*Une aide interdite*

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Lentement, le navire poursuivait sa route, poussé par le vent qui s'était quelque peu calmé. Les voiles claquaient toujours sur les poutres, indiquant aux mousses que le danger, bien qu'endormi, était toujours là. Une aura étrange se rependait dans les cales sombres, Iloé bien sur n'y prêtait pas attention. Elle était en partie cette aura, elle avait participé à ça, elle l'avait souhaité. L'allié l'avait entendu du tréfonds des mers. Il avait été là, depuis sa disparition, dans un coin presque inaperçu, se montrant que lorsque sa puissance était indispensable. Jamais Iloé ne pourra le remercier, il appartenait à un autre monde, certes proche mais pourtant si différent. L'allié était une partie d'elle, sa puissance avait parcouru tout son corps et son esprit. La jeune femme avait senti son regard et son corps dominant. La paralysie d'Adamak n'avait pas été l'œuvre d'Iloé mais encore une fois elle avait participé, elle l'avait souhaité du plus profond de son cœur. Iloé avait souhaité le voir souffrir comme il avait fait souffrir ce navire et son véritable capitaine. Une certaine rancœur était née à l'encontre de ces traitres qui lui sont si fidèles. Quelques secondes de plus auraient suffi à essouffler sa misérable vie, à éteindre cette étincelle haïssable qui trainait dans son regard. Un rien aurait suffi à tout faire basculer.

Dans ce calme presque olympien, la nuit suivait son cours et les heures s'écoulaient. Valerens n'avait toujours pas ouvert les yeux. Son corps faible saignait. Ce n'était qu'une question de temps avant que la gangrène ne s'attaque à sa chair. Le sauver avait été une chose facile comparée à la survie qui l'attendait. Iloé le savait bien, ses heures étaient peut-être comptées. L'allié pour cela, ne pouvait rien faire. Sa puissance n'était pas palpable et il n'était pas humain, il n'était pas vraiment là. Cette chimère n'était pas guérisseuse, elle ne l'a jamais été. Pourtant Iloé sentait son désir d'aider. L'allié voulait apaiser les souffrances de Deker, l'aider à trouver le chemin du calme et de la sérénité, mais elle n'y arrivait pas.

« Tu as déjà fait beaucoup, reposes-toi maintenant. » Murmura Iloé par-dessus son épaule.

La chaleur rassurante qui avait emprisonné sa main jusque-là, disparu, laissant les deux captifs dans leur pièce de fortune.

Après l'évanouissement d'Adamak, deux matelots avaient pris le commandement et avaient ordonné de descendre les deux captifs dans les cales, à un endroit où personne n'irait les déranger. Iloé et Valerens furent emmenés dans un coin reculé des cales où jamais elle n'avait mis les pieds. Ils les avaient fait entrer, non sans peur, dans une pièce, beaucoup plus petite que la précédente, aménagée pour eux. Cette ancienne réserve contenait des toiles et des hamacs ainsi qu'une lanterne, cette fois plus petite et moins dangereuse pour le navire. Deux carafes avaient été déposées avec un morceau de pain surement le plus moisi du navire. D'un œil méfiant, elle regardait ces deux contenants. Se souvenant de la dépendance de Valerens il était hors de question de lui donner cette eau croupie et assurément empoisonnée. Seulement malgré ces effets inquiétants, cette drogue avait aussi ses effets anesthésiants. Une gorgée suffirait peut-être à calmer ses douleurs sans augmenter sa dépendance. En lui faisait boire, il guérirait plus vite, sans doute... Mais, s'il ne se réveillait pas ? À cette idée le cœur de la jeune femme se brisa.

Iloé enlaça un peu plus Deker enfouis dans ses bras. Elle posa sa tête contre la sienne et lui murmura à quel point elle était désolée. Elle lui disait que bientôt ils sortiraient tous les deux de là. Qu'elle lui laissait le temps de se rétablir et qu'ensuite il fuirait ce navire ensemble aider de leur allié. La jeune femme saisit les mains froides et tremblantes de Deker entre les siennes pour les réchauffés. Elle les serra fort comme pour retenir ce qui lui restait de sa vie. Iloé ne comptait pas le laisser partir. Cet homme était l'être chère qui la retenait dans ce monde. Elle l'aimait et elle ne comptait pas l'abandonner. Malheureusement, Iloé ne disposait d'aucun outil pour le garder auprès d'elle. Aucun médicament, aucun calmant, rien, mais à part des bandages faits à l'aide de toiles. Prier était peut-être le seul moyen de le sauver. Consternée par ces montagnes russes émotionnelles elle soupira. Ainsi va la vie. En attendant, la captive continua de murmurer à l'oreille de Deker. Ces mots n'étaient pas là que pour le rassurer lui, mais aussi pour la rassurer elle. Elle avait besoin d'entendre ces mots. Bien qu'elle n'était pas seule à se rebeller, elle était seule garante de leurs survies.

Les mers d'un autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant