Tu signes si je saigne?

«Il y a une petite voix...»

Je me suis fait tout seul, j'sais même pas si je me suis finis. 

Elle s'endort au bout d'une heure face au film. Elle est magnifique, apaisée et mes yeux prennent en photo ce moment que j'espère ne jamais oublier. Je parle comme une pédale mais je m'en bat les couilles. Je veux juste ne plus réfléchir. Je veux juste vivre et plus survivre. Je ne vais pas la laisser dormir ici, sur le canapé, le cou totalement tordu. Alors je la portes délicatement, et elle se blottit contre moi tout en gardant les yeux fermés. Je ne sais pas ou est sa chambre mais par intuition, je me dirige vers la porte tout au fond du couloir. Sa chambre est grande, bien rangée, dans les tons gris et blanc. Je la poses sur le lit et la couvre avec sa couette qui sent son parfum. Elle bouge pour s'installer plus confortablement en boule. La lumière de la lune me suffit pour apercevoir une beauté toute autre que celle que j'ai l'habitude de voir sur son visage. Une beauté non que j'admire mais que j'ai envie de protéger corps et âme. Elle ressemble à une enfant démunis, perdue et je penses que dans le fond c'est ce qu'elle est ou c'est ce qu'elle a été. Je sais qu'elle fait la forte mais une étincelle au fond de ces yeux me prouvent qu'elle a vu et vécu des choses qu'elle aimerait oublier. Je ne peux m'empêcher de m'assoir près d'elle et de caresser  doucement ces cheveux. Je ne sais pas, trop de choses se bousculent en moi et comme d'habitude, la vision de la lune m'apaise. Je restes je ne sais combien de temps à son chevet, pour m'en aller encore fumer un joint avant d'aller clamser. 

Le lendemain, je me réveille vers 11H du matin. Je penses que c'est la première fois depuis des mois et des mois que j'arrives à dormir aussi bien et aussi longtemps. J'ai quand même la tête dans le cul, dans tous les cas, je suis pas du matin. Il n'y a pas un seul bruit dans l'appartement, pas un seul. Je sors, passe et toque sur chaque porte mais aucune réponse. Je finis à la cuisine ou je trouve un mot sur la table. 

Salam Tarik, 

J'imagine que tu viens de te réveiller, je t'ai préparer le petit déjeuner, tout est dans le frigo. Je suis partis préparer la scène pour le show de ce soir. Je reviens vers 12H pour préparer le déjeuner alors si tu veux manger, t'es la bienvenu. D'ailleurs, si tu veux inviter Nabil et tes amis, ça ne me pose pas de problèmes. Prend tes aises et si tu as besoin de quoi que ce soit, appel moi. Merci pour hier soir et comme je te l'ai dis, tu as de l'amour en toi. Ne laisse pas la haine prendre le dessus sur ton bonheur. 

Bisou, Leina.  

Sa dernière phrase reste encrée en moi. Elle sait que j'ai peur, elle le sent. Je ne m'attarde pas d'avantage sur son mot et mange ce qu'elle m'a laissé sur un plateau dans le frigo. Elle est tellement prévenante. Je décides d'aller courir ce matin, j'ai besoin de respirer, de réfléchir. J'envoi un message à mon frère pour le prévenir qu'il pouvait ramener Zizou avec lui déjeuner chez Leina. Je veux que ça soit qu'eux qu'ils viennent parce que je sais qu'il ne jetterons même pas un regard mal placé à Leina, ils savent qu'elle m'appartient. J'ai pas envie d'en parler aux autres, ils vont me chambrer à longueur de journée. Je sors, n'oubli pas ma casquette et mes lunettes pour éviter qu'on me fasse chier. J'aime mes fans, j'aime la QLF mais j'ai plus de paix et c'est plus ça qui me fait chier que de leur parler, au contraire, y'a que des ondes positives. C'est ca qui est bien avec PNL, c'est soit tu comprends et t'aime soit tu comprends pas et t'aime pas. Le choix de ne pas faire d'interview est une idée de mon père. Il nous a clairement dit à Nabil et moi que si on laissait les médias intervenir dans notre succès, c'est eux qui nous contrôlerons et c'est surtout eux qui contrôleront notre carrière. Tout ce qui sort de la bouche de ces fils de pute c'est de la merde. Tu veux nous connaitre? Écoute nos sons, tout y est dit. On surfe sur les mots mais on n'aurait pas pu dire quelque chose de plus que cela dans un interview.

