Chapitre 19

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Elle regarda sa valise partir sur le tapis avant de retrouver Bill plus loin. Elle crut revivre son départ en juillet après sa semaine de vacances. Il portait le même visage déçu, déformé par la peine et l'abattement de la séparation imminente. Elle-même eut du mal à dissimuler ce trou en train de se creuser de seconde en seconde dans sa poitrine, sondant ses entrailles si douloureusement qu'elle en eut mal dans tout le corps. Elle eut toutefois un très faible rictus en le voyant à l'étroit dans son sweat-shirt, à croire qu'il voulait la garder avec lui même le jour de son départ.

Elle avança vers lui, les lèvres pincées, le regard faussement serein cherchant à rassurer le sien. En vain. Elle approcha une main douce de sa joue qu'elle caressa une seconde avant de venir saisir sa nuque avec tact. Elle se hissa sur la pointe des pieds et colla son front au sien, les paupières closes, le bout de leurs nez en train de se frôler et de les chatouiller. Elle serra doucement ses doigts sur la naissance de ses courts cheveux noirs pendant que les siens vinrent s'échouer sur sa taille comme une caresse. Dans ce simple effleurement, elle lut une multitude de sentiments qui firent frémir sa peau à la manière d'un courant d'air.

« Qu'est-ce que je peux dire pour te consoler ? Demanda-t-elle d'une voix fragile.

- Rien. Il n'y a rien à dire. Il faudrait seulement que tu restes ici, avec moi.

- Tu sais que j'adorerais.

- Hum. Tu vas me manquer jusqu'à Noël.

- Toi aussi. »

Ils restèrent l'un contre l'autre sans un mot de plus, seulement avec la bouche entrouverte et leurs souffles qui se mélangèrent à chaque expiration. Ils savourèrent ce moment de silence. Ils n'entendirent plus rien, plus aucun passager n'exista autour d'eux, ils s'isolèrent totalement dans leur bulle d'amour. Plus rien n'eut d'emprise sur eux. Ni le bruit, ni le temps, ni rien qui pouvait exister dans ce monde.

Juste eux, seuls, unis, sans nulle autre besoin que de se sentir connectés.

« Je vais devoir y aller, déclara-t-elle le cœur lourd.

- Je sais.

- Tu... Tu diras bonjour à Tom de ma part. Et un bon rétablissement.

- Promis.

- Et aussi un remerciement pour m'avoir laissé mes dernières minutes ici avec toi.

- Tu sais, maintenant qu'on est là, sur le point de se quitter, je... Je regrette pour hier. Je veux dire, bien sûr, j'ai besoin de Tom et je dois m'occuper de lui... Et j'ai eu très peur mais... J'ai besoin de te voir jusqu'au dernier moment. Mon cœur en a besoin. »

Elle laissa ses doigts le toucher avec une immense tendresse alors qu'elle décolla leurs fronts pour enfin soulever les paupières et retrouver son regard noisette. Mais au fond, elle ne vit plus les pétillements qui en faisaient le charme.

« On se revoit bientôt, mon amour.

- Oui. À bientôt, ma rêveuse. Bon vol. Et encore merci d'être venue rien que pour moi.

- Oh non, ne me remercie pas, c'était normal. Je le referais sans hésitation.

- Je crois que je ne me suis jamais senti si aimé, c'est... Je ne sais pas comment te dire ça mais... Je me sens invincible quand tu es avec moi. Ou je me sens comme si rien ne pouvait me toucher, rectifia-t-il les traits plus froissés. Tu es comme un bouclier. C'est comme si avec toi, rien n'était grave, que tout pouvait s'arranger. Ah... Je ne sais pas comment dire ça, soupira-t-il exaspéré. Tu me comprends ?

Je veux rêver avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant