

A 32 ans, j'avais déjà accompli beaucoup de choses. J'avais eu droit à mes succès professionnels et mon entreprise prospérait. J'en étais extrêmement fière. Si, au départ, me lancer sonnait comme une rébellion face à mon père qui avait toujours vécu au crochet des autres, c'était vite devenu vital pour moi. Je voulais prouver au monde entier que, certes j'avais hérité, mais j'étais capable d'accomplir de grandes choses. Aujourd'hui, mon affaire tournait très bien, dégageait de larges bénéfices mais il me manquait la passion du début. C'était devenu une routine plus fastidieuse qu'intéressante.

Cependant, je continuais d'y aller tous les jours, de vivre pour mon entreprise car cela me permettait d'oublier le plus grand échec de ma vie. J'avais tout : l'argent, la vie de rêve, le luxe comme quotidien mais personne avec qui le partagé. Je n'avais presque plus d'amis depuis que je m'étais réfugié dans le travail, huit ans en arrière. Seul mon frère était resté à mes côtés, me soutenant et m'épaulant. Ce que je voulais vraiment, c'était l'amour mais je l'avais encore jamais eu.

Coucher avec une femme différente presque tous les soirs était distrayant, au début. Au fur et à mesure, c'était devenu lassant même si je continuais à apprécier le plaisir physique. Je voulais partager plus avec quelqu'un mais j'avais toujours eu peur. Je m'étais construit une carapace, faite d'une couche de fierté, une d'arrogance et d'impétuosité, pour me protéger. J'avais connu deux échecs sentimentaux qui m'avaient trop détruit pour laisser n'importe qui s'approcher de moi. Jouer l'homme à femme était devenu une routine et le masque avait peu à peu fusionné avec mon visage pour aujourd'hui ne faire qu'un.

Avec Emma, tout était différent. Elle était ma lueur d'espoir dans ce mon gris, la bouée de secours venue me sortir de cet océan de solitude. J'avais porté en elle tous mes espoirs et mes rêves les plus fous. Réalisé que j'étais à ce point tomber amoureux d'elle fut la plus grosse douleur de cette rupture qui n'était, en soit, que la fin de notre contrat.

Quand elle avait tourné les talons ce jour-là, franchis le seuil de la porte sans même un regard en arrière, comme l'avait fait ma mère des années plus tôt, j'étais redevenu l'enfant abandonné et apeuré que j'avais été. J'avais laissé libre cours à mes larmes, me concentrant uniquement sur la perte et la douleur affective. Refusant de sombrer une nouvelle fois dans la dépression, je m'étais réfugié dans le travail.

Les propos d'Emma me revinrent en mémoire que plusieurs jours après son départ. Mon cerveau semblait avoir fait un blocage pour me préserver des conséquences. Elle avait raison, j'avais commis de nombreux crimes et je devais en payer les conséquences. Réaliser toute la douleur, toute la peine et surtout toutes les horreurs dont j'étais responsable sonnait comme le verdict d'un jugement où j'étais, certes coupable, mais pas présent pour me défendre.

Ma condamnation était la vengeance d'Emma, sa perte et surtout ses mots qui résonnaient encore et encore dans ma conscience. Ma peine, j'avais dû me la trouver tout seul : me transformer pour devenir un homme nouveau et enfin accomplir mon rêve dans ma vie, aimer et être aimé.

La première étape consistait à faire le bilan de mes erreurs et de mes crimes. La liste était longue. Beaucoup trop longue. Je tachais des pages et des pages blanches de mon écriture fine et serré. Les mots s'alignèrent et dressèrent de moi un portrait dont je n'étais que peu fier. Emma avait visé juste, je n'étais qu'un connard qui ne méritait pas de connaître à nouveau le bonheur de l'amour.

Ensuite, j'énumérais les réussites dont je pouvais être fier, tous ces éléments qui faisaient de moi un homme bien. Un post-it avait suffi pour les réunir. En tant que personne rationnelle et logique, je fis une analyse la plus objective et sincère possible des éléments que j'avais sous les yeux. Le constat était simple : j'avais eu des succès que je m'étais forcé d'accomplir plus par convention sociale que par réelle conviction. Face à cela, j'étais devenu un monstre car j'avais peur de rouvrir mon cœur et de souffrir à nouveau. Le résultat était sans appel, j'étais passé à côté de ma vie.

