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Point de vue Justine.

Aujourd'hui j'ai déclenché le plan vigie-pétasse, et après avoir passé en revue toutes les robes de mon dressing pour finalement constater que je n'ai aucune tenue appropriée pour ce soir, en même temps, le contraire m'aurait étonnée. J'ai donc été contrainte de me rendre dans les rues piétonnes du centre ville où sont regroupés la plupart des magasins de fringues en vogues. Rien de tel qu'un après-midi shopping pour égayer ma journée. Cela m'a fait le plus grand bien, le shopping est reconnu pour ses vertus thérapeutique qui agissent instantanément sur le moral. En plus, j'ai dégoté la parfaite robe de pouffe pour ma sortie de ce soir. On est vendredi et je suis bien décidée à me rendre dans ce club, histoire de me changer radicalement les idées, car j'en ai vraiment besoin.

Lorsque j'ai dit à François que je comptais m'y rendre aujourd'hui, il n'a pas pu masquer son mécontentement. C'est sûr qu'après m'avoir fait des révélations sur l'affaire « GARNIER/DE LATOUR », c'est comme ça qu'ils l'appellent dans les journaux, il a bien vu que je n'étais pas au max de ma forme. Il a insisté pour m'accompagner, ce que j'ai immédiatement refusé, hors de question de risquer de tout faire capoter, je n'ai pas besoin d'un chaperon.

Il est 22h00 lorsque le taxi me dépose devant l'entrée du club, parée pour ma mission.

Je suis maquillée à outrance, je porte une robe rose flashy qui colle parfaitement à l'endroit et à mes courbes, 12 centimètres de talons, et un soutien-gorge Wonderbra. Ma panoplie à l'air de faire son petit effet, je me suis déjà fait accoster par un type, vous savez le genre champion du monde de la lourdeur.

Après mettre débarrassée de lui en douceur, je me dirige d'un pas vif vers l'entrée et fais la grimace lorsque je vois la longueur de la queue.

20 minutes plus tard et deux orteils en moins, je suis enfin à l'intérieur, il faut que j'arrive à masquer mon expression de parfaite intruse, sinon je vais finir par me faire repérer. Je m'assois au bar et commande de quoi me donner du courage, ça ira mieux une fois avoir ingurgité 3 ou 4 verres. Pendant ce temps, j'en profite pour observer discrètement les filles qui servent au bar et première constatation, bien qu'elles soient toutes très maquillées, elles ont l'air, vraiment très jeunes.

J'engage la conversation avec l'une d'entre elles, une blonde aux yeux bleus, plutôt jolie, rapidement elle me donne son prénom, Svetlana, elle doit avoir 16 ou 17 ans tout au plus, et ne parle pas très bien notre langue. Elle n'est pas très docile, et reste méfiante à mon égard, j'arrive néanmoins petit à petit à instaurer un semblant de dialogue et un climat de confiance.

Ca fait maintenant trois quarts d'heure que je suis installée au bar et elle semble avoir trouvé enfin parfaitement confiance en moi. Je la questionne et espère qu'elle va me donner deux trois tuyaux sur le fonctionnement du club tout en lui montrant que je suis très motivée et que j'ai envie de travailler ici. Elle finit par me filer un nom, celui du boss et me le montre discrètement, il est là, une sorte de molosse en costard, affichant clairement que c'est lui le patron. Il est affalé dans un de ces fauteuils rouges en velours avec 3 filles à moitiés nues affalées sur lui.

Il s'appelle Grichka, juste Grichka à t-elle précisée et à première vue, il n'a pas l'air très commode le ruskov. Je prends discrètement quelques photos avec mon Smartphone.

Il faut que je trouve un moyen de l'accoster avant d'être trop saoule pour pouvoir le faire, le ton enjoué et enthousiaste dont je n'arrive à me défaire est la preuve que j'ai assez bu pour la soirée et pourtant je ne suis pas contre un autre verre et ingurgite d'une traite, la vodka que me tend Svetlana.

Je me lève de mon tabouret en titubant et m'approche presque hilare du type en question, il est bien trop occupé avec son harem pour remarquer ma présence, je suis plantée devant lui à espérer qu'il me remarque enfin.

- Qu'est ce que t'as à me regarder comme ça toi, tu veux ma photo ? Finit-il par me dire, avec sarcasme.

- Je souhaiterai vous parler. Dis-je, en criant presque, pour qu'il m'entende.

- Et pourquoi j'accepterai de te parler ? Me demande t-il, toujours avec le même accent russe très prononcé.

- Je cherche un job et j'ai entendu dire, que vous cherchiez des filles, si vous voyez ce que je veux dire.

- Viens par là.

J'ai apparemment réussie à capter son attention puisqu'il se lève brusquement en éjectant au passage les pauvres filles agglutinées autour de lui.

Il m'attrape par le bras, je le suis sans broncher, masquant toute trace de nervosité, on traverse tout le club, emprunte un escalier assez étroit, puis nous arrivons devant une porte où se tiennent deux gardes du corps. Grichka leur fait un petit signe, les gars s'écartent pour nous laisser passer.

On rentre à l'intérieur d'une pièce qui ressemble à un bureau, il y a des vitres sans teint sur tous les murs, d'ici on peut voir facilement tout ce qui se passe en bas, en toute discrétion.

- Bon alors ma jolie, comme ça, tu cherches du boulot.

- Oui c'est exact.

- Comment tu as entendu parler de mon club ? Me demande t-il, d'une voix sifflante, mais assez forte pour que je puisse l'entendre.

- Une amie à moi travaille ici. Je lui réponds, la voix légèrement tremblante.

- Tiens donc et comment s'appelle ton amie.

- Euh, elle s'appelle Svetlana.

- Ok, déshabille-toi. Me lance t-il, subitement, en allumant un cigare.

Ça se complique.

Si je veux être crédible, j'ai plutôt intérêt de faire ce qu'il me dit sans sourciller, heureusement que je ne suis pas dans mon état normal, l'alcool ça aide à se désinhiber, c'est bien connu.

J'enlève ma robe sans frémir, il m'examine sous toutes les coutures, ce sale porc me dégoûte, il a cette façon de me consommer rien qu'en me regardant, il en baverait presque.

- Tourne un peu que je te regarde ? T'as tout ce qu'il faut, là ou il faut, mais je te trouve un peu vieille.

Vieille, non mais il est sérieux là, bon c'est sûr que comparé aux filles qui se trémoussent sur la piste, j'ai carrément l'air d'une mamie, mais je suis pas trop mal foutue. Je le regarde toujours avec mon sourire de niaise, comme-ci sa remarque ne m'avait pas affectée.

- Bon écoute, ce que je te propose c'est de faire un essai, je te laisse une petite heure pour m'en mettre plein la vue, sois audacieuse, sensuelle et surtout chaude comme la braise, dans une heure, on fait les calculs.

Je ne sais pas trop quoi répondre, d'autant que je n'ai pas les idées très claires, je suis maintenant partagée entre la volonté de mener à bien cette mission, je suis si prêt du but et courir à toute enjambée. Je me mets à me poser tout un tas de questions mais pas le temps de tergiverser.

Sans me laisser l'opportunité de répondre quoi que ce soit, il m'attrape par les épaules et me pousse dans une pièce qui jouxte son bureau.

- Change-toi. M'ordonne t-il.

Je jette un rapide coup d'œil autour de moi, ce n'est surtout pas le moment de flancher, on se trouve dans une espèce de cabine d'essayage géante avec des sous vêtements à disposition et en gros si j'ai bien compris et pour faire bref, j'ai le choix entre un string en cuir ou un string en skaï, vraiment pas drôle ce jeu.

J'ai la gorge sèche et il me semble même avoir des frissons malgré le taux élevé d'alcool dans mon sang, Je me tourne légèrement vers lui et le regarde toujours avec le même sourire comme ci j'étais vraiment heureuse d'être là.

Danser une heure à moitié nue ce n'est pas sorcier, il y a vraiment pas de quoi se mettre dans cet état, hein Justine. Me dit ma petite voix intérieure.

Alors que la honte vient définitivement de s'emparer de moi, il est temps pour moi de montrer mes talents de stripteaseuse, sauf que je n'ai jamais fait ça de ma vie, enfin si une fois, à l'enterrement de vie de jeune de fille de Clara, une copine à moi. D'après elle, je ne me débrouillais pas trop mal.

- Allez vas-y. Oh fait, c'est quoi ton petit nom ? Me demande t-il, en me mettant une main aux fesses.

- Amy, bafouillé-je.

- Parfait, Amy en piste.

Alors que l'état de honte dans lequel je me trouve a atteint son paroxysme. C'est certainement le moment le plus humiliant que j'ai vécu jusqu'ici. Je fixe un point au loin et imagine que je suis n'importe où, sauf ici, le compte à rebours a commencé, 3, 2, 1 la musique démarre.

Je me prête à l'exercice périlleux auquel je suis soumise maintenant, comme ci ma vie en dépendait et surprise, je me débrouille plutôt pas mal, on dirait presque que c'est ma seconde passion. Je me déhanche sensuellement, le plus naturellement possible au rythme de la musique, parvenant presque à oublier que je suis presque nue et que des dizaines d'individus ont les yeux braqués sur moi.

Lorsque la musique se stoppe enfin, je suis en nage et le sol devant moi est recouvert de billets de banque, Grichka me fait signe de le rejoindre, affichant un sourire de gros patron pervers.

- A quoi est-ce que vous jouez ? Me crie un type hystérique dans les oreilles.

Même avec le brouhaha ambiant, je reconnaitrai le timbre de cette voix parmi cent autres. Je me retourne et me retrouve face à lui :

Oh mon dieu pas lui, pas ici, pas maintenant, la poisse.

- Valentin, mais qu'est ce que vous fichez ici ? M'écrie-je, tout en essayant de cacher ma nudité.

- Qu'est ce que vous êtes bonne comme ça, j'ai eu un doute, mais c'est bien vous.

- Taisez-vous un peu, vous allez tout fiche en l'air.

Valentin est ivre, il faut que je m'éloigne de lui rapidement avant qu'il ne fasse tout capoter.

Pourquoi diable, faut-il toujours, qu'il se retrouve sur mon chemin. Après cette humiliation level 999, je n'ai envie que d'une seule chose, sauter dans ma robe, aussi ridicule soit elle.

J'avance vers Grichka qui est à l'écart, brandissant une liasse de billet.

- 475 euros en même pas une heure, Amy, tu es remarquable, tu n'as pas froid aux yeux, tu es exactement le style de fille que je recherche. Tu peux revenir demain soir.

- Parfait, vous allez me faire signer un contrat ? Demandé-je, le plus naïvement possible.

- Pas de contrat ici, Me répond-il en riant, comme ci j'avais dit une énormité. Je te paye en liquide à la fin de la soirée, c'est comme ça que ça marche, c'est à prendre ou à laisser ma jolie.

Je ne discute pas, j'empoche les quelques euros qu'il me tend, une misère, et fais comme ci j'étais ravie. Je suis satisfaite de voir que je n'ai pas fait tout ça pour rien, je suis désormais sûre d'une chose, pas de contrat de travail, pas déclarée.

J'ai enfin remis ma robe, même si elle est ultra voyante, hyper moulante et super courte et que c'est définitivement la tenue la plus ridicule qu'il m'ait été donné de porter, qu'est ce que je me sens bien dedans.

Je fais un rapide détour par les toilettes, mon maquillage a coulé et avec tout ce que j'ai ingurgité, j'ai ma vessie qui va exploser. Je trouve cette soirée interminable et je suis loin d'avoir terminée, il faut impérativement que j'en sache plus sur cette histoire de prostitution.

Danser presque nue, check, mais me prostituer, faut pas pousser quand même, il va donc falloir que je trouve une parade pour m'introduire dans ce cercle très fermé et que j'utilise ma curiosité à bon escient.

- Ma parole Valentin vous me suivez ou quoi ? Je sursaute en voyant cet imbécile qui me regarde comme-ci j'étais un objet sexuel.

Je me place devant lui, il a ce don incroyable de me déstabiliser. Ses yeux verts me transpercent.

