31.2. Sweet lie

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MIKA

Vous savez quoi ? Je pense que je préférerais qu'on m'arrache un bras plutôt que d'être complètement invisible à ses yeux.

Le cœur battant, je m'installe dans mon siège en posant mon sac à dos à mes pieds.
Liam m'a pris un fauteuil à côté de l'hublot, comme je les aime, puisque je lui avais dit, il y a deux jours, que je voulais terminer mon dessin dans l'avion si je n'avais pas le temps de l'achever avant de partir pour les fêtes. La gorge serrée, je l'observe rentrer son bagage et celui de Daren dans le compartiment au-dessus de nos têtes avant de s'asseoir à son tour à côté de moi sans dire un mot.

Son expression est neutre contre toute attente, ses gestes lorsqu'il sort ses écouteurs sans fil de ses poches, aussi méthodiques que calmes et il ne me parle que lorsque c'est nécessaire. Et si Daren, qui s'installe à son tour dans le siège devant le mien, l'a remarqué, il n'essaie pas d'arranger quoi que ce soit entre nous.
J'attache ma ceinture et la serre comme il me l'avait appris en faisant appel à tout mon self-control pour ne pas fondre en larmes en lui implorant son pardon. Il ne veut pas parler, ça, il me l'a clairement fait comprendre.

Après en avoir... fini avec William, je suis revenue à l'appartement où mon frère avait déjà fini de remplir ma valise de l'essentiel pour deux semaines chez les parents.
Liam était en train de prendre une douche.

L'hôtesse de l'air qui débute son discours habituel me sort de mes pensées. Je l'observe vaguement gesticuler à l'avant et me tourne vers Liam avec discrétion pour le regarder à la dérobée.
Il a fermé les yeux et a appuyé l'arrière de sa tête contre le repose-tête, les bras croisés sur son torse. Ses cils froment des croissants sombres sur ses pommettes hautes. Ses écouteurs dans les oreilles, il est complètement détaché de l'univers.

Complètement détaché de moi.

Je prends une inspiration nerveuse en ouvrant mon sac pour en extraire mon carnet de dessin et mes fusains. Je m'appuie contre le hublot et laisse mon regard se perdre dehors en essayant de vider mon esprit pour réussir à dessiner sans avoir les mains qui tremblent et les yeux pleins d'eau. J'ai trois heures d'avion pour me ressaisir et terminer ce dessin, mais je pense bien que ce sera peine perdue.
Mon inspiration est figée et mes doigts sont incapables d'effectuer une ligne droite.

Alors que le pilote annonce le départ, je m'enfonce dans mon siège en ramenant mes genoux contre ma poitrine. Je vérifie l'heure sur mon téléphone une dernière fois dans un soupir tremblant avant de m'obliger à ouvrir mon cahier et de contempler l'esquisse à-moitié complétée. J'estompe de mon mieux quelques traits grossiers du bout de l'index alors que l'avion se met en route sans tarder et je m'efforce de sortir une tige de fusain et de dessiner.

Liam qui remue près de moi me fait presque échapper mon matériel et sa voix rauque lorsqu'il s'adresse à Daren qui s'est retourné à moitié pour jeter un œil inquiet, mais résigné sur nous. S'il a eu quelque chose à dire, depuis ces trois heures où nous sommes à l'aéroport, il en parlait à mon frère qui me communiquait ensuite les informations.
Il refuse catégoriquement de s'adresser à moi et ça me brise le cœur.

Sauf que je le mérite. Je le mérite amplement.

Il a le droit d'être vexé. Pire que ça : en colère.
Je n'ai pas été juste avec lui et ce qui est arrivé ce matin ne fait que renforcer cette affirmation. Si je lui avoue que nos lèvres se sont touchées, à William et moi, même si que ce n'est arrivé que pour une fraction de seconde et par accident, cela ne fera que creuser le gouffre qui nous sépare davantage.

Sixty Shades of a Unicorn - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant