9 - La bêtise avait ses limites

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Le premier jour, le vendredi, Jordan Parc s'était montré sage et plutôt intelligent quand il s'était agi de compléter ses exercices de SVT. Le lundi soir, en revanche, il avait changé du tout au tout. Il grognait sans arrêt et n'avançait absolument pas dans ses Maths. 

« Alors ? »

« Hum, soixante-neuf ? »

«  Mais t'es bête ou t'es bête ? » gémit Sali, excédée. Elle était déçue de n'avoir pas revu Adama, à qui elle aurait aimé réclamer des explications, et passait malgré elle ses nerfs sur Jordan.  

« C'est toi qui explique mal, » bougonna Parc.

« J'ai pas signé pour faire tuteur, » grinça-t-elle. « C'est quoi ton problème ? T'as pris des cours pour être aussi stupide ? Ou bien l'accident t'a grillé des neurones ? »

Le jeune homme la regarda de travers. Pour sa défense, Sali expliquait le même exercice de maths depuis pratiquement vingt minute ; c'était la même formule qu'il échouait à appliquer encore et encore. 

Quand il avait parlé d'aide aux devoirs, elle avait pensé qu'elle écrirait pour lui vu qu'il ne pouvait pas ou que ... Aaaah ! Pour le coup, elle comprenait presque qu'Adama ait cherché à se débarrasser de Jordan, même si c'était à ses dépends.

Quoique elle était peut-être un peu dure. Après tout Parc était assez sympathique, vu les circonstances. 

« Bon, c'est pas grave, » se rattrapa Sali d'une voix plus douce. « Les maths ça ne sert à rien dans la vie. En plus, si tu as tout faux, ton prof saura que tu n'as pas triché. »

« Et c'est bien, ça ? » s'étonna Jordan avec une innocence désarmante.

Elle haussa les épaules sans répondre. Parc se laissa aller contre le dossier de sa chaise et promena son regard sur la cuisine, visiblement fatigué par cette séance de torturat - non, pardon : de tutorat.

« C'est bon, tu as fini ? » lui demanda Sali au bout d'un moment de ce petit manège. « Tu fais quoi là, l'inventaire, pour venir cambrioler plus tard ? »

Son front se plissa, tant il haussa les sourcils. « En fait je me demandais comment tu faisais pour vivre dans un clapier à lapin, » rétorqua-t-il.

Sali émit un son à mi-chemin entre la surprise et l'indignation. D'un autre côté il n'avait pas tort. La cuisine était du genre compacte ; face à eux il y avait une fenêtre à double battant sous laquelle trônait la table sur laquelle ils tentaient de faire leurs devoirs ; à gauche, se trouvait le mini frigo et juste au-dessus le four micro-onde ; derrière, il y avait une espèce de plan de travail avec un évier incrusté et une plaque de cuisson minuscule ; au-dessus et au-dessous, on avait casé des espaces de rangement.

C'était le genre de pièce où il était compliqué de se croiser, où l'on ne circulait plus quand quelqu'un était assis et dans laquelle on étouffait dès qu'on était quatre.

Heureusement, le père de Sali était souvent en formation ou voyage professionnel et revenait rarement en dehors des weekends. Quant à sa mère, elle rentrait tard depuis qu'elle avait changé de manager. Il n'y avait donc que Jordan et Sali à la maison ce soir-là.

« Ta chambre aussi, elle est petite ? » Les yeux caramel de Jordan pétillaient désagréablement.

« Mêle-toi de tes oignons », râla la jeune fille, consciente plus que jamais qu'ils étaient seuls dans l'appart.

« Tu pourrais me faire visiter tout de même, paraît que tout le monde fait ça, pour sa première fois. »

« Quelle première fois ? » bêla-t-elle.

Sang perduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant