Les mers d'un autre monde

*Naissance d'un capitaine*

*Il y a 9 ans*

Le vieux Jack Smith se gratta la barbe et rangea sa longue vue noire dans sa poche. Il descendit sur le pont principal, annoncer que la terre était en vue. Il souffla, soulagé d’arriver sur cette île après 12 mois en mer.

-Ohé moussaillons préparez-vous à accoster au port ! Tonna au-dessus du vacarme le capitaine Smith. Nous arrivons enfin sur l’île de Isola Dora !

Les marins s’activèrent de plus belle. La vigie scrutait l’horizon et les canonniers commençaient déjà à sangler les canons à la coque.

De son regard perçant Smith observait chacune de ses nouvelles recrues au travail. Certains s’occupaient d’étouffer les voiles pendant que d'autres briquaient le pont avec leurs maigres forces. Son équipage était en majeure partie composée de jeunes mousses pas plus âgé que 30 ans, qu’il fallait garder à l’œil afin de parer la moindre erreur.

Le capitaine appréciait chez eux leur vitesse d’exécution et d’apprentissage, en ajoutant à ça leur courage et leur ténacité en combat. Seul une dizaine de vieux marins formaient ce qu’on pouvait appeler un équipage accompli. Ces marins là naviguaient depuis des années sur L’incessant et occupaient une importante place au sein du navire.

Soudain son regard buta sur un jeune matelot qui ne devait pas avoir 25 ans. Son boulot était d’accrocher les cordes des voiles aux petits manches en bois placés sur le dessous du bastingage et visiblement, il avait du mal.

- C’est quoi ce travail petit ! Refait moi ce nœud ou la voile va s’envoler ! Gronda le capitaine.

- À vos ordres ! S’esclaffa-t-il.

Après mainte et mainte essaie, il réussit enfin à faire un nœud marin satisfaisant. Le capitaine, content de le voir si consciencieux sur son travail, lui tapa amicalement l’épaule avec un large sourire.

- Bravo petit, veille à ce que ça ne se reproduise plus.

- O-oui capitaine ! Bafouilla le rouquin.

- Et demande au timonier qui ricane derrière moi de te réapprendre les bases, siffla le capitaine à haute voix pour que l’homme concerné l’entende. N’est-ce pas, Valerens ?

Ce dernier perdit instantanément son sourire. Il regarda d’un œil lassé le roux plus âgé que lui. Il ne retenait rien, s’en était insupportable.
- Demandez au maître d’équipage. C’est son travail par le mien, Rétorque le timonier.

Jack souffla. Ce petit n’avait vraiment aucune patience ! Il se souvenait encore quand il était jeune et insouciant. La première fois qu’il l’avait rencontré il n’avait que six ans et à l’époque il était déjà émerveillé par l’océan et les navires de guerre. « Je veux être un marin, comme mon père ! », lui avait assuré le jeune garçon plein d’espoir. Jack avait été touché par tant de détermination, tellement qu’il lui avait répondu : « Quand tu seras haut comme ça, tu embarqueras sur L’incessant !». Chose dite chose faite, ce n’est qu’âgé de 13 ans que Valerens embarqua sur le navire pirate et fut engagé en tant que simple mousse. À ses débuts il briquait le plancher de ses bras maigres. Sûrement la tâche qu’il détestait le plus, et déteste toujours d’ailleurs. Il n’arrivait à rien et ne cessait de s’attirait les foudres de l’équipage.

Mais avec le temps, il fit preuve d’une évolution fulgurante. Il accomplit de nombreuses prouesses et le capitaine vit se développer en lui une fine stratégie qui lui avait permis de grimper les échelons, passant de maître canonnier à maître d’équipage en quelques années.

Il se fit apprécier et respecter, et peu à peu se gagna une place indispensable sur le navire pirate. Au bout de six années il arriva au rang de timonier, assurément le plus jeune à avoir ce titre sur toutes les mers. Jack voyait en lui un grand potentiel, il était sûrement le plus prometteurs sur ses 100 hommes regroupés, un navigateur et timonier-né, de par ses prouesses et sa capacité à sortir le navire des plus grosses tempêtes et des batailles les plus délicates.