Je rentres finalement qu'à 13H et toque à la porte. 10 secondes plus tard, Leina vient m'ouvrir, un sourire accroché à son visage, toujours aussi belle. 

-Salam Tarik. 

-Salam bella. Ça va?

-Oui et toi?

-Ca va hamdoullah, je vais aller prendre ma douche, je suis tout transpirant. 

-D'accord, tu veux que je te ramènes des habilles propres?

-Si tu as s'il te plait. 

-Bien sur. 

L'eau chaude sur mon corps détend mes muscles. Du Frank Ocean à fond dans la salle de bain. C'est l'une de mes inspirations en termes d'intrus et de variété. Il est, à mon avis, futuriste dans tout ce qui est pop et soul. Putain, je me rend pas compte du changement au sein de ma vie, c'est incroyable. Y'a à peine 6 ans j'avais du mal à payer le loyer, pouvais me doucher à peine deux fois par semaine et regardez moi aujourd'hui, je prends une putain de douche chaque matin. J'ai fais en sorte que ça aille mieux à Corbeille, pour mes gars et pour tout ceux qui sont dans la même galère que nous avant. Je sais de quoi je parles et jamais de ma vie je vais faire comme certain rappeurs, sortir me prendre en video en train de donner de l'argent au gens. Ils vont faire quoi avec? S'acheter de la drogue? S'acheter un couteau? S'acheter de la bouffe? Pour combien de temps? Tout ça c'est éphémère, moi je veux régler le problème de l'eau, le problème des conditions de vie dans les HLM. Les gens riches ont de la chance, du poids, du pouvoir. Les pauvres n'ont que leurs âmes et leurs principes qu'ils perdent rapidement face à la dureté de la vie. Je m'attarde quelque peu à la douche ayant besoin de réfléchir à tout ce qui se passe en ce moment. Putain, je m'étais pas rendu compte de toute la buée dans la salle, faut que je sortes ou je vais m'étouffer. Elle m'a laissée sur la cuvette un  survêtement Givenchy noir et blanc. Il me va large en bas et serré en haut comme je les aime. Je sais qu'elle a du gout mais comment est-ce possible qu'elle ait toujours tout à n'importe quel moment. Je sors et l'entend hurler sur quelqu'un certainement au téléphone. Je restes devant la cuisine sans pour autant rentrer n'osant pas la déranger. 

-Comment est-ce qu'il est sortit? Il a pris perpétuité merde!

-J'en ai rien à faire! Tu le cherches et tu le trouves!

-La police est à sa recherche ou pas?

-J'hallucine! Putain Ilyes il va revenir. Il va me tuer!

-Je vais pas prendre de garde du corps. Je suis pas une fragile, qu'il aille se faire foutre, je vais continuer à vivre comme d'habitude. Si tu as des nouvelles appel moi s'il te plait. 

Sa voix s'est adoucit au fur et à mesure. Elle semblait plus terrifiée qu'énerver. 

-Envoi un gars devant la chambre d'hôpital de mon frère et un gars en bas de mon bâtiment à Paris et surtout deux gars devant la maison de mes parents ou il y a Anas. 

-Merci beaucoup Ilyes, j'oubli pas ce que tu fais pour moi. 

Je rentre à cet instant en faisant mine de rien. J'ai envie de lui poser des questions et puis nique sa race, on est en train de s'embarquer dans quelque chose de sérieux alors j'ai besoin de connaitre ces démons, c'est quelque chose d'indispensable, ou sinon je me jette dans la gueule du loup. Je sais pas comment amener le sujet. Je la vois soupirer en raccrochant le téléphone. 

-Leina? Ca va?

-Oui ne t'inquiète pas. Je pose à manger ou il y a les gars qui viennent? 

-Ils vont venir dans un quart d'heure. Ils sont tout le temps en retard. T'es sur que ca va?

-Tu m'as entendu au téléphone j'imagine nan?

-Ouais. Si tu veux pas me dire je comprendrais. 

-Non c'est pas ça, c'est juste que c'est compliqué et long à expliquer. 

-J'aurais tout mon temps ce soir. Je t'invite au restaurent avant le show et même si tu ne veux pas me raconter on discutera simplement. 

-D'accord, je vais voir. 

-Il faut que tu me montres ce qui a de plus sombre chez toi Leina. Tu m'as vu au fond du trou et tu m'as tendu ta main que j'ai attraper de toute mes forces malgré ma fierté de bonhomme et putain je le regrette pas. À toi de me faire confiance. 

-Je le ferais si tu me promet de ne pas me juger. 

-Je ne le ferais pas. Parole d'Andrieu.