Quand le destin s'emmêle / Tome 1 Hot Summer

CHAPITRE 12 / GERALDINE / 19 Août

DIMANCHE 19 AOÛT, 9H00

Suite à ma rupture avec Ian, je me suis bien entendu réfugiée chez les filles hier soir. J'attendais déjà avec mon sac préparé à la va-vite et j'étais assise sur le palier, réfléchissant à cette soirée qui s'est terminée en catastrophe. J'ai enfin sauté le pas et quitté Ian. Bizarrement, je ne me sens ni heureuse, ni malheureuse. En fait, je n'éprouve absolument rien et cette sensation de vide étrange, m'effraie, comme si j'étais dénuée de quelque émotion que ce soit, comme si je n'avais pas vécu moi-même cette soirée mais n'avait été que "spectatrice" de mon propre moi. Je suis arrivée à un stade où la saturation a pris le relais et les sentiments ont déserté. Est-ce que cela fait de moi une personne sans cœur ? Aucune idée. Je suis anesthésiée de toute douleur et je dois avouer que cela me convient parfaitement. 

Ce Daryl par contre ... il a envahi mon esprit. Je souris en repensant à son audace et sa spontanéité. "Tu passes à côté de la chevauchée de ta vie"... mais qui dit ça ?! Un petit fanfaron présomptueux visiblement. Contrairement à l'absence d'émotions à l'égard de Ian, le frère de Matt me perturbe. Je le trouve prétentieux et tellement entreprenant. Et ce trait de caractère n'est pas pour me déplaire... 

C'est Aurore qui est rentrée la première de la soirée, et m'a accueillie les bras ouverts. Nous n'avons pas discuté, les filles savent maintenant comment je fonctionne. Je parlerai de ce qui me tourmente quand je serai prête. Rien ne sert de me harceler de questions, ni d'insister, cela ne ferait que me braquer d'avantage. Quand le moral n'est pas au rendez-vous, je me mure dans un profond silence. Nous n'avons même pas discuté du sujet Matt avec Aurore, ni même de ce Daryl qui m'a fait du rentre-dedans sachant pertinemment que j'ai quelqu'un dans ma vie.
J'ai pensé "j'ai" et non "j'avais"... qu'est ce que cela signifie ? Que je me suis peut-être un peu trop emportée et que cette séparation est un peu poussée à l'extrême ? J'ai agi sous le coup de la colère, j'ai un caractère un peu sanguin par moment. Je prends des décisions radicales sur le coup de l'impulsion. 

Mon amie m'a laissée m'installer sur le canapé du salon, et je me suis vite endormie complètement épuisée sans avoir eu la chance de croiser Sonia. Je n'ai pas versé une seule larme pour Ian, et ne ressens rien mis à part un apaisement intense.

Nous sommes dimanche matin, je me retourne sur le sofa convertible et tape dans cet oreiller quelque peu inconfortable. Quelques bruits de paquets froissés provenant de la cuisine me font me redresser. Sonia est en train de se préparer un petit déjeuner. Je me lève et m'installe nonchalamment sur une des chaises hautes du bar donnant sur la kitchenette ouverte.

— Salut Sonia, lui dis-je pas très bien réveillée. Bien dormi ?

— Non pas vraiment, j'ai très très peu dormi, je suis hyper fatiguée, me répond-elle tout en se servant un café. Tu veux quelque chose ?

— Un jus d'orange frais si tu as, j'ai besoin de vitamines pour affronter Ian aujourd'hui. Un coup de peps.

— Comment ça s'est passé hier soir ?

— J'ai mis un terme à notre relation, lui dis-je sans entrer dans les détails.

— C'est une bonne chose...

Sonia comprend d'office qu'elle ne pourra pas me tirer les vers du nez, je suis complètement hermétique sur ce point. Elle n'insiste donc pas.

— Alors et tes cours de guitare ? Comment ça se passe ?

La seule méthode pour dévier une conversation qui risque de me bouleverser reste le changement de sujet. En général, mes interlocuteurs n'y voient que du feu ... ou bien c'est ce qu'ils veulent me laisser croire. Il est certain que c'est le cas de Sonia. Elle et Aurore lisent en moi comme dans un livre ouvert. Ce matin, je n'ai clairement pas envie de m'attarder sur Ian et ce qu'il s'est passé la veille plus que ça. Le petit debrief qui concerne les déboires de la jolie libanaise avec son professeur de guitare au look sombre et glacial, est bien plus intéressant de toute façon.