37.2. Sens dessus-dessous

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LIAM

— Putain, mais t'es gay ou quoi ?

— Ta gueule et viens.

Colin tente d'agripper mes jambes de manière très questionnable et de me soulever sur son épaule pour m'obliger à sortir. Je le plaque au sol juste avant qu'il ne réussisse au risque d'ameuter tout l'appartement tandis qu'il pousse un hurlement de guerre guttural en me tirant à sa suite. Je tombe comme une merde sur lui, grogne en me cognant violemment le coude contre le mur et m'essuie une claque retentissante derrière la tête lorsque je lui donne un coup de genou involontaire tout près de ses bijoux de famille.
Chaque fois que j'essaie de lui échapper en rampant, il me retient par les jambes, bien décidé à me faire voir la rue malgré moi. Puis, découragé, je finis par abandonner en me roulant sur le côté et reste couché à plat dos sur le plancher, tandis qu'il rit, fier de lui.

— Je n'ai pas vraiment envie de sortir, Colin.

— Et est-ce que je suis là pour respecter tes envies ? Non.

Je lui jette un regard mi-agacé mi-amusé.

— T'es une plaie, bordel.

— Je sais. Mais t'aimes ça.

Il se remet sur pied en moins de deux et remonte son jean noir déchiré aux genoux sur ses hanches minces. Ses cheveux blonds se sont complètement emmêlés après notre bagarre amicale et c'est avec un sourire espiègle qu'il replace sa chevelure plus longue sur le dessus d'une main adroite.

— Allez, ramène-toi.

Je m'assois en soupirant avant de me redresser d'un mouvement. Mes yeux bloquent un instant sur l'espace vide que laissent le manteau et les bottes de Mika depuis une semaine dans l'entrée et ma gorge se noue pour au moins la huitième fois depuis ce matin.

— Ma réponse ne changera pas. J'ai des planifications de cours pour deux mois à terminer, du temps à perdre, des bouteilles d'alcool à vider-

— De l'alcool ? Cool, il y a ça en boîte, aussi.

— Putain, j'ai envie de te fracasser, Colin, grogné-je en lui tournant le dos pour retourner dans mon espace de travail.

Je passe la porte de la pièce et m'installe sur le bureau où mes feuilles éparpillées témoignent de l'arrivée sauvage de Colin qui ne s'est pas gêné pour me déconcentrer de toutes les façons possibles.
Et ce n'est pas vraiment comme si j'étais très concentré aussi.

Depuis que Mika est partie, je suis dans un état second. Mon cerveau peine à assimiler le fait qu'elle m'ait laissé du jour au lendemain, les larmes aux yeux et le visage malade. Elle a même ramassé tous ses habits, n'a oublié que quelques sous-vêtements dans la sécheuse et ses fusains dont la boîte blanche porte encore l'empreinte grise de ses longs doigts fins dans l'un des tiroirs de l'atelier.
Je n'ai pas pu la rattraper, pas même l'en empêcher, tellement j'étais confus. Notre querelle tournait encore en boucle dans ma tête, son malaise me préoccupait au plus haut point. Et, fou d'inquiétude, malgré toute cette merde, la première personne que j'ai appelée pour savoir où elle allait était Laurel qui m'a assuré qu'elle venait tout juste de l'appeler et que Thomas venait la chercher.

Et, depuis, plus rien n'est pareil.
Je mange à peine, je ne dors pas plus de cinq heures par nuit, me réveillant constamment en attendant un message de sa part qui m'indiquerait qu'il y a encore de l'espoir.
Mais elle regrette. Elle me l'a dit. Et moi aussi.

Sixty Shades of a Unicorn - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant