*Mathéo Salinas*

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« Alors Argoly, encore de garde ce soir? » Ricana un homme imposant et visiblement saoul. 


Le concerné hocha la tête avec un sourire forcé. Pendant que son équipage s'amusait dans la taverne, lui devait garder la porte d'une chambre. Sans bouger ni parler, veillant à ce que l'occupant ne soit surtout pas déranger pendant qu'il s'occupait de ses affaires. Si quelque chose venait a le perturber il s'en prendrait à Argoly sans hésiter. Alors un doigt une main ou la langue sauterait d'un coup sec. De plus la démission n'était pas permise avec lui, lorsqu'on quittait le navire c'était parce que la mort était venu nous chercher. Et bien souvent, l'ennemi n'était pas en faute. Le second-maître Argoly Neveres lâcha un long soupire. Sans faire de bruit il s'écarta de quelques mètres et craqua inlassablement tous ses os. Il avait beau être jeune, il ressentait des douleurs dont il ne devrait pas souffrir à son âge. 

 « Ça devrait être la corvée d'un mathurin pas d'un officier » marmonna-t-il en levant les yeux au ciel.

 Cela faisait maintenant cinq bonnes heures qu'il patientait devant cette maudite porte. Il s'imaginait aux côtés de ses camarades à rire et à boire. Oui, il serait mieux en bas dans la grande salle enfumée et bruyante que devant une porte derrière laquelle un vacarme persistait. Voyant que personne n'était à l'étage, il décida de s'avancer un peu pour se pencher sur la balustrade afin d'observer la grande salle. Un large sourire s'étira sur son visage. Le maître canonnier Rigel, saoul à ne plus en pouvoir, déambulait et riait à plein poumons. Cette situation grotesque décrocha le sourire a beaucoup. 

 « Quel ivrogne ! »

Le grincement d'une planche attira son attention à gauche. Lorsqu'il tourna la tête il vit un messager qui s'apprêtait à toquer à la porte. D'un bon il s'avança vers lui et le héla pour l'arrêter dans son geste maladroit.

 « Qu'est-ce que tu fais ! Le capitaine Salinas a demandé de ne pas être dérangé ! » 

 Le messager, un homme court sur patte et plutôt enrobé, sursauta. 

 « J'ai dit, que fais-tu ? grogna t-il un peu plus fort.

 -J-j'ai un message important à délivrer au capitaine. 

 -Il a autre chose à faire pour l'instant, dégage. Quand il sortira tu pourras l'assommer de tes observations. Crois-moi mieux vaut pas le déranger maintenant. 

 -Mais c'est très important ! C'est au sujet de Valerens Deker »

 À ce nom des pas lourds se firent entendre de l'autre côté de la porte. Ils se rapprochèrent rapidement puis la porte s'ouvrit laissant apercevoir le capitaine Mathéo torse nue. Ce dernier détailla les deux hommes. Ses dents grinçaient sous la pression. D'un coup, sans crier gare, il attrapa le messager par le cou et le jeta dans la pièce. Un seul regard de sa part suffit à Argoly pour comprendre ce que voulait le capitaine. Sans le gêner, l'officier entra alors à son tour et tapa du pied pour signifier qu'il était aux ordres. 

 « Qui ose me déranger ! » Hurla de colère l'occupant de la chambre.

Les tremblements du messager firent sourire Argoly. Lentement il se releva et jeta un regard apeuré au second-maître.  

« C'est un messager capitaine, il a une information sur votre "jouet"》

 En un rien de temps le visage fermé et sinistre de Mathéo s'illumina et un sourire carnassier apparut. Il s'assit au milieu de cinq filles et gratta d'un air pensif son bouc brun. 

«Intéressant... Qu'est-ce que tu attends sombre idiot ! Dis-moi ce que tu as appris !

-Il a été aperçu au large de l'île il y a cinq jours, et la prime sur sa tête a considérablement augmentée »

Le messager sortit un papier de sa poche et le tendit au capitaine. Ce dernier arracha des mains l'avis de recherche et commença sa lecture. Avec ses doigts tatoués et décorées de bagues clinquantes, il suivit la ligne de zéro tout en comptant. Plus il avançait plus son sourire s'élargissait. 

 « Un... Trois... Cinq ! 100 000 réals ! 

 -Presque autant que votre tête capitaine, avoua Argoly. 

-Mon jouet est très convoité... 

-Lui et son frère ont mené bataille, s'il ne s'était pas échappé le prince serait mort. Maintenant son père sillonne les eaux avec ses six plus gros navires. Et mis à part lui et ceux qui n'ont pas assez de cran, le globe entier est à sa recherche, informa d'une seule traite le messager. 

 -Il n'est pas dans la liste des plus recherchés pour rien » souffla Argoly. 

 Un fou rire résonna dans la pièce. Les deux hommes regardèrent le capitaine rire aux éclats. L'un était abasourdi l'autre restait sur ses gardes. Argoly savait très bien la démence qui habitait son supérieur. 

 « Dégagez ! »

 Soudain son visage se rendurcit et un air de sadisme passa sur son visage. 

 « J'ai dit dégagez bande de catin ! »

 Les femmes qui étaient assises sur le lit sortirent en courant. Lorsqu'elles passèrent sous le regard du second-maître celui-ci remarqua des blessures récentes sur le corps svelte des femmes. Parfois même des plaies béantes qui continuaient à saigner. Des bleus qui viraient aux noires au coin de leur tête inquiétèrent encore plus Argoly. Cet homme était un monstre parmi les humains. Par chance, Mathéo ne leur avait pas coupé de parties du corps. « Capitaine que prévoyez-vous ? » Mathéo s'habilla d'une simple veste longue qui descendait jusqu'au genou, dessous rien ne couvrait son torse rempli de cicatrice. Le capitaine mit son tricorne sur sa tête et rabattu son cache œil. En quelques pas il fut à l'extérieur de la chambre. Avant de tourner les talons il leur dit. 

 « Le capitaine Mathéo Salinas sera le seul à profiter de cette somme d'argent. Argoly, prépare la Fureur, nous partirons ce soir et nous traquerons mon jouet. »

Le capitaine partit à nouveau à rire et s'éloigna dans la taverne laissant les deux hommes seuls dans la chambre. 

 « Je t'avais dit de pas le déranger, si on traque ce pirate on aura peu de chances de revenir vivant. Tout le monde est à ses trousses. 

 -C'est mon boulot d'informer. 

 -D'ailleurs qui es tu ? Et qui t'envoie ? je ne t'ai jamais vu par ici.

-J'écoute et je parle en échange de quelques pièces, je travaille à mon compte" 


 Le messager et le second-maître sortirent de la chambre, sans faire attention aux deux hommes qui les épiaient. 

 « Tout se passe comme prévu. 

 -Pour le moment..."

*************

Et voilà ! Un nouveau chapitre avec un nouveau personnage ! 

Que pensez-vous de ce fameux Mathéo, le capitaine psychopathe qui a aidé notre cher Valerens à tuer le roi d'Espagne ! 

Et que va-t-il se passer ? Qu'est-ce qui se passe comme "prévu" ? 

Tout commence à se mettre en place, un plan ingénieux qui devrait vous plaire, mais attention il n'est pas infaillible !

Les mers d'un autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant