6 - La Toyota Corolla

797 119 15
                                    

{Juin 2020 - Même si c'est la quatrième fois que je me lance dans ce récit, je pense qu'on peut toujours appeler ça un premier jet. Cette fois je ne reviendrai dessus que quand j'aurai mis le mot fin (essaye de se motiver mais ne sait plus si elle doit y croire 😅) Bref, merci de me lire ;D & vos commentaires son un véritable soutien ! }


Sali avait craint un moment que la créature ne se mette à pousser ses cris perçant une fois sa mère rentrée, ou même au beau milieu de la nuit, mais il n'en fut rien. La bête était si silencieuse qu'au matin Sali craignit d'avoir rêvé. Mais non, tapie au fond du placard, la chose était toujours là. Elle s'étira un peu lorsque Sali ouvrit la porte puis sembla se rendormir. 

L'ado décida de la laisser tranquille pour le moment, elle n'était déjà pas en avance pour les cours ... mais le soir venu il faudrait peut-être s'enquérir de ce que mangeait ce genre de bestiole et décider de ce qu'elle allait bien pouvoir en faire. Vue la réaction de Missouri, elle pensa à bien refermer la porte de sa chambre et ce fut l'esprit préoccupé par son nouveau colocataire, qu'elle se rendit au lycée. 

Comme d'habitude, elle s'attira les quolibets de Morgan en passant le portail. Toute la journée, elle eut beau chercher Adama du regard, et même retourner derrière le vieux bâtiment de physique à midi, elle ne le vit nulle part. Déçue, de ne pouvoir lui demander conseil, elle s'était résignée à trouver de quoi nourrir son petit Mærochem par elle-même, lorsqu'à la sortie des cours elle aperçut par miracle le démon goule. 

Elle sautilla à sa rencontre. Curieusement, il semblait l'attendre. Elle savait qu'il serait sans doute imprudent de vouloir qualifier cette créature nécrophage d'ami, pourtant elle se sentit bêtement flattée de voir qu'Adama guettait sa sortie. Elle aurait peut-être dû s'inquiéter et s'interroger sur ce qu'il lui voulait, mais son esprit était obnubilé par la bestiole rouge dans son placard et l'excitation de revoir si tôt la Goule. 

« Adama ! » 

« Sadako », la salua-t-il en retour en imitant son entrain. 

Elle grimaça. « C'est Sali. » 

Il lui offrit un sourire plein de petites dents pointues et Sali regarda autour d'eux d'un air anxieux. N'avait-il pas peur d'être repéré ? 

« Tu es sûr que c'est sage de te montrer au milieu de tous ces gens, en plein jour ? » demanda-t-elle. 

Adama pencha la tête sur le côté. S'inquiétait-elle pour lui ? Pour un peu, il aurait eu des remords à faire ce qu'il comptait faire ... 

« Les gens ne voient que ce qu'ils sont prêts à voir et je possède un certain talent pour passer inaperçu », avoua-t-il.  

Sali haussa les épaules, s'il savait ce qu'il faisait ... « Dis, j'aurais besoin d'un petit renseignement », commença-t-elle. Adama ne broncha pas, aussi poursuivit-elle : « Dans l'hypothèse où quelqu'un réussirait à invoquer un démon mais ne saurait pas de quoi se nourrit ce démon, que faudrait-il lui donner à manger ? »

Adama plissa les yeux : « Tu as donc invoqué ... » Il ne termina pas sa question, son regard s'était figé derrière Sali et l'instant d'après, il la poussa de toutes ses forces. 

« Méééééééééh ! » bêla l'adolescente complètement déstabilisée. 

Elle aurait dû tomber, mais son dos heurta quelque chose de dur qui ralentit sa chute et au dernière moment, Adama la rattrapa par le col de son pull et la remit d'aplomb.  

Elle eut seulement le temps d'entendre un crissement de frein, un "BAM",  puis des cris s'élevèrent et ce fut la pagaille. Lorsqu'elle se retourna, elle vit qu'une silhouette était étendue sur la route, devant les roues d'une Toyota Corolla. 

« Oh mon Dieu », chuchota Sali tandis que les adolescents de sortie et les adultes de surveillance se précipitaient vers l'accident. « Oh mon Dieu, Adama ! » Elle eut beau se tourner en tous sens, la Goule avait disparu. Et l'on commençait à la montrer du doigt. 

Il ne lui fallut pas longtemps avant de comprendre que personne n'avait vu Adama et que tout le monde croyait qu'elle venait de pousser un autre élève sur la route. Au vu de sa réputation morbide, bon nombre de personnes présentes étaient prêtes à parier qu'elle l'avait fait exprès. Comme les insultes fusaient de plus en plus, l'un des surveillants recueillit sa version des faits (elle avait perdu l'équilibre) et lui conseilla de rentrer chez elle, non sans avoir relevé son nom, son prénom et sa classe et les coordonnées de ses parents. 

Puis il ordonna aux autres élèves de se disperser afin qu'on puisse porter assistance à l'infortuné qui s'était pris une voiture. 

Se mordillant la lèvre Sali s'en retourna donc chez elle, le coeur lourd. Est-ce que c'était grave ? Ce n'était pas de sa faute, pourtant la culpabilité l'assaillait. Et si elle avait tué quelqu'un à cause d'Adama ? Et puis d'un coup elle se demanda : est-ce qu'Adama l'avait poussée exprès ? 

Et si oui, pourquoi ? 




Sang perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant