Chapitre 17

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Noé 


J'ai attendu et redouté ce moment depuis si longtemps.


Celui où l'un de nous deux allait commettre ce geste. Celui où les doutes sur nos sentiments – de quelque nature qu'ils soient – serait enfin levé. Celui où nous saurions, l'un comme l'autre, que le retour en arrière est impossible.

Dès l'instant où il a posé ses lèvres sur les miennes, je me suis mis à l'embrasser. Comme si ma vie en dépendait, comme si ma bouche quémandait la sienne depuis bien trop longtemps, comme si une soudaine force mystique me poussait à vouloir aller plus loin.

A ce moment précis, c'est comme si le monde autour de nous disparaissait. Même l'alcool que j'arrive à sentir à travers son souffle n'a aucune importance quand notre chaste baiser se transforme en une valse langoureuse et que je le sens si proche de moi.

Je ne réalise ma bêtise que lorsque la voix familière et joyeuse de Roland s'élève depuis la chambre que nous partageons :

- Noé ! Vanitas ! Où êtes-vous ?

Vanitas se recule en premier, une expression que je ne lui connaissais pas figée sur le visage, entre la surprise, la peur et la gêne. Il baisse les yeux pour les relever vers moi l'instant d'après, les joues rouges, la lèvre inférieure mordillée. Je le trouve absolument magnifique.

Et, comme c'est une bien fâcheuse habitude chez lui, il commence à fuir.

- Vanitas..! je l'appelle

J'essaye de le rattraper mais il est déjà arrivé sur notre balcon d'un bond maladroit.

- Vanitas !

Cette fois, il disparaît dans la chambre. A mon tour, je descends du toit de la résidence et me faufile dans la pièce, bien décidé à le retenir, mais j'ai à peine le temps de voir le bout de son manteau que j'entends presque déjà la porte d'entrée se refermer dans un claquement derrière lui.

Encore une fois, il vient de m'échapper.

Figé, je reste debout, à me repasser la scène que je viens de vivre encore et encore dans l'espoir d'y trouver un sens.

Pourquoi l'ai-je embrasser ? Pourquoi ai-je la sensation que je serais capable de tuer pour recommencer ? Pourquoi Vanitas passe-t-il son temps à me fuir ?

L'aimer est si compliqué..

Le pauvre Roland s'approche de moi, dépité. Il ne doit pas comprendre les choses qui se passent dans cet appartement, pourtant juste sous son nez. Pour détendre l'atmosphère, il se met à rire.

- Qu'est ce qu'il s'est passé ? Vous vous êtes disputé ?
- Je ne sais pas...
- Quoi ? Bon.. Je voulais juste vous dire au revoir !

Je baisse les yeux sur ses deux imposantes valises posées juste à côté de ses pieds. Avec tout ça, je ne les avais même pas remarqué, bien qu'elles doivent prendre au moins le tiers de l'espace de cette chambre. J'avais même complètement oublié son départ pour Jérusalem, qui s'annonce encore plus angoissant après ce qui vient de se passer entre Vanitas et moi. Cependant, je suis ravi pour lui ; je suis sûr qu'il s'y amusera. Et c'est tout ce qui compte, non ?

- Vous allez me manquez, tous les deux ! me dit-il dans une accolade. Tu salueras Vanitas de ma part ?
- Euh.. J'y penserai.
- Allez ! On se revoit dans cinq semaines !

Je l'accompagne jusqu'à la porte d'entrée. Un dernier geste de la main, un dernier regard vert émeraude rempli d'étoiles et le voilà parti.

Sans que je m'y attende vraiment, je ressens un étrange pincement au cœur lorsque je pense à mes trois amis que je ne reverrai pas pendant presque un mois. Ils vont me manquer, même si je sais que c'est pour le mieux. Je me dis qu'ils sont sur le point de vivre une expérience inoubliable, et ça me réconforte.

Je regarde autour de moi, l'appartement plongé dans l'obscurité, silencieux, seul le réfrigérateur émettant un faible ronronnement. Presque comme si il comprenait mon angoisse, Murr vient se frotter à mes jambes en miaulant et je le gratifie d'une caresse sur la tête.

Roland ne sera plus là pour faire tampon entre Vanitas et moi.

Je vais devoir l'affronter cette fois.



Tu seras un homme ( Vanitas no carte )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant