Juste pour oublier

Chapitre 37

Nous sommes ce que le passé a fait de nous.
Bruno Combes

°Ellaïa°

Allongée dans mon lit, mes doigts triturent les colliers autour de mon cou alors que je fixe le plafond. Les bijoux, devenus bouillants à force d'être manipulés, risquent de me mettre dans une très mauvaise situation si Jordan apprend à qui il appartient. Le rendre furieux serait dangereux et je veux éviter ça à tout prix. Pour le moment, il est doux comme un agneau, même s'il reste effrayant, et j'aimerai qu'il soit comme ça le plus longtemps possible.

Toute la vie.

Mais il y a quatre jours, lorsqu'il a décidé de revenir comme un loup dans une bergerie, il était d'humeur massacrante. J'ai tout fait pour essayer de gagner du temps, le suppliant de me laisser finir ma semaine de cours avant de le retrouver le week-end, pour réfléchir à une porte de sortie. Pour trouver un moyen de le fuir. Sauf qu'il s'est emporté, j'ai paniqué et... Jallel est intervenu. Ce n'était pas du tout prévu, personne ne devait rencontrer Jordan, son existence devait rester enfouie au plus profond de moi.

Je ne sais pas comment me sortir de là, quoi faire pour me débarrasser de lui et pouvoir avancer sans toujours avoir ce poids sur mon âme. La seule chose que je sais, c'est que j'aime Jallel. Je l'aime et je refuse de revivre une nouvelle fois l'enfer que Jordan m'a fait traverser l'année dernière.

Si je lui tiens tête, si je me montre forte face à lui, peut-être qu'il finira par se lasser de moi ?

Sauf qu'il me connaît. Il sait à quel point je suis faible et effrayée.

Cela fait donc quatre jours que je m'enfonce dans des mensonges et que le groupe fait semblant d'y croire. Au moins, leurs regards interrogateurs ont cessé, mais Mathias nous fuit complètement et je n'arrive plus à savoir ce que ressent Jallel...

Jordan et lui passent leur temps à se chercher, mais le boxeur ne franchit jamais la limite qui le ferait exploser. Je connais Jordan, il est prêt à tout pour me garder auprès de lui et guette le moindre détail pour avoir le prétexte parfait afin de m'obliger à ne plus les fréquenter.

Je ne peux pas passer ma journée dans mon lit à fixer le plafond, alors je finis par trouver la motivation pour m'habiller. Pendant que je prépare mes affaires, quelqu'un toque à ma porte et je sursaute.

– Entre !

Je sais pertinemment que c'est Jordan, mais je suis surprise qu'il prenne la peine de toquer.

– Ellaïa ?

– On est venues te faire un petit coucou.

Je me redresse subitement en reconnaissant les voix d'Aly et d'Hanna. Les cheveux gris d'Aly coiffés en queue de cheval apparaissent dans mon champ de vision et je me fige au milieu de la pièce, sans savoir quoi dire. Cette visite est plus qu'inattendue.

– En voyant que tu n'étais pas là, on a séché l'heure de sciences humaines... commence Hanna, gênée.

– Et nous voilà ! sourit Aly.

Elles s'approchent de moi pour me prendre dans leurs bras et s'assoient sur mon lit tandis que je tourne ma chaise face à elle. Si elles en sont venues à sécher un cours, c'est qu'elles ont une idée derrière la tête et ça m'inquiète.

– Jallel nous a raconté.

Oh.

Aly donne un coup de coude dans les côtes d'Hanna et lui lance un regard noir.

– Désolée...

– Hanna, putain ! Tu sais pas tenir ta langue !

Aly soupire avant de plonger ses yeux dans les miens et de reprendre :