Chapitre 22 - Lucille

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Face à Elisabeth, assise sur le divan dans le bureau que les deux inspecteurs avaient restitué pour plutôt s'installer dans l'une des deux salles de permanence dans le bâtiment principal, Lucille semblait encore éprouvée trois jours après la découverte du corps.
Grace aux soins de l'infirmière scolaire et aux attentions de ses amis, elle avait commencé à se remettre et le choc était un peu passé mais elle restait traumatisée. D'ailleurs, ses mains tremblaient légèrement et son regard était hanté. Elle sirotait lentement son thé sans paraître réellement s'apercevoir de la boisson coulant le long de sa gorge.
Abandonnant son observation soucieuse, Elisabeth s'enquit d'une voix douce :

« Comment te sens-tu, Lucille ?
- Je n'arrête pas de le revoir... Même quand je dors, et je me dis que j'aurais dû faire quelque chose pour lui...
- Tu n'aurais rien pu faire.
- Pourtant, je suis venue ici justement pour aider les autres, ceux comme moi, mais je n'ai rien pu faire pour lui. J'ai essayé pourtant...
- Ce n'est pas de ta faute, Lucille.
- Je n'arrête pas de penser à ce qu'il a dû ressentir, toute sa souffrance et sa peur alors qu'il se vidait de son sang, seul dans le couloir... Quelle horreur !
- Il faut que tu arrives à t'en détacher. C'est vrai qu'il s'agit d'une affreuse tragédie mais tu n'y es en rien responsable, il faut que tu prennes de la distance avec tout ça.
- Je n'y arrive pas.
- Peut-être que si, si tu partais quelques jours. Les cours ont été suspendus pour Alana, Eléanora et toi. Tu pourrais passer un peu de temps chez toi, ça te ferait du bien.
- Mes parents sont encore en voyage, au Sri Lanka je crois.
- Et seulement voir ta sœur ?
- Elle est très prise par ses études, je ne voudrais pas la déranger.
- Je suis sûre que tu ne la dérangeras pas. Tu as besoin de t'éloigner de tout cela, de ces images.
- Je ne penses pas que les policiers acceptent que je partes.
- Ils t'ont dit de rester ? Ils te...soupçonnent ?
- J'ai découvert...le corps et ils ont du mal avec mon témoignage.
- Comment ça ? Tu as mentit ?
- Bien sûr que non ! Mais ils ont du mal à concevoir comment ma magie m'a permit de sentir qu'il y avait quelqu'un en détresse. Ça ne m'a pas empêché d'arriver trop tard... J'aurais tellement voulu le sauver...
- Je comprend. Mais peut-être que cette terrible expérience peut t'apporter une leçon.
- Une leçon ? Répéta Lucille, incrédule.
- Tu es quelqu'un de profondément gentil et généreux, tu voudrais aider tout le monde mais ce n'est pas possible. On ne peut pas aider tout le monde, même si c'est douloureux.
- C'est vrai... Mais, lui, j'aurais voulu... Peut-être que seulement quelques minutes supplémentaires et j'aurais pu faire quelque chose...
- Ou bien le meurtrier aurait encore été là et tu serais morte aussi, tu n'aurais pas pu aider toutes les personnes que tu vas encore aider.
- Vous croyez ?
- Oui, j'en suis certaine. Ce qui est fait est fait, même si c'est dur et que l'on voudrait changer les choses. Tu n'as pas à te reprocher ce qu'il est arrivé. Repose toi et concentre-toi sur ta convalescence. Et appelle ta sœur aussi. »





Les Yeux du Pouvoir - Tome 1 : Rouge Sang  [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant