Sixty Shades of a Unicorn - T2

60. Kayak

DAREN

— Tu veux qu'on aille au cinéma ?

— Non.

— Qu'on patine ?

— Va dormir, paysan.

Et puis voilà qu'elle recommence avec son délire de paysan.

— On peut prendre Jade et aller glisser ? J'ai vu une annonce d'un mont pas très loin où ils font de belles glissades.

Elle pivote vers moi sur le tabouret tapissé de sa coiffeuse en plissant dangereusement les yeux dans ma direction, son doigt plein de crème à quelques centimètres à peine de sa joue.

— Je ne vais nulle part avec toi.

— Mais Elisabeth, je ne peux rien arranger si tu ne m'aides pas, déploré-je en appuyant mes coudes sur mes genoux, découragé.

Elle me tourne le dos comme si je n'avais rien dit en distribuant de la crème sur son front, ses joues, son menton et son nez avant de les frotter pour faire pénétrer la substance dans sa peau.

— Je m'en fiche. Ce n'est pas de ma faute.

En grommelant, je me laisse tomber à plat dos sur le lit, à côté de Noah que nous avons entouré de coussins et qui s'amuse avec l'ourson en peluche que je lui ai acheté l'autre jour. Je caresse sa joue du bout de l'index et il pousse un petit cri en attrapant l'oreille de sa peluche de ses petits doigts.

— Est-ce que tu peux au moins me permettre de t'emmener quelque part pour qu'on parle ?

— Je ne veux pas parler.

Je refoule un juron en me frottant le visage, proche du désespoir.

Ça fait cinq jours qu'elle ne veut pas me parler.

Cinq jours qu'elle m'ignore avec une obstination que je n'ai jamais vue chez personne.

Cinq jours que je me fais rejeter comme la sous-merde que je suis.

Cinq jours que l'envie de me battre pour elle devient de plus en plus difficile, quasiment impossible tellement elle me repousse à chaque tentative. J'avoue que je ne sais plus quoi faire. Je suis impuissant et à deux doigts de baisser les bras.

Mais il ne faut pas que je baisse les bras. Mika m'a hurlé dessus au téléphone hier alors que je lui expliquais tout ce qui s'était tramé dans ma vie ces derniers mois et m'a fait jurer sur la tête de mes enfants de ne jamais laisser tomber Elisabeth, de persévérer jusqu'à ce qu'elle me pardonne et qu'elle m'aime à nouveau. Et j'essaie putain, j'essaie. Elle ne me rend pas la tâche facile et je sais que je le mérite, mais... putain, quoi.

Je replace un coussin autour de Noah qui est toujours aussi excité avec son ourson en l'observant de dos, bien droite sur son siège, appliquant de la crème sur son cou et la naissance de sa poitrine sous son peignoir blanc. Puis, elle se lève pour attraper un pantalon de yoga et un débardeur pour aller ensuite s'enfermer dans la salle de bains privée de sa chambre alors que je me pince l'arête du nez. Elle refuse aussi de se déshabiller devant moi comme elle le faisait avant. Elle n'a plus confiance en moi et ça me rend dingue.

Je veux qu'elle me laisse l'aimer, mais elle ne m'en donne pas l'occasion. Elle ne veut plus de moi.
Et je crois que je suis sur le bord d'une crise de désespoir.

Trois petits coups sont frappés à la porte et je me redresse au moment même où Jade trottine dans la chambre dans ses pantoufles en forme de lapin, son cahier de devoir serré contre elle.

— Coucou !

— Coucou ma puce.

Elle grimpe sur le lit et s'assoit près de moi en ouvrant son livre à une page bien précise.