Je décidais de créer un nouveau processus afin d'élaborer le Matthieu nouvelle génération, le modèle revu et corrigé, la version 2.0. Faire table rase du passé était ma première étape. J'envoyais des lettres manuscrites et personnalisée à mes neuf victimes, les suppliant de m'excuser et les conjurant de passer à autre chose, surtout pour Alexia. J'entamais un suivi psychologique constant que parler me faisait le plus grand bien.

En parallèle, je m'étais lancé dans la construction de la vie que je voulais. Je déléguais de plus en plus les responsabilités de mon entreprise et tôt ou tard, je l'abandonnerai. M. E. Holding n'avait plus besoin de moi pour survivre. Je m'attelais à une nouvelle carrière, celle que j'avais toujours rêvé. Je me réorientais et débutais une formation dans l'art afin d'ouvrir ma propre galerie. Et puis, pourquoi pas un jour exposer mes propres œuvres ?

Elaborer mon plan de vie pour les années à venir me permit de mettre de côté, tout au long de la journée car souvent elle venait me hanter le soir, les souvenirs d'Emma. Je ne m'étais toujours pas remis de ma rupture avec elle. Je faisais semblant d'aller bien. Je l'avais seulement accepté, ce qui me permettait d'avancer. Au fond de moi, je gardais l'espoir qu'un jour elle retombe dans mes bras et que nous vivions heureux.

Mon processus m'aidait à garder le contrôle de mon existence sans tomber dans la tristesse et le désespoir. J'espérais un jour trouver l'amour réciproque et pourquoi pas fonder une famille. Emma m'avait brisé le cœur et, même si la douleur était toujours aussi vive que le premier jour, elle m'avait permis de changer et de devenir quelqu'un de bien.

En ce premier jour de la nouvelle année, je célébrais le commencement de l'existence que j'avais espéré sans jamais oser. Accompagné de mon frère et de quelques anciens amis avec qui j'avais renoué durant les dernières semaines, je tirais définitivement un trait sur le passé. Tourné vers l'avenir, je serrais contre moi Eva, meilleure copine des premières heures, oubliée puis retrouvée. Je souris aux photographes de la presse people, agglutinés devant les portes de ma boite de nuit pour immortaliser le premier grand évènement de l'année.

Qu'importe les rumeurs qui circuleront dans la presse à scandale dans les prochaines minutes, j'avais retrouvé une dose de joie de vivre, en ce 31 décembre, et je comptais bien en profiter. Mon avenir me souriait et, pour la première fois depuis des années, je voyais une faible lueur au bout du tunnel.

Les articles sur ma possible nouvelle conquête fleuriront sur la toile et je n'en démentirai aucun. Pas parce qu'ils étaient vrais, Eva était lesbienne. Seulement parce que je voulais me débarrasser de cette image d'homme à femmes. Je préférais que le monde entier croit que j'étais en couple car, dans une certaine mesure, je l'étais. J'avais entamé une relation avec l'amour, attendant gentiment que la femme de ma vie, vienne ou revienne dans mes bras.

En cette veille de nouvelle année, mon avenir ne m'avait jamais semblé aussi radieux. Certes mon cœur saignait encore énormément de cette perte et toutes mes blessures n'étaient pas encore soignée. J'espérais toujours retrouver Emma, mais je l'avais accepté, vivant avec plutôt que de perdre mon temps dans un combat inutile.

Dans trois jours, ma nouvelle formation artistique allait débuter et John, mon bras gauche, allait remplacer, mon frère et moi, à la tête de M. E. Holding. Si tout se passait bien, dans un an, j'aurais plus aucun lien avec mon passé et serait, enfin, un homme nouveau. Je deviendrais celui que j'aurais dû être depuis des années, celui qui aurait peut-être pu garder Emma dans ses bras.


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Voilà pour les confessions de Matthieu et ses résolutions pour la nouvelle année.

Je vous mets également le chapitre sur Emma et les conséquences de sa vengeance.

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