38.3. Se laisser tenter

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je pense que j'écris vite.
un tout-mini peu.

***

DAREN

Je me tape une bonne barre d'une minute où la couleur de ses joues devient cramoisie et qu'elle me regarde avec un sourire penaud.
Bordel, j'hallucine.

— Donc... tu as découvert que tu étais allergique quand-

— Je-

— Tu-

— Ma première fois. Ouais. Un 24 décembre 2011 où nos familles fêtaient ensemble. Je suis allée à l'hôpital durant une semaine et l'Angleterre entière a su que j'avais perdu ma virginité avec le fils du photographe de la reine. Tu sais que j'ai failli mourir ?

Je crois que je suis à deux doigts de pleurer de rire.

— Mais... du coup, tu fais comment ?

Elle remue dans le canapé, mal à l'aise, avant d'hausser les épaules :

— J'ai un vibromasseur rose ?

OK, je pleure.

J'en viens au point où j'ai tellement mal au ventre que je m'allonge sur le canapé pour essayer de maîtriser mon hilarité au prix d'un grand effort qui ne m'aide quand même pas. Elisabeth se met à pouffer avec moi la seconde qui suit jusqu'à ce que nous ne ressemblions plus qu'à deux fous hystériques, pour aucune raison cohérente. Mes larmes coulent le long de mes tempes et échouent sur le canapé sous ma tête et mes mains tiennent mon abdomen douloureux.
Je crois que nous sommes légèrement immatures. Légèrement.

Les yeux embués et la mâchoire douloureuse à force de rire, Eli se met debout en titubant, attrapant son verre vide et la bouteille de cidre à-moitié terminée. Un sourire énorme lui fend le visage et c'est les joues roses de plaisir qu'elle me demande :

— Tu veux boire quelque chose ? J'aurais dû te le demander depuis longtemps.

— Juste de l'eau, marmonné-je entre mes tentatives pour recouvrer une respiration normale.

— D'accord.

J'attrape un mouchoir sur la table basse en verre pour m'essuyer les yeux et les tempes en me raclant la gorge, un sourire idiot sur les lèvres lorsqu'elle revient vers moi avec un verre d'eau froide et limpide ainsi qu'une coupe de rosé qu'elle sirote ensuite en se rasseyant à sa place, en pinçant les lèvres, presque à contrecœur.

On vient, en réalité, de partager quelque chose dont nous ne mesurons pas la portée.
Et même si c'est trop intime, ma curiosité me tenaille alors je continue de poser des questions :

— Donc, tu ne couches plus avec personne ?

Elle secoue la tête en prenant une longue rasade de son vin.

— Je ne fais pas confiance. Et... on m'a dit que les préservatifs sans latex ne sont pas très solides. Je ne veux pas tomber enceinte et je ne veux pas choper une MST.

— Sage décision, Soeur Elisabeth.

Babeth me tire la langue avec défi et je ris en appuyant mon dos contre le dossier du canapé. Un silence confortable s'installe entre nous durant lequel je vide le verre d'eau et qu'elle pense à quelque chose dont je n'ai aucune idée. Lorsqu'elle réfléchit, elle a tout le temps ce léger pli entre les sourcils qui se creuse.
C'est subtile, mais je l'ai remarqué.
Je m'installe confortablement en attendant qu'elle trouve quelque chose à dire, me calant contre les coussins, moi aussi, tandis que ses yeux sont perdus dans le vide.

Sixty Shades of a Unicorn - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant