Chapitre 25 -Flash spécial

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Comme toujours, la salle de détente était bondée et saturée par l'agitation.
Nolwenn supposait qu'on finissait par s'habituer, à se faire à cette ambiance, mais, elle, elle ne souhaitait pas s'y habituer. Elle voulait seulement partir, se sortir de cet enfer dans lequel sa vie l'avait plongé, auquel elle avait été condamnée dès qu'elle était née avec ce regard orange si atypique, la désignant clairement comme une magicienne.
D'ailleurs, elle comptait les jours avant son départ de ce centre d'éducation pour jeunes en difficultés et ce depuis qu'elle avait reçu la confirmation de son admission il y avait trois semaines.
La seule raison pour laquelle elle n'avait pas quitté cet affreux bouge dès que le mail était arrivé était que les formalités d'usage n'étaient pas encore terminées et qu'elle devait donc patienter avant de retrouver sa liberté entourée de magiciens comme elle, comme avant mais en mieux. Plus que deux semaines et elle pourrait s'y installer.
Elle aurait pu partir il y avait déjà plusieurs mois, ayant eu sa majorité en février, mais elle n'avait aucun endroit où aller or, une mention du juge pour mineur à sa condamnation stipulait qu'elle ne pourrait sortir du centre correctionnel que si elle pouvait garantir de trouver une situation stable et respectable, ce qu'elle n'avait pas déniché avant d'écrire au directeur de l'institut Belforde en expliquant sa situation et son histoire.
Visiblement touché et compréhensif, Monsieur Bleforde avait rapidement répondu en lui assurant une place parmi ses pensionnaires et en lui promettant de gérer toutes les formalités administratives, toujours dans le but d'offrir asile et soutiens à tous les jeunes magiciens, quelque soit leurs antécédents.
Évidemment, elle avait organisé cela dans le dos du directeur du centre correctionnel, qui n'avait d'ailleurs pas apprécié cette petite manigance mais, si il l'avait réprimandé pour cette manœuvre effectuée dans son dos, il n'avait pas interférer dans la procédure ni tenter de l'empêcher de se faire, trop heureux de se débarrasser de Nolwenn. Il était toujours satisfait de pouvoir un peu désengorger son centre mais il était tout particulièrement enthousiaste à l'idée de voir Nolwenn quitter son établissement. Elle n'était pas la pensionnaire la plus turbulente et plutôt au contraire du genre à rester dans con coin à lire tranquillement avec ses écouteurs dans les oreilles, mais elle effrayait à cause de ses pouvoirs, c'était le lot de beaucoup de magiciens.
Pour une fois, cela arrangeait Nolwenn.
Ainsi, son admission n'avait pas posé de problème et, plus les jours passaient en la rapprochant de son arrivée à l'institut Belforde, plus elle sentait ses épaules s'alléger, libérées d'un poids par la certitude que tout irait mieux une fois là-bas, qu'elle n'avait plus beaucoup de temps à supporter cet endroit.
Assise sur une chaise dans son coin habituel à l'écart du reste et des agitateurs, autrement dit, tous les pensionnaires, dans la salle de détente, la jeune fille sourit en songeant à la nouvelle vie qui l'attendait sans relever les yeux de l'écran de son téléphone où s'affichaient les pages du roman qu'elle lisait, plongée dans cet imaginaire qu'elle affectionnait. D'ailleurs, si elle avait pu, elle serait enfermée dans la chambre, qu'elle partageait avec quatre autres filles, pour davantage de calme et de solitude mais elle n'en avait pas la permission alors elle se contentait de s'isoler en elle-même, coupée des conversations ambiantes par sa musique.
Ainsi, elle ne remarqua pas le brusque calme, ou relatif calme puisque ce concept ne semblait pas exister ici, qui s'abattit sur la salle. Elle ne s'en aperçut que lorsque l'un de ses camarades lui donna un coup dans l'épaule gauche.
Réagissant vivement, Nolwenn se tourna, la main brandie avec les doigts légèrement recourbés, prêt à user de sa magie, ce qui lui coûterait un avertissement des éducateurs, mais elle n'avait que ce moyen pour se défendre et se faire respecter, condition essentielle pour survivre à un tel endroit, mais elle suspendit son geste en ravalant ses pouvoirs en constatant que le jeune homme qui avait ainsi attiré son attention ne recherchait pas la confrontation mais seulement à lui signaler quelque chose.
Après avoir vivement reculé, connaissant les effets de la magie de la jeune fille, il se contenta de lui indiquer le vieux poste de télévision devant lequel tous s'agglutinaient, sans un mot. Nolwenn fronça les sourcils en retirant ses écouteurs de ses oreilles en s'apercevant que c'était le générique du journal d'informations, juste après l'annonce des titres. Normalement, personne ici ne s'intéressait aux informations,attendant plutôt les programmes du soir qui étaient la plus grande cause d'affrontement parmi les pensionnaires du centre.
La jeune fille se leva en fixant l'écran et, comme elle n'entendait rien à cause du brouhaha ambiant, elle fit léviter la télécommande jusqu'à elle et augmenta le volume pour écouter les événements ayant secoué le monde dernièrement et lequel elle devait écouter,ne comprenant pas pourquoi elle devait s'y intéresser.
Elle comprit immédiatement lorsqu'elle la vidéo d'une civière recouverte d'une bâche noire dont le chargement ne laissait aucun doute apparent, car elle reconnu avec stupéfaction le bâtiment de briques brunes duquel elle était évacuée, il formait, avec les autres, l'institut Belforde.
Les mains tremblantes, elle augmenta encore le volume alors que la voix d'une journaliste résumait les faits d'un ton atone :

"Un deuxième corps a été retrouvé dans l'enceinte de l'institut Belforde, un établissement spécialisé dans l'accueil de jeunes magiciens, tôt ce matin à une heure vingt-deux par un groupe d'élèves."

Nolwenn faillit en lâcher la télécommande et son téléphone.
Un deuxième corps ? Elle n'était même pas au courant pour un premier ! Qu'est-ce que tout cela voulait dire ? Il y avait des meurtres à l'institut Belforde ?
Tous les regards convergèrent vers la jeune fille alors qu'elle s'efforçait de maîtriser les tremblements nerveux qui envahissaient son corps, sachant que cette école qui semblait se muer en décors pour un film horrifique était le futur foyer de Nolwenn.
Les lèves sèches, cette dernière se concentra nerveusement sur les paroles de la journaliste qui continuait à expliquer :

"Un élève de dix-neuf ans est actuellement en garde-à-vue pour ces deux meurtres. Il a été trouvé sur les lieux du deuxième crime et aurait des antécédents psychologiques ainsi qu'une personnalité instable. Cependant, les autorités n'ont aucune idée du mobile. En effet, les victimes n'avaient aucun point commun et ne se connaissaient pas."

Nolwenn secoua la tête de gauche à droite, refusant que ces faits la poussent à fuir et à annuler son admission pour plutôt rester encore dans cette prison.
Ce n'était pas une quelconque histoire, aussi sombre soit-elle, qui allait la faire renoncer à sa liberté, à son projet de rejoindre d'autres magiciens.

Les Yeux du Pouvoir - Tome 1 : Rouge Sang  [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant