En regardant l'horizon, je sens une présence dans mon dos. Je me retourne et vois Emilien adossé à une coque de bâteau. Nos regards se croisent mais aucun de nous n'a le moral.
– Tu sais, p'têt que c'est pas la fin... dit-il.
Je sais pas s'il dit ça pour me rassurer ou pour lui.
– Peu convaincu... Je veux pas te faire peur mais un arrêt cardiaque... Allez viens on va prendre un burger, j'ai faim.
J'avance et le prend par le bras. On se dirige vers Burger King. Nous arrivons et commandons. Nous nous installons sur une table près d'un fenêtre. A peine notre plateau servi, je me jette sur mon burger. Emilien, lui, ne touche pas à son menu.
– Mec, t'as pas faim ?
– Mais t'es un fada... Nona vient de mourir, putain ! Et toi, tu peux bouffer un burger comme si de rien n'était !
Puis il se lève et quitte le Burger King, fou de rage. Je finis de manger, paye et sors à mon tour du fast-food. Je récupère mon vélo et vais chez Emilien. Je ne prend même pas la peine de sonner. J'entre en trombe, monte les escalier quatre à quatre et ouvre la porte d'Emilien violemment. Il est allongé sur son lit, sa tête sous un coussin. Je l'entend pleurer.
– Mec, je veux bien croire que t'en peux plus, que tu trouve ça injuste, mais tu ne peux pas m'obliger à devenir fou comme toi !
Je referme la porte et descend pour finir mon aprem' devant la PS4 d'Emilien.
Après quelques heures, Emilien descend et s'excuse. Pour toute réponse, je lui tend une manette et nous partons pour au moins trois heures de jeu.
Une fois la partie terminée, ses parents débarquent dans le salon avec un air abattu. Son père me regarde et dit :
– Ah, parfait Ludo, tu es là. Nous avons une triste nouvelle à vous annoncer. Bien... Donc, comme vous le savez, Nona a fait un arrêt cardiaque. Les pompiers l'ont emmenée à l'hôpital et les médecins l'ont prise en charge. Malheureusement, ils n'ont pas réussi à la...
– ... sauver, termine Emilien, désespéré.
– Les funérailles sont organisée samedi prochain, dans une semaine, dit la mère d'Emilien.
– Et pour Nico ? demande Emilien.
Nicolas, est le grand frère d'Emilien. Il a vingt deux ans et fait des études de commerce à Sydney. Je ne me rappelle pas l'avoir déjà vu, il est vraiment absent dans la famille.
– On peut le prévenir par Skype, dis-je.
– Bonne idée ! intervient le père d'Emilien.
– Je ne l'appelle pas ! dit Emilien en se dirigeant vers la porte d'entrée.
Il ouvre la porte, sort et la referme en claquant derrière lui.
Les regards se tournent alors vers moi.
– Euh, je vais le voir.
Je me lève du canapé, fonce vers la porte, sors et la referme derrière moi avec plus de délicatesse. Dehors, il fait nuit. La ville est endormie mais un cri brise le silence reposant. Je tourne la tête et vois Emilien adossé à un lampadaire. Il regarde le ciel.
– Tu vois, je comprends pas pourquoi mon frère (il prononce ces mots avec dégoût) doit être prévenu alors qu'il n'a jamais fait attention à elle. Nico n'a jamais aimé personne dans la famille, il s'est jamais comporté comme un frère. C'était un coloc' pas un putain de frère ! Je vois pas pourquois il devait être prévenu.
– Car il..., je commence, hésitant.
– Car c'est mon frère, car il fait partie de la famille. Oui, je sais, mais le problème c'est que non, mon frère n'a jamais eu de famille, mon frère jamais voulu de famille !
Puis un silence, un silence qui veut dire beaucoup. Pas le silence gênant, pas le silence qui fait du bien. Un silence triste. Ce silence marque le manque de son frère pour Emilien, la perte de sa grand-mère.
– Viens, on va marcher, dis-je.
Il approuve d'un hochement de tête. Nous marchons pendant quelques heures, en silence côte à côte, nous marchons jusqu'à ce que la fatigue se fasse ressentir.
– Je suis crevé, dit Emilien.
– Alors on rentre.
– J'ai pas la force de rentrer chez moi c'est à l'autre bout de Marseille...
– Viens chez moi, on n'est qu'à quelques rues.
Nous nous dirigeons vers ma maison. Une fois devant la porte, je réalise que j'ai laissé Harmony seule toute la journée. Instinctivement, je lève la tête et regarde sa fenêtre. Elle est allumée. Ma soeur ne dort pas ? Non, elle a sans doute dû essayer une fois de plus de veiller jusqu'au retour de mes parents.
J'ouvre la porte et monte immédiatement dans sa chambre. Elle est allongée par terre, endormie, près de la fenêtre. Je la porte et la pose délicatement dans son lit. J'en ai marre qu'elle fasse ça mais une fille de dix ans n'as pas à subir l'absence de ses parents tous les jours ! Une fois bien installée, je lui fais un bisou sur le front. J'éteins la lumière, quitte sa chambre et ferme la porte derrière moi.
Je descend et vois Emilien étalé sur le canapé.
– Tu sais où se trouve ta "chambre".
Il acquiesce, se lève et se dirige dans le couloir face à lui puis disparaît derrière l'une des portes.
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La Nature reprend ses droits
Ficção CientíficaUNE NATURE SOUMISE Elle reprend les rênes de la vie, va changer les règles du jeu. Les humains regretteront d'avoir inventé le mot « pollution ». DEUX ADOS UNIS Ludo et Evan sont amis depuis l'enfance et feront face à la révolution naturelle. Ils vo...