- Justine vous avez bu ?

C'est l'hôpital qui se fout de la charité.

- Je me demande bien qui de nous deux, a le plus bu.

- Depuis quand vous jouez les pouffiasses ?

Il est hors de question que je lui dise pourquoi je suis là et qu'on fasse copinage, surtout pas après son petit numéro de l'autre jour, chez lui et la baffe monumentale qu'il m'a mise.

Je m'assois au bar, génial, on dirait que monsieur beau gosse, alias super glue a décidé de finir la soirée en ma compagnie.

- Une Vodka citron Svetlana, s'il te plait.

- Une deuxième. Dit-il, avec un air d'ahuri, en s'adressant à elle.

- Non rien pour lui, il a suffisamment bu pour ce soir.

J'ai un mal de crâne d'une intensité qui m'est étrangère, j'ai chaud, très chaud, je ferme les yeux quelques instants, essayant d'oublier tout ce qui vient de se passer et surtout le bruit environnant. Mes pensées sont confuses et je me sens toute engourdie, comme ci je me retrouvais dans l'incapacité de raisonner comme je le fais quotidiennement.

- Bon alors, vous me dites ce que vous faites ici, ou c'est secret d'état ? Me demande t-il en attrapant ma main.

- Et vous, vous faites quoi ici ? Vous êtes un habitué ? Est ce qu'il vous arrive de coucher avec des filles mineures ?

- Hey ho, on se calme, c'est quoi, un interrogatoire ? Vous voyez la blonde là-bas contre le mur avec la robe rouge. Me chuchote t-il à l'oreille, je me la suis faite et la grande brune là bas, c'était il y a quinze jours dans les toilettes. Et elle....

- Taisez-vous, j'en ai assez entendu, l'alcool vous rend vraiment très con.

Zut, je suis en train de réaliser que j'ai oublié mon sac à main dans la pièce où je me suis changée. Quelle idiote, j'ai intérêt à le récupérer avant que Grichka où un de ses hommes de mains ne le subtilisent et ne découvre ma véritable identité.

- Valentin, payez mon verre, je vous rembourse dans 5 minutes, j'ai oublié mon sac, je reviens tout de suite.

Je me lève et traverse le club, pour rejoindre la cage d'escalier que j'ai emprunté toute à l'heure pour monter à l'étage, et j'ai comme la désagréable impression que deux types me suivent. Ça m'a tout l'air d'être les deux molosses qui étaient devant le bureau de Grichka. J'ai remarqué leur présence dans le couloir des toilettes, et ils étaient au bar au même moment que moi et maintenant ils sont là, juste derrière moi. Ou je deviens parano, ou ils me suivent.

Je fais comme ci de rien n'était et rentre dans la pièce, ouf, mon sac est toujours là, je sors mon téléphone et en profite pour faire quelques photos.

Je regarde à droite, à gauche, la voie est libre, les deux types ne sont plus là, ce que je m'apprête à faire, n'est pas sans danger, mais quitte à être là, autant en profiter.

Je décide de m'aventurer derrière une porte où il est inscrit : « Accès réservé aux personnes autorisées » ok, voyons ce qu'il se cache derrière.

Je me retrouve au centre d'un long couloir tapissé de moquette rouge sur le sol et sur les murs, ambiance feutrée, plusieurs portes avec notées sur chacune d'entre elles, salon V.I.P n° 1, n° 2 etc... je fais un rapide calcule, 12 salons en tout.

- Amy, on dirait que tu t'es perdue ?

Grichka et ses deux acolytes, merde, il ne manquait plus qu'eux.

- Effectivement, je me suis égarée en voulant récupérer mon sac à main. Je lui dis, ayant l'air aussi convaincant que possible.

- Tu tombes bien, un de nos très bon client t'as vu danser et il est complètement sous le charme, il t'attend dans le salon n° 4, ne le déçoit pas.

Eh voilà, à force de jouer avec le feu, on fini par se bruler, je fais ce qu'il me dit et m'avance devant la porte n°4, arborant mon plus joli sourire.

Je ne me sens pas très fière, je rentre à l'intérieur sans frapper, un vieux pervers m'attend complètement à poil, le sexe en érection, telle une bête en rut couché sur un lit, vision d'horreur, « Paranormal Activity 5 » à côté c'est du pipi de chat.

Je sens que je ne vais pas tarder à vomir, ce spectacle me donne la nausée.

J'observe rapidement la pièce qui tournoie autour de moi, toute la déco est très explicite, il s'agit là d'une espèce de chambre que les clients utilisent à des fins sexuelles, il y a tout un tas d'accessoires, une table, un mini bar. Il y a même un écran de télévision qui diffuse un film porno.

- Amy ma jolie, viens donc par là.

Il est hors de question que je fasse quoi que ce soit à ce gros dégueulasse. Je n'ai pas de plan B, vite, il me faut un plan B.

- Attends un peu chéri, pas si vite, je vais d'abord te bandez les yeux, ça m'excite. Je lui dis de ma voix sensuelle, pour essayer de gagner du temps.

Le type n'a pas l'air contre, au contraire ça a même l'air de l'emballer, il arbore, une expression de vicelard puissance 10, je m'empare du bandeau et m'approche de lui pour lui mettre sur les yeux.

Je sors mon téléphone de mon sac et fais un max de photo.

- Alors, ça vient, j'ai dépensé un sacré paquet de fric pour t'avoir et je compte bien en avoir pour mon argent.

- Ca arrive, patience chéri.

Voilà, j'ai tout ce dont j'ai besoin, même un enregistrement, avec ça, le ruskov, il est cuit.

Je sors aussi rapidement que possible de la pièce et rejoins le bar où Valentin m'attend toujours en train de se noyer dans un verre de vodka.

Il est mon dernier espoir, je l'attrape précipitamment par la main, et lui dit de me suivre sans plus d'explication, il semble surpris, mais se lève sans manifester la moindre opposition.

- Il faut faire vite, vous avez une voiture ?

- Euh oui, ma caisse est garée là, sur le parking.

- Dépêchez vous, donnez-moi les clés, vite.

- Il est hors de question qu'une gonzesse conduise ma bagnole, ok.

Je m'installe au volant de la voiture de Valentin sans trop lui laisser le choix et démarre sur les chapeaux de roue, de nous deux, je suis sans conteste, la plus apte à conduire.

- Faites attention bordel, vous roulez trop à droite. Pourquoi est ce qu'on s'échappe comme des voleurs ?

Il est tellement saoul qu'il a fini par s'endormir, au moins je n'aurai plus à subir ses réflexions sur ma conduite. Je roule depuis 15 bonnes minutes quand soudain il me semble avoir roulée sur quelque chose, je m'arrête sur le bas côté, je sors de la voiture et constate avec désarroi que j'ai crevée. C'est bien ma veine, Valentin va être dans une colère noire.

- Valentin, réveillez vous. Je lui mets un bon coup de coude dans les côtes, il réagit et sort de son sommeil. On a crevée. Je m'écrie, en cherchant une lampe dans la boite à gants.

- Comment ça on a crevé et qu'est ce que vous foutez au volant de ma caisse ?

- Vous n'êtes pas en état de la conduire, ça semble pourtant évident non ?

- Putain, mais ce n'est pas vrai, dégagez de ce volant.

- Au lieu de râler pour ne rien dire, vous ne voulez pas vous activez un peu.

- Y a pas de roue.

- Comment ça, il n'y a pas de roue ?

- J'ai déjà crevé le mois dernier et je n'ai pas encore fait réparer la roue, c'est vraiment trop con. Me dit-il en ricanant comme un débile.

- Vous vous foutez de moi, on va mourir ici congelé. Allez, un peu d'entrain, je veux bien vous aidez, mais je n'ai jamais changé une roue de ma vie.

- Putain, mais vous n'êtes pas blonde pourtant, je vous dis qu'il n'y a pas de roue. Me dit-il, sèchement, cette fois-ci.

Merde, merde et re-merde, il est vraiment sérieux là, quelle poisse, ce n'est pas vrai.

Je tiens ma tête entre mes mains, l'air dépité pendant que Valentin sort de la voiture pour examiner l'état de sa roue. Il revient en s'agitant frénétiquement.

- Bravo, ma jante alu est complètement foutue, il faut changer les 4, je vous l'avais dit que vous rouliez trop à droite, vous avez le permis au moins ? Me lance t-il, en tapant violemment sur le tableau de bord.

Au ton de sa voix, je comprends immédiatement que je viens de faire la connerie du siècle.

- Hey ho, on se calme, je vous les rembourserai vos jantes, je vais même vous les rembourser immédiatement. J'attrape mon sac à main qui se trouve à ses pieds et sort un stylo et mon chéquier.

Valentin se met à éclater de rire :

- Qu'est ce que vous êtes bandante, quand vous vous énervez. Me dit-il en me fixant. Touchez, je suis comme un dingue depuis que je vous ai vu sur la piste, les seins à l'air. Rajoute t-il, en prenant ma main et en la posant sur son entre-jambe. Oh fait, vous ne m'avez toujours pas dit ce que vous faisiez là-bas.

Je laisse ma main une fraction de seconde sur la bosse dure et chaude, puis la retire comme ci je venais de me brûler, je me sens rougir de honte, je respire profondément, l'air de rien, essayant de garder mon sérieux et de ne surtout pas lui montrer que je suis troublée par son comportement. Il est ivre, il ne sait pas ce qu'il fait. Je réponds tout de même à sa question.

- J'étais là, pour mon travail, une sorte de mission.

- Ouais, carrément, une mission suicide.

- Je dois écrire un article sur ce club, le patron fait travailler des filles sans les déclarer, mineures pour la plupart, sans papiers et il les oblige à se prostituer, et si elles ne font pas ce qu'il leur dit, il les renvoi dans leur pays. Ça fait longtemps que vous fréquentez cet endroit ?

- Euh, à peu près 2 ans, je dirais, pourquoi ?

- Et bien sûr, vous n'étiez au courant de rien ?

- Ben j'avais bien remarqué que certaines étaient plus jeunes que d'autres, mais ça ne m'a jamais vraiment dérangé.

- Quand vous couchiez avec ces pauvres filles, vous ne remarquiez pas leur détresse, jamais vous vous disiez, il y a un truc qui cloche ?

- Vous rigolez, elles se battaient toutes pour moi.

- Comme vous êtes prétentieux, ma parole, vous n'avez pas honte. Je m'indigne, en laissant échapper un petit rire. Jamais, on peut avoir une conversation sérieuse avec vous ?

- Vous appelez qui à cette heure-ci ?

- Votre assurance... on va quand même pas coucher ici... il est noté sur votre talon, « assistance 24h/24 », c'est le moment de vérifier non ?

- Pas mal le coup de la panne, me souffle t'il à l'oreille, le visage à quelques centimètres du mien. Par contre vous auriez pu épargner mes jantes. Rajoute-t-il, en me toisant du regard.

Je le fixe, en me demandant ce que je pouvais bien faire dans sa voiture à cette heure de la nuit, au beau milieu de nulle part. Je m'enfonce dans mon siège et regarde par la vitre, je n'ai plus envie d'essayer de dialoguer avec lui, toute tentative de discussion se termine par un échec. Je me contente donc d'attendre en silence, la dépanneuse, qui ne devrait pas tarder à arriver. Sa présence à mes côtés et cette proximité entre nous, me rend très nerveuse, alors que lui, ça à plutôt l'air de l'amuser.

Deux bonnes heures plus tard, nous arrivons devant la grande bâtisse en pierre, le vent glacial vient s'écraser sur mes joues, je ne peux m'empêcher de frissonner alors que Valentin continue de m'observer sans rien dire, comme si il venait de prendre conscience que je me trouve en cet instant, sur le seuil de sa porte d'entrée à attendre désespérément qu'il m'invite à rentrer. J'ai l'étrange impression que ce moment si particulier, dure une éternité.

Lorsqu'il fait enfin un pas en ma direction, comme animé par une pulsion soudaine, je ne sais absolument pas comment réagir. Mais j'ai comme l'impression que peut importe ma décision, je suis en train de faire une énorme connerie.

Seule, face à luiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant