Chapitre 10

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Noé



30 septembre

_7h10


Le bruit assourdissant de mon réveil me fait ouvrir les yeux en sursaut après avoir passé la nuit à me retourner dans mon lit dans l'attente de trouver le sommeil.

Ma vue se pose directement sur le lit vide de Vanitas dont les plis de la couverture sont restés strictement identiques aux jours précédents. Son sac de cours et ses cahiers sur le bureau n'ont pas bougé de place non plus, ce qui me fait réaliser qu'en plus de ne pas revenir dormir à l'appartement, il ne compte pas aller à l'université aujourd'hui non plus.

Déjà trois jours se sont écoulés depuis notre dispute, le soir du coup de fil de mon père.

Trois jours que ni Roland ni moi n'avons de nouvelles de lui. Trois jours que je n'identifie aucune trace de sa venue au studio. Trois jours que la culpabilité me serre l'estomac au point de m'empêcher de fermer l'oeil la nuit.

Trois jours que je me torture l'esprit à essayer de trouver des réponses à mes questions.

Vanitas est quelqu'un d'exécrable, lunatique, agressif, moqueur et cruel, et sa réaction de samedi soir en est la preuve.

Ce gars est néfaste. Depuis que je l'ai rencontré je me suis mis à douter de moi-même, de mes actes, de mes valeurs, et de mes principes ; j'ai même poussé mon courage jusqu'à l'inconscience lorsque j'ai accepté de passer la soirée en sa compagnie. Tout ça pour quoi ? Pour qu'il se montre aussi impitoyable avec moi que lors de mon premier jour ici ? Pour qu'il se permette de railler mon rang social et me juger sans même me connaître ?

Et pourtant..

Paradoxalement je suis convaincu que sa méchanceté constante n'est qu'une barrière de protection. Derrière son caractère insupportable et cette rage envers son entourage se cache sûrement une bonne personne qui, pour une raison qui m'est inconnue, refuse de se montrer.

Ses regards profonds et énigmatiques qu'il me lance lorsqu'il nous arrive de converser calmement, son rire qui soulève mon cœur de joie et qui surgit instantanément lorsque j'adopte un comportement enfantin, l'attention qu'il m'a apporté ce soir là alors que nous étions en compagnie de ses amis, sa manière de toujours me surveiller du coin de l'oeil lorsque je suis en pleine discussion avec Roland lors du petit déjeuner, ses taquineries aussi insupportables qu'indispensable pour moi à présent, sa façon de me réveiller le matin quand il rentre de ses nuits passées dehors pour que j'évite d'arriver en retard à l'université.. Certes il se contente généralement de me secouer sans ménagement jusqu'à ce que j'ouvre les yeux, mais je ne peux m'empêcher de trouver incroyable les moments où j'aperçois une faille de bonté dans son égoïsme.

Mais c'est comme s'il ressentait le besoin permanent de me rabaisser en échange. Comme si, pour lui, sa gentillesse envers autrui était synonyme de faiblesse.

A cet instant précis, je ressens l'envie irrépressible de le voir malgré notre altercation d'il y a quelques jours. Je me rends compte que peu importe qu'il fasse preuve de clémence ou d'animosité à mon égard ; je ne laisserai jamais tomber. Je ne le laisserai jamais tomber.

Dante et Yohan, qui habitent l'étage en dessous et à qui j'ai demandé hier si ils ne savaient pas où se trouvait Vanitas, avaient l'air de ne pas se préoccuper de son sort plus que ça. Eux non plus n'avait pas de nouvelles, mais c'est comme si cela leur passait au dessus, comme si ce n'était que Vanitas après tout.. Peut être est-ce par habitude ? Je sais que ce n'est pas la première fois qu'il disparaît sans donner de nouvelles.

- Noé ! m'appelle Roland d'une voix naturellement joyeuse à travers la porte de ma chambre. Tu viens manger ? Olivier et Maria doivent nous attendre !

Je me détourne vers le réveil et regarde l'heure avant de me redresser d'un seul coup, raide comme un piquet. Déjà 7H40 ! Perdu dans mes pensées, j'en ai oublié de me préparer pour me rendre à mes premiers cours de la journée. Au programme ; cultures matérielles et anthropologie des images. J'ai hâte...

- J'arrive, je lance à mon ami tout en sautant du lit et en enfilant des vêtements propres à la hâte.

Tu seras un homme ( Vanitas no carte )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant