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Point de vue Justine.


Alex a beaucoup de boulot, depuis le début de la semaine, il passe quinze heures par jour, à mettre tout en œuvre pour que les affaires continuent, mais j'ai conscience qu'il n'y arrivera pas tout seul.

Nous pourrions simplement tout mettre en vente et se débarrasser de ce problème, mais Alex n'est pas de cet avis. C'est un sujet plutôt épineux, et quand j'ai évoqué qu'éventuellement je pourrais m'occuper de mettre la propriété et le vignoble en vente, il est monté sur ses grands chevaux. Au delà de vouloir conserver les terres dans la famille, Alex est un vrai passionné et je n'ai pas envie de me battre contre lui mais plutôt avec lui. Nous sommes deux et nous devons impérativement trouver une solution à deux.

Et puis, on va pas se mentir, c'est une activité qui rapporte beaucoup d'argent, même si avec ce que notre père nous à léguer, nous sommes à l'abris pour au moins cinq générations, je comprends Alex, c'est en quelque sorte génétique, il a du vin qui coule dans les veines, alors lui demander de dire adieu à tout ça, ce serait comme me demander de mettre un terme à ma carrière de journaliste.

« Mettre un terme à ma carrière de journaliste » cette dernière petite phrase aussi anodine soit elle, ne cesse de résonner dans ma tête, toute une partie de la nuit, m'empêchant de dormir. Si bien qu'au petit matin, devant ma tasse de café, tout devient limpide, je finis même par me persuader que c'est peut être la seule vraie solution. Si je décidais là maintenant d'arrêter, si je mettais entre parenthèses mon métier, si je restai ici pour aider Alex, il m'apprendrait toutes les ficelles du métier, il serait mon bras droit, la tête pensante. Ça ne semble pas si compliqué. Papa gérait toute la partie relation clientèle, je pourrais à mon tour m'occuper de ça, ça ne doit pas être si éloigné du journalisme.

Je m'apprête à sortir de la cuisine, ma brillante idée en tête, quand justement le voilà.

- Vas-y entre, fais comme chez toi. Je dis à mon frère en lui faisant un clin d'œil.

- Tu n'aurais pas des capsules Nespresso ? J'ai besoin de caféine.

- Dans le tiroir de gauche, devant toi, Hep, pas si vite, j'ai une nouvelle à t'annoncer. Je te fais une tasse, assieds toi.

Je sens le regard d'Alex braqué sur moi, je me retourne et observe son attitude, son comportement, l'expression de son visage. Il a les traits tendus, des cernes sous les yeux, les cheveux gras, et sa tenue...on en parle de sa tenue ? Lui qui est toujours tiré à quatre épingles, il se contente d'un vieux sweat-shirt à capuche "I love New York" et d'un treillis de l'armée. Ça fait trois jours qu'on a enterré notre père et depuis, il se laisse complètement aller.

- Je vais démissionner et je vais travailler ici avec toi. Je lui annonce un grand sourire aux lèvres.

- N'importe quoi. Pouffe-t-il. Je peux quand même pas te demander une chose pareille.

- Ce n'est pas toi qui me le demandes. C'est mon choix. J'ai envie de t'aider, regarde toi, tu ne peux pas être au four et au moulin. Tu vas y laisser ta santé. Et puis tu ne me feras pas changer d'avis, ma décision est prise.

- T'es sérieuse ou c'est encore une de tes lubies ? Me demande-t-il, en arquant un sourcil.

- Je suis très sérieuse Monsieur de mauvaise humeur, j'y ai pensé toute la nuit. Y a plus que toi et moi maintenant. Je lui dis nostalgique, en regardant la photo au mur : Papa, maman, Alex et moi, à l'époque où nous étions une famille. Ca n'a pas duré longtemps.

- Ok et tu l'as annoncé à ton patron ?

- Pas encore, je vais aller le voir aujourd'hui pour lui remettre ma lettre de démission en mains propres. Je vais faire en sorte qu'il annule mon préavis de 3 mois. J'aimerai être opérationnelle le plus rapidement possible.

Seule, face à